Le jour où mon père n'a plus eu le dernier mot. Marc Meganck

Le jour où mon père n'a plus eu le dernier mot. Marc Meganck - Photo by Matteo De Lorenzi on Unsplash

Bien que Marc Meganck soit l’auteur d’une longue et éclectique bibliographie (romans, nouvelles, polars, essais et récits), je dois confesser que je ne le connaissais pas du tout. Un petit tour sur son site Internet m’a permis de combler cette lacune et de constater que Le jour où mon père n'a plus eu le dernier mot est un roman très personnel. William Braecke, le narrateur, est sans aucun doute l’alter-ego de Marc Meganck. Jusqu’à quel point la fiction rejoint-elle la réalité ? Un début de réponse nous est fourni par Tito Dupret dans une recension du livre sur le blog Le Carnet et les Instants. L’écrivain belge lui aurait confirmé, lors d’une interview téléphonique, que la première partie du roman était bien inspirée de ses souvenirs d’enfance. La ressemblance ne s’arrête pas là puisque le héros est écrivain et historien de formation… comme l’auteur. On espère, en revanche, que Marc Meganck n’est pas aussi torturé que son personnage. William Braecke connait à la fois les tourments du cœur et du corps. Ignoré par sa mère, rejeté par son père, insulté par son frère aîné puis abandonné par sa jeune amoureuse, notre quadragénaire est atteint d’un mal mystérieux qui lui vrille les os et les entrailles. Pour soigner tout ça, William abuse des médicaments et de l’alcool… sans obtenir le résultat escompté. Et puis un jour, il est pris d’une lubie. Il propose à son géniteur de l’accompagné dans un périple sur les traces du Pêcheur d’Islande de Pierre Loti. Le voyage n’est bien-sûr qu’un prétexte. 

Le roman de Marc Meganck est sans concession et la plupart des personnages sont franchement antipathiques. Le père est un nostalgique du IIIème Reich, la mère est une intégriste religieuse et le frère est juste un abruti. Le narrateur n’est pas tendre non plus avec lui-même, se décrivant plus ou moins comme un raté. Seule, Anaïs, la grande absente, échappe à cette désespérante galerie de portraits. Bref, on est loin ici du roman léger et bourré de situations rocambolesques qui mettront le lecteur de bonne humeur ! Le voyage entrepris par les Braecke père et fils sort effectivement des sentiers battus mais c’est loin d’être une promenade agréable. William espère obtenir des réponses que Kasper refuse obstinément de lui donner. Le fossé qui sépare les deux hommes depuis plus de 4 décennies peut-il objectivement être comblé ?  Pour le narrateur, l’aventure en Atlantique Nord est un peu l’opération de sauvetage de la dernière chance. 

A l’instar du roman Le sang des bêtes de Thomas Gunzig, cette lecture s’inscrit dans le cadre de la campagne Lisez-vous le Belge 2022. 

Le jour où mon père n'a plus eu le dernier mot. Marc Meganck. Editions F deville, 300 p. (2022)


 

Commentaires

  1. Ça doit être assez rude comme lecture.

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    1. oui même si le narrateur est adulte, j'ai été touchée par sa quête de reconnaissance paternelle

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  2. Je ne connaissais ni l'auteur ni ce Lisez vous le belge? ^_^

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    1. j'ai découvert cette campagne un peu par hasard. Je suppose qu'elle doit être visible dans les librairies belges francophones

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  3. Je dois avouer que je lis bien peu belge et que ta chronique me donne envie de découvrir ce roman. Dans les romans, ce sont plus souvent les pères qui proposent aux fils (adolescents) de partir pour un trip (voir "Sukkwan Island"), et souvent, il y a au moins un personnage auquel s'attacher. J'aime bien les romans qui sortent des sentiers battus.

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    1. Ce roman est assez dur. On a de l'empathie pour le narrateur. Les membres de sa famille sont loin d'être bienveillants ou chaleureux. On dirait sans doute que le père est toxique. Je n'ai pas lu Sukkwan Island de David Vann mais ta remarque m'a rappelé un autre ouvrage où il est question de voyage en famille. Il s'agit du Lac de nulle part de Pete Fromm (également édité chez Gallmeister). Les enfants sont adultes mais c'est bien le père qui est à l'initiative du périple.

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  4. Quel tableau de famille ! Le périple ne doit pas être de tout repos ! Des remous inquiétants ... Je sens que je vais passer ...

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  5. Si je me souviens bien, les voyageurs dérogent dès le début à l'esprit de "Pêcheur d'Islande" puisqu'ils ne partent pas de Bretagne mais d'Ostende. Ils voyagent uniquement par la mer (ferry, porte-conteneurs, etc) et passent par Hull, Aberdeen, les Orcades, L'archipel des Shetland puis les Îles Féroé. Le narrateur écume tous les bars et comptoirs où on sert de l'alcool quand il ne se dispute par avec son géniteur...

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