Juste une mère. Roy Jacobsen

 

Juste une mère. Roy Jacobsen

Quelques années après la seconde guerre mondiale, une famille de pêcheurs, les Barrøy tentent de survivre sur l’île qui porte leur nom et dont ils sont désormais les seuls habitants. Ils sont une quinzaine en comptant les beaux-frères, belles-sœurs, oncles, tantes, cousins et cousines. 

Située au large de la côte du Helgeland, le district le plus au sud de la Norvège du Nord, l’île n’est pas un lieu très hospitalier. Le climat et l’environnement sont rudes. Il n’y a ni eau courante ni électricité. Les hommes de la famille passent leur temps en mer, laissant aux femmes le soin de s’occuper des enfants en bas âge et des animaux. Les adolescents, quant à eux, sont envoyés en Internat sur les îles Lofofen, voire à Trondheim ou à Oslo pour les plus doués, même si les garçons ont tendance à délaisser les études pour la pêche. 

La guerre a laissé de nombreuses séquelles dans la région : des rancœurs et des bâtards. Ingrid, mère courage, se débat dans ce contexte si particulier pour élever Kaja, sa fille. Elle l’a eu avec un fugitif russe qu’elle a caché quelques temps pendant la guerre et aujourd’hui disparu dans le vaste monde. Mais cette histoire là constitue l’intrigue des précédents volets (Les invisibles, Mer blanche et Les yeux du Rigel).

Juste une mère raconte comment Ingrid Barrøy, l’héroïne, devient la tutrice puis la mère adoptive de Mattis/ Mathias. Il est officiellement le fils d’Olavia et Johannes Hartvigsen mais les gens du coin soupçonnent qu’il est plutôt le rejeton illégitime d’un officier allemand. Sa mère naturelle disparait un beau jour. Si on en croit les rumeurs, Olavia serait partie retrouver son amour de jeunesse en Allemagne. Elle est suivie de peu par le vieux Johannes, dont on ne retrouve que le bateau au large de la côte. Mathias en hérite et sa revente lui rapporte un petit pécule qu’Ingrid va devoir protéger bec et ongles. La vie reprend ensuite son cours naturel avec son lot de petites joies et de soucis… jusqu’au drame qui va bouleverser la vie d’Ingrid et de ses enfants.  

J’ai eu un peu de mal au départ à m’y retrouver dans la multitude des personnages dont il n’est pas indiqué spontanément le lien de parenté ou le rapport avec la famille. Par ailleurs, l’écriture de Roy Jacobsen est à l’image des paysage abrupts et des protagonistes taiseux : il utilise des phrases sèches et essentiellement factuelles. Pour autant, on ne peut pas dire qu’il n’y a pas d’amour au sein du clan familial. Les adultes posent un regard à la fois tendre et un peu distant sur leur progéniture. La marmaille, elle, s’égaie avec bonheur sur cette terre sauvage. 

Par de nombreux aspects, ce roman m’a rappelé la Trilogie de Tora d’Herbjørg Wassmo. L’atmosphère est moins pesante et les protagonistes sont moins torturés mais on retrouve le fond historique de l’après-guerre, le contexte de mer nourricière et de l’activité de la pêche alliés à la rudesse des gens du nord de la Norvège. Cela m’a pris un peu de temps pour entrer dans le roman parce qu’il aurait fallu lire les volets précédents. Mais, une fois que j’ai pris mes repères et apprivoisé le style de l’auteur, je n’ai pas boudé mon plaisir. 

💪Parce que la vie insulaire et la pêche prennent indirectement beaucoup de place dans l’intrigue de se roman, cette lecture s’inscrit dans les challenges de lecture organisés par Fanja et Ingannmic, le Book Trip en mer et Lire le monde ouvrier et les mondes du travail

📌Juste une mère. Roy Jacobsen, traduit par Alain Gnaedig. Gallimard, 304 pages (2024)

Book Trip en mer / Lire le monde du travail


Commentaires

  1. J'ai beaucoup aimé "les invisibles" et "les yeux du Rigel". J'emprunterai celui-ci quand il sera à la bibliothèque.

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    1. En fait, j'avais d'abord repéré Les vainqueurs à la bibli mais il est assez long. Juste une mère m'a permis d'avoir un aperçu du style de l'auteur.

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  2. ah oui, on sent bien à te lire que ce n'est pas le premier tome, l'histoire demeure néanmoins intéressante.

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    1. je n'avais pas vu en choisissant ce roman qu'il s'agissait d'une fresque en plusieurs volumes. L'intrigue reste intéressante en effet mais il faut faire un effort pour entrer dedans.

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  3. Je l'avais remarqué mais pas noté car il faisait partie d'une saga et que je n'étais pas prête à me lancer dans toute une série de livres. Mais visiblement, on peut le lire indépendamment à condition de s'accrocher un peu au début.

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    1. En tout cas, ce volet m'a donné envie de lire les précédents.

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  4. Je vois le commentaire d'aifelle, ces livres sont en bibli, faut voir, mais pas prioritaire pour l'instant

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    1. Je te recommande quand même de commencer par le premier volet et de les lire dans l'ordre.

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  5. ça n'a pas l'air simple mais intéressant !

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    1. Ce n'est pas simple quand on prend tout dans le désordre mais je pense que l'ensemble de la fresque vaut vraiment le coup

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  6. Bravo pour les deux participations ! Je ne te suivrai pas sur ce roman, j'avais tenté de lire La mer blanche, qui m'avait vraiment ennuyée. Pourtant j'aime la littérature nordique, notamment Herbjorg Wassmo.

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    1. L'écriture de Roy Jacobsen est un peu aride. Je ne sais pas si c'est propre à ce roman, à la série ou à l'ensemble de son oeuvre.

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  7. J'aurais aimé le noter mais hélas il n'est pas dans ma médiathèque, décidément ! Par contre j'ai noté ses autres romans, je vais donc soumettre celui-ci...Ils ont peut-être hésité à l'acheter parce que c'est une série.

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    1. Il y a également un roman indépendant du même auteur, sur un thème similaire, je crois. Il s'agit des Vainqueurs.

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  8. En évoquant Herbjorg Wassmo, tu as trouvé un argument pour me convaincre !

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  9. Je l'avais repéré en librairie et noté dans la foulée, sans réaliser qu'il s'agissait de la suite d'une série. J'ai du mal avec l'écriture factuelle, je me contenterai donc d'un emprunt à la BM et, tant qu'à faire, je choisirai le premier tome de la série.

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    1. Il y a aussi un roman indépendant de cette série qui semble pas mal du tout (si je me fie à la 4ème de couverture). Il s'agit des Vainqueurs mais je crois que c'est un pavé.

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  10. Ces deux challenges permettent souvent des beaux doublés.^^ En tout cas, plus la traversée avance, la diversité de livres autour de la thématique maritime m'épate, mais c'est vrai que je n'ai pas pensé au départ à aller vraiment fouiner chez les Nordiques alors que leur situation géographique les favorise pas mal pour un book trip. Enfin une intrigue un peu plus posée, sans naufrages et mal de mer. Ça change et ce n'est pas plus mal. Bon, visiblement, il vaut mieux commencer par le premier volet.

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    1. J'ai bien peur qu'il y ait une histoire de naufrage dans l'un des volets précédents ^_- Sinon, une bonne partie de ce tome là se déroule sur la terre ferme. Les parties de pêches sont suggérées. Il y a quand même une sortie en mer mémorable (avec une évocation très cinématographique) mais, chut, je ne dis rien.

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  11. j'ai beaucoup aimé "les invisibles "de cet auteur donc , je pense aimer celui-ci aussi .

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    1. Il y a deux autres titres (Mer blanche et Les yeux du Rigel) entre Les invisibles et Juste une mère. Cela vaut peut-être le coup de les lire dans l'ordre

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  12. J'ai vraiment beaucoup aimé les Invisibles mais je ne savais pas qu'il y avait eu une suite. Cette Ingrid, c'est la petite fille à qui son père apprend à ne pas avoir peur de l'île et de ses tempêtes. Est-ce que la Mer blanche et Les yeux de Riggel racontent aussi son histoire ?

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    1. C'est la même Ingrid, oui, dont on suit l'histoire au fil des romans. Je ne t'en dis pas plus pour ne pas divulgâcher l'intrigue.

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  13. Thaïs19.5.24

    Je crois qu’il est pour moi même si quelque fois j’ai un peu de mal avec tous les noms nordiques..,

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    1. C'est vrai que ce n'est pas toujours évident. Ici, on s'y retrouve à peu près car l'auteur utilise surtout les prénoms.

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  14. Anonyme27.5.24

    Pas trop tentée, de plus, j'évite les trilogies etc, enfin, les tomes qui se suivent...

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    1. moi aussi, généralement, mais je n'avais pas vu qu'il s'agissait d'une fresque de plusieurs tomes. Ceci dit, chaque livre peut être lu séparément

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