Premier de cordée. Roger Frison-Roche
Depuis sa publication en feuilleton dans le journal La Dépêche Algérienne en 1941 puis sa première édition en version intégrale chez Arthaud, le succès de Premier de cordée ne s’est jamais démenti. Le roman de Roger Frison-Roche est devenu un classique de la littérature de montagne et une prescription de lecture en classe. Pourtant, et bien que je raffole de récits d’alpinisme, je n’avais jusqu’ici jamais trouvé le bon moment pour le lire!
L’histoire, qui se déroule dans
les années 1920-1930 dans le massif du Mont-Blanc, rend hommage aux guides
chamoniards qui accompagnent les touristes dans leurs "courses" dans
la montagne. La Compagnie des guides de Chamonix est une institution créée en
1821 et donc la plus ancienne du genre. Roger Frison-Roche s’est inspiré de ses
légendes, de ses héros et de ses drames.
Nous faisons d’abord la
connaissance d’un jeune homme, Pierre Servettaz, que son père destine à l’hôtellerie.
Jean Servettaz est l’un des guides les plus estimés de la compagnie et il connait
tous les dangers du métier. Il refuse que son fils se lance dans cette voie ingrate
et peu rémunératrice. Mais Pierre est un passionné. Il ne s’imagine pas vivre
et travailler loin des sommets. Alors qu’il accompagne le vieux Joseph Ravanat,
dit Le Rouge, dans sa dernière expédition, il apprend que son père a été
foudroyé par l’orage au sommet des Drus. Son client américain est sain et sauf
grâce au courage du porteur, Georges, qui secondait Jean dans cette course. Il
en gardera néanmoins les stigmates toutes sa vie car ses pieds ont gelé et il sera
amputé. Mais, pour l’heure, Pierre s’inquiète davantage de redescendre le
cadavre de son père. Tous les camarades disponibles se sont portés volontaires alors
que les conditions météorologique rendent l’ascension très périlleuse.
Ecrit dans le contexte de la
seconde guerre mondiale, Premier de cordée est un hymne au courage, au
dépassement de soi et à la fraternité. Roger Frison-Roche décrit des hommes
taiseux, parfois un peu rudes, mais liée par un amour inconditionnel des
sommets. Leur camaraderie indéfectible sera le ciment nécessaire à la réussite
de la mission de sauvetage et l’élément essentiel dans le processus de
résilience des survivants. Le lecteur est touché par l’abnégation de ces guides
de l’extrême, dotés d’un fort sens de l’honneur. La règle primordiale étant de toujours
ramener le client à bon port quelques soient les circonstances. Roger
Frison-Roche en brosse un portrait toujours bienveillant.
Le terme de "premier de cordée" est entré dans le vocabulaire coutumier des alpinistes après la parution du roman de Roger Frison-Roche. L’écrivain était lui-même un fameux grimpeur, familier du massif du Mont Blanc et des techniques d’escalade. Sa parfaite connaissance du terrain et du contexte professionnel se ressentent dans le roman qui marque par son réalisme. Certains détails, comme la présence du personnage de Joseph Ravanat (alter ego de Joseph Ravanel, le mentor de l’écrivain), me font penser qu’il y a une part très personnelle dans ce roman (à défaut d’être autobiographique). En 1930, Roger Frison-Roche est devenu le premier membre non chamoniard de la Compagnie des guides de Chamonix.
L’écrivain explorateur s’est illustré
dans bien d’autres circonstances mais c’est une autre histoire que l’on peut
sans doute découvrir dans Le Versant du soleil (1981), son autobiographie. Par
ailleurs, il évoque plus précisément son expérience au sein résistance
française en Savoie dans Les Montagnards de la nuit (1968). Roger Frison-Roche
a également publié plusieurs récits de montagne dont le 2ème et le 3ème
volet de la trilogie initiée avec Premier de cordée : La Grande Crevasse (1948) et Retour à la
montagne (1957)… pour moi, de belles heures de lecture en perspective !
💪Cette lecture s’inscrit dans le challenge Escapades en Europe : La grande traversée des Alpes
📌Premier de cordée. Roger Frison-Roche. J’ai Lu, 320 pages
(2020)
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