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Une saison pour les ombres. R.J. Ellory

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Jack Devereaux est enquêteur pour une société d’assurances à Montréal. Il mène une vie solitaire, sans femme ni enfant et n’a pratiquement aucun ami en dehors son collègue Ludo. Lorsqu’un agent de la Sûreté du Québec l’appelle pour le prévenir de l’arrestation de son frère Calvis, accusé d’avoir brutalement agressé un habitant de Jasperville, c’est tout son passé qui lui revient à la figure.  A la fin des années 60, dans l’espoir d’une vie meilleure, la famille de Jack a déménagé à la frontière du Québec et de la Province de Terre-Neuve-et-Labrador, dans une ville minière fondée par la Canada Iron. Lorsque les Devereaux débarquent dans le Nord-Est, ils découvrent une bourgade isolée où le climat particulièrement rude vient à bout des meilleures volontés. Jack et sa sœur aînée semblent s’acclimater tant bien que mal à leur nouvel environnement même si leur grand-père maternel perd un peu la boule et leur raconte des histoires terrifiantes inspirées des légendes locales. La famille fait

La Longue-vue. Elizabeth Jane Howard

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  Je n’ai pas lu les "Cazalet" d’Elizabeth Jane Howard parce que je ne suis pas grande amatrice de sagas qui s’étendent sur plusieurs volumes. Aussi, lorsque les éditions du Quai voltaire ont décidé de rééditer également La Longue-vue , le second roman de l’autrice britannique, j’ai pensé que c’était le bon moment pour découvrir son œuvre. Pour avoir lu la critique sur le blog Livr’escapades je savais déjà qu’il serait question d’un mariage au sein de la bourgeoisie anglaise du 20ème siècle. Ce n’est pas l’un de mes thèmes de prédilection mais il faut savoir sortir de sa zone de confort de temps en temps. L’ouvrage a été écrit en 1956, et reflète, non sans ironie de la part de la romancière, le contexte et le mode de pensée de l’époque.   « Mais à ce moment les messieurs firent leur entrée, ayant terminé leurs mystérieux conciliabules techniques sur l’argent, le sexe, les instincts meurtriers des Nord-Coréens – terminé de discuter de problèmes fondamentaux de manière aussi

A la ligne. Joseph Ponthus

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Comment exprimer l’aliénation mentale et la fatigue physique du travail en usine ? Joseph Ponthus répond à cette question à travers le récit de son expérience dans l’industrie de la conserverie et au sein des abattoirs bretons. J’ai été surprise, au premier abord, par ce texte en vers libres. Puis, je m’y suis faite et j’en ai apprécié la poésie. Le rythme n’est pas uniforme mais pas hachuré non plus et se lit même avec une remarquable fluidité. « J’écris comme je pense sur ma ligne de production / Divaguant dans mes pensées seul déterminé / J’écris comme je travaille / À la chaîne / À la ligne » Joseph Ponthus, ou Baptiste Cornet de son vrai nom, est né à Reims. Il a fait des études littéraires et a travaillé dans le secteur social, en région parisienne, avant de rencontrer sa compagne, originaire de l’île de Houat. L’amour a donc conduit notre bonhomme à un autre bout de la France où, en dépit de ses diplômes et de ses états de service, il ne trouve pas de travail. Lassé de l’oisivet

Voyage aux îles de la Désolation. Emmanuel Lepage

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Saviez vous qu’Emmanuel Lepage est le premier auteur de BD a avoir été nommé peintre officiel de la marine en 2021 ? Il doit ce titre à ses missions sur les TAAF (Terres australes et antarctiques françaises). Le dessinateur en fait le récit dans plusieurs albums dont Voyage aux îles de la Désolation et La Lune est blanche . Les éditions Casterman les ont rassemblés et réédités en versions intégrales sous les titres d’ Australes (2014) et d’ Antarctique (2015). Le second volume a été réalisé en collaboration avec François Lepage, le frère d’Emmanuel.  En février 2010, à l’heure du petit déjeuner, Emmanuel Lepage reçoit un coup de téléphone de son frère. Un désistement de dernière minute lui offre l’opportunité de participer à un reportage sur les TAAF. Il a une demie heure pour se décider. Sa décision sera prise en un quart d’heure, le temps de se remémorer quelques rêveries maritimes remontant à l’enfance et inspirées des personnages de Pierre Joubert, Hergé, Jules Verne, Robert Lo

Bivouac. Gabrielle Filteau-Chiba

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Le 12 avril prochain, l’autrice engagée Gabrielle Filteau-Chiba sera présente au Festival du livre de Paris dont le Québec est l’invité d’honneur cette année. J’ai profité de cette occasion pour lire le dernier volet de sa trilogie romanesque consacrée à la nature. Bivouac peut néanmoins se lire indépendamment des autres tomes, Encabanée (Le Mot et le reste, 2021) et Sauvagines (Stock, 2022).  Le triptyque s’inspire largement de la vie de l’autrice. En 2013, Anouk (l’alter ego de G.F.-C.) décide d’abandonner la vie trop trépidante de Montréal pour s’installer au vert, dans une cabane de bucheron. Elle passe trois ans au cœur de la forêt, dans la région du Haut-Kamouraska au Québec, sans eau courante ni électricité. Le second roman, qui est en cours d’adaptation audiovisuel, raconte le combat de Raphaëlle, agente de protection de la faune et amoureuse d’Anouk, menacée par un braconnier. Nous retrouvons les deux femmes dans le troisième volet. Elles vivent dans la yourte de Raphaëlle

Crossroads. Jonathan Franzen

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J’ai raté la parution de tous les livres de Jonathan Franzen : La 27e Ville ( The Twenty-Seventh City , 1988), Phénomènes naturels ( Strong Motion , 1992), Les Corrections (2001), Freedom (2010), Purity (2015) et Crossroads (2021)*. Il était donc largement temps de rattraper mon retard. L’occasion s’est présentée grâce à une proposition de lecture commune d’ Ingannmic . Je découvre donc l’écrivain américain par l’intermédiaire de son 6ème roman. Il s’agit d’une fresque familiale, un grand roman social américain comme je les aime.   L’essentiel de l’intrigue se déroule entre deux fêtes religieuses, soit Noël 1971 et Pâques 1972. Jonathan Franzen dissèque la psyché des cinq membres de la famille Hildebrandt à New Prospect, une banlieue cossue de Chicago (Illinois). D’une manière ou d’une autre, la vie de chacun d’entre eux est impactée par une association paroissiale pour la jeunesse appelée Crossroad. Sa grande affaire est l’organisation d’un voyage scolaire dans une réserve Navaj

Neuf vies. Peter Swanson

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  Après Huit crimes parfaits , voici Neufs vies . Entre les deux, il y a eu Chaque serment que tu brises (Gallmeister, 2022), mais ce polar est dans une autre veine que ces deux-là. A l’instar de Neuf parfaits étrangers de Liane Moriarty, le nouveau roman de Peter Swanson fait référence au chef d’œuvre d’Agatha Christie désormais intitulé Ils étaient dix .  Je sais bien qu’on s’y perd dans toutes ces références numériques et je pense qu’il vaut mieux se pencher sur l’intrigue. En effet, comme dans le livre d’Agatha Christie, les futures victimes reçoivent un courrier de leur assassin. Il ne s’agit pas d’une invitation dans une île déserte mais d’une liste de noms sans autres mentions. Les destinataires ne se connaissent pas et n’ont apparemment aucuns liens entre eux.  La liste compte 6 hommes et trois femmes. Il y a deux septuagénaires, Frank Hopkins et Jack Radebaugh, les autres frôlant la quarantaine. Jessica Winslow, agente du FBI à Albany, en fait partie. Elle flaire immédiatemen

Les Doigts coupés. Hannelore Cayre

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Hannelore Cayre est connue pour ses polars et notamment Celui intitulé La Daronne qui a été porté à l’écran par Jean-Paul Salomé en 2020 avec Isabelle Huppert et Hippolyte Girardot dans les rôles principaux. Du coup, le lecteur s’attend sans doute à un roman policier, d’autant que la jaquette des Doigts coupés est sombre et que le bandeau de couverture annonce un roman noir préhistorique. Autant le dire tout de suite, dans cette histoire, il y a bien une scène de crime remontant à l’Âge de pierre mais le traitement de l’intrigue est bien plus original que prévu. L’autrice s’est offert une relecture drolatique et féministe de l’obscur Paléolithique. Le lecteur est plongé dans le vif du sujet assez abruptement puisque le roman s’ouvre avec une conversation téléphonique qui fait tout de suite penser à un scénario de cinéma. Celle-ci nous permet d’assister en direct à la découverte d’une sépulture préhistorique sous le chantier d’une piscine privée en Dordogne. La première idée qui vient

Sauvage. Jamey Bradbury

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Si je vous dis que ce roman intitulé  Sauvage  nous conduit au sein d’une famille de mushers en Alaska, vous imaginez sans doute la rudesse du climat, les grands espaces, la flore primitive, la faune indomptée, etc. Vous aurez raison mais l’intrigue va au-delà de cette vision un peu convenue. Elle vous réserve bien des surprises, surtout si vous vous attendiez à récit dans la veine du Nature Writting.  Le roman de Jamey Bradbury est à la frontière des genres, entre récit initiatique, thriller, fantastique et horreur.  La famille Petrikoff se satisfait de ces conditions de vie rustiques, au plus près de la nature, où le quotidien est rythmé par les soins portés aux chiens de traîneau. Bill, le père, bénéficie d’une certaine notoriété dans le milieu des courses. Il a gagné plusieurs fois l’Iditarod Trail Sled Dog Race, une compétition fameuse qui compte plus de de 1 700 km dans la taïga, entre Anchorage et Nome. Mais ça, c’était avant le décès de son épouse, renversée par une voiture lor

L’œil du loup. Daniel Pennac

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Les parents ont parfois le privilège de partager des lectures avec leur progéniture, surtout lorsqu’on sollicite leur aide pour les devoirs à la maison. C’est dans ce cadre scolaire que nous avons choisi L’œil du loup de Daniel Pennac, en concurrence avec Croc-Blanc et L’appel de la forêt de Jack London.  Je précise que le nombre de pages n’était pas notre seul critère de choix et que nous avons finalement favorisé une œuvre contemporaine.  L’opus est divisé en quatre parties. Au début du récit, nous faisons la connaissance de Loup-Bleu, un animal borgne vivant en captivité dans un zoo. Il vient de perdre sa compagne et refuse désormais tous contacts visuels avec les humains. Sa résolution est largement mise à mal par la présence d’un jeune garçon qui reste planté pendant des heures devant son enclos sans bouger. Qui est-il ? Pourquoi l’observe-t-il ainsi ? Son abnégation intrigue notre vieux loup au point qu’il décide finalement de s’en approcher. La seconde partie du roman commenc