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Humus. Gaspard Koenig

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  Les nouvelles générations (les sociologues les étiquettent sous les lettres Y et Z, c’est dire si ça sent déjà le sapin) n’aspirent plus à changer le monde mais à le sauver de la destruction. Il n’y a pas de planète B ! Exit les pansements du développement durable et gaffe au "greenwashing" ou à l’écoblanchiment. Les " bifurqueurs ", ces jeunes diplômés d’AgroParisTech qui invitent leurs camarades de promos à déserter les voies capitalistes hautement dévastatrices, appellent le reste de la société à un sursaut individuel et collectif face à l’urgence climatique. A chacun de trouver ses alternatives. Les héros de ce roman initiatique ont justement des idées assez précises. Et si nos amis les lombrics pouvaient nous sortir de l’impasse écologique ? « Dès le premier jour, Arthur s’était considéré en exil. Autrefois une des terres les plus fertiles de France, le plateau de Saclay avait été transformé en désert fonctionnel, une interminable zone commerciale où les en

Quand arrive l'aube nautique. Samir Dahmani

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  Sans l’avoir jamais lu, je connaissais déjà Samir Dahmani. Je n’ai entendu que du bien du diptyque en collaboration avec son épouse : l’album Je suis encore là-bas de Samir Dahmani faisant écho à Je ne suis pas d’ici de Yunbo. Quand arrive l’aube nautique , le nouveau roman graphique du dessinateur et scénariste, se présente comme le premier tome d’une série anthologique intitulée Korean Night Stories . Le seul lien avec l’œuvre précédente est la Corée du Sud. Ji-won et son amie Ji-won sont inséparables depuis l’école primaire. Lorsque vient le moment d’entrer à l’université, elles doivent quitter leur ville natale de la côte sud pour aller vivre à Séoul. Seong-ji s’inquiète déjà de ce changement de vie puisqu’elle ne fera pas les mêmes études que Ji-won. Celle-ci s’agace de ses réticences et l’informe qu’elles ne seront pas en co-location ensemble comme elles l’avaient d’abord envisagé. Les relations entre les deux jeunes filles se distendent très rapidement au grand désespoir de

Naufrage. Vincent Delecroix

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Le 24 novembre 2021, 27 migrants se sont noyés dans la Manche en tentant de rejoindre nuitamment les côtes britanniques. Deux personnes seulement ont survécu au naufrage du canot gonflable sur lequel elles avaient embarqué. Pourtant, les victimes ont appelé le CROSS (Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage) du cap Gris-Nez à 14 reprises. Les sauveteurs français ont refusé d’envoyer un navire de secours en dépit des demandes des garde-côtes britanniques, contacté eux aussi par les naufragés. Cette affaire a d’autant plus choqué l’opinion publique que les communications ont été enregistrées, dévoilant les propos inappropriés d’une opératrice en aparté. Vincent Delecroix s’est inspiré des éléments connus de ce drame et en a inventé d’autres pour combler les vides. A travers la forme romanesque, il a tenté de s’immiscer dans l’esprit de l’agente incriminée.  Une bonne partie du roman est d’ailleurs une sorte de monologue au cours duquel la jeune femme expose son point

Au lac des Bois. Tim O’Brien

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Comment ils étaient malheureux . C’est le titre du premier chapitre ce roman. On y apprend que John et Kathy Wade se sont installés dans un cottage au bord du Lac des bois (qui n’est pas fictif), face à "l'Angle nord-ouest du Minnesota". Ce territoire est une exclave des Etats-Unis, situé dans les provinces de l’Ontario et du Manitoba. On ne peut y accéder qu'en traversant le Canada (par voie terrestre) ou le Lac des Bois (par voie lacustre). Nous sommes en septembre 1986. John, ancien gouverneur du Minnesota, vient de perdre les élections sénatoriales après une tempête médiatique sans précèdent. Le couple est ruiné. Il aspire au calme et à l’isolement, loin des révélations qui ont ruiné la carrière politique du mari. Kathy espère mener enfin la vie dont elle rêve depuis leur rencontre à l’Université : un voyage à Vérone, une belle maison et plusieurs bébés. La question est de savoir s’il est possible d’oublier les incidents de parcours et les fantômes récemment sorti

Plein ciel. Pierre-Roland Saint-Dizier & Michaël Crosa

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Ce roman graphique commence par un fait divers. Nous sommes dans les années 90, dans la résidence Plein Ciel à Mulhouse. Emile, 78 ans, tombe du 17e étage de son l'immeuble. S’agit-il d’un accident ou d’un suicide ? Quelques voisins proches de la victime apprennent bientôt que le septuagénaire avait laissé des consignes posthumes à leurs intentions. Chacun s’interroge. Quel incident dans la vie d’Emile aurait pu l’inciter à se donner la mort ? Même Martine, son amie qui le connait depuis plus de 30 ans, ignore ses motivations. Ils ont emménagé là presque en même temps, avec leurs familles respectives. Dans les années 60, la dernière tour n’était même pas encore achevée. Dans une autre vie, ils auraient peut-être vécus une belle idylle mais aucun des deux ne souhaitait briser son ménage.  Les enfants ont grandi dans la cité puis sont partis construire leurs propres vies. Le fils d’Emile ne s’entendait pas avec son père et ne le voyait plus depuis la mort de sa mère. Les voisins l’ap

Rhapsodie balkanique. Maria Kassimova-Moisset

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  Le choix d’un livre tient parfois à peu de chose. C’est parce que j’ai séjourné dans le sud de la Bulgarie que j’ai eu envie de lire le roman de Maria Kassimova-Moisset. A travers Rhapsodie balkanique , j’espérai retrouver l’atmosphère particulière de ce beau pays. En réalité, si la première partie du roman se déroule à Bourgas, sur le bord de la mer Noire, le reste de l’histoire nous conduit dans la Turquie d’Atatürk.  L’héroïne tragique et flamboyante de ce roman s’appelle Miriam. Elle est née en 1909 à Bourgas et c’est la grand-mère de la narratrice. A travers l’histoire ce cette aïeule, et celle de son père Haalim, Maria Kassimova-Moisset tente en effet de reconstruire la mémoire familiale. Il manque beaucoup de pièces au puzzle parce qu’il n’est pas toujours facile d’évoquer des souvenirs douloureux. L’alter ego de l’autrice se décide enfin à questionner ses origines par l’intermédiaire de son œuvre. Les conversations qu’elle entretient avec ses fantômes viennent s’intercaler

Délivrance. James Dickey

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Paru en 1970, récompensé par Prix Médicis étranger en 1971 et inscrit sur la liste des 100 meilleurs romans du 20e siècle par la fameuse maison d’édition The Modern Library en 1998, Délivrance est un classique de la littérature américaine. Le roman de James Dickey a été adapté à l’écran par John Boorman en 1972, avec Jon Voight, Burt Reynolds, Ned Beatty et Ronny Cox dans les rôles de Ed Gentry, Lewis Medlock, Bobby Trippe et Drew Ballinger. Le long métrage a été nominé pour l’Oscar du meilleur film en 1973. Autant dire que le livre, comme son adaptation cinématographique, ont déjà suscité des milliers de commentaires et d’analyses. Certains y ont vu un parallèle avec la guerre du Vietnam mais c’est surtout la dualité entre société civilisée et monde sauvage que je retiendrai. La confrontation est à l’origine d’un drame qui oblige les protagonistes de cette histoire à réévaluer leur vision idyllique de la nature mais aussi à composer avec les notions de bien et de mal. Bref, le roman s