Là où je me terre. Caroline Dawson

Là où je me terre. Caroline Dawson


💪Pour clôturer le challenge de lecture dédié au Chili, j’ai choisi ce "roman d’autofiction", récit d’une autrice d’origine chilienne qui a émigré au Canada avec sa famille pour échapper à la dictature militaire de Pinochet. L’essentiel de l’intrigue se déroule donc sur cette terre d’accueil. 

La narratrice avait 7 ans lorsqu’elle a pris l’avion avec ses parents et ses deux frères, le jour de Noël 1986. Le livre raconte les derniers souvenirs de la fillette à Valparaiso, l’annonce de l’exil, l’arrivée de la famille en plein hiver, le séjour en hôtel de transit pour les réfugiés politiques, l’hébergement temporaire chez des amis, la découverte des quartiers pauvres de Montréal, la classe d’accueil pour les élèves étrangers, l’apprentissage de la langue française, les petits boulots pour ses parents, la question de l’identité culturelle, l’oubli progressif de la langue maternelle, la lutte des classes, la progressive ascension sociale, etc.

Le ton et la langue évoluent au fil des pages. Les anecdotes relatives à l’enfance sont parsemées de vocabulaire et d’expressions en Espagnol ; celles rapportées du point de vue de l’adolescente sont imprégnées de culture francophone. Je dois dire qu’il y a quand même quelques passages un peu obscurs pour les non québécois (les références à des chansons populaires, des noms de marques locales, l’usage du Franglais, etc). La plupart du temps, on s’en sort quand même par déduction.  

« Véro est entrée en sacrant. Je ne me trompais pas, à peine avait-elle franchi le pas de la porte qu’elle a senti la lourdeur du small talk qui s’ennuie. Elle a ouvert son sac en bandoulière du surplus de l’armée, en a sorti une grosse quille de Tornade déjà entamée, cala ce qui en restait sans même enlever sa tuque et offrit un rot de trucker provocateur en guise de salutation générale à la crowd. »

Là où je me terre est un témoignage universel parce qu’il parle à tous ceux qui ont connu l’exil ou l’expatriation. La narratrice est sincère, sans être revancharde. Son récit est écrit dans une langue accessible et vivante. 

J’ai été touchée par l’histoire de Caroline Dawson et très triste de découvrir son décès des suites d’un cancer en 2024. Elle avait 44 ans. Professeur de sociologie à l’Université de Montréal, elle a mené de nombreux combats politiques, notamment pour l'égalité des chances, la justice, etc. Pour information, son frère cadet, Nicholas Dawson, est également écrivain. 

📝On peut audiolire gratuitement (avec l’accent québécois) Là où je me terre sur le site Internet de Radio Canada. 

📌Là où je me terre. Caroline Dawson. Editions de l’Olivier, 224 pages (2025) 

Printemps latino au Chili


Commentaires

  1. Ah cela m'a l'air bien intéressant (et triste, ce décès)

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  2. Merci pour le lien vers la version audio, je vais tenter ça en espérant ne pas être perdue par le Français du Québec 😊.

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  3. En général, les locutions québecoises sont assez claires pour nous, dans le contexte. Dans l'extrait que tu donnes à lire, la compréhension de l'ensemble demande quand même un effort !

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    1. J'ai pris un "cas extrême", c'est loin d'être comme ça tout le temps

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  4. Il était au programme de mon club de lecture mais je n'ai pas eu le temps de le lire, dommage visiblement

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    1. oui, c'est dommage mais peut-être pas définitivement perdu...

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  5. Ca me disait quelque chose, et j'ai fini par trouver : il avait été proposé lors du mois latino 2023, par Marie-Claude, qui avait beaucoup aimé aussi.. à retenir, donc.

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    1. ah tiens, je n'avais pas vu. Je vais lire son avis. Merci pour l'info

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  6. ah triste alors cette annonce, et du coup, je l'ai lu quelque part. Pour le Québécois au bout de six années de voyage là-bas, je peux fièrement annoncer que j'ai compris tout l'extrait - contrairement à ce qui est dit, les Québecois utilisent beaucoup de termes anglais mais qu'ils francisent (le verbe googler par exemple), il est "fine" vient du mot anglais fine (terme employé par les ados...) bref, parler anglais m'a beaucoup aidé dans ma découverte de cette langue (fuller le tank ...)

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    1. oui, à l'écrit, on arrive à se repérer (surtout quand on a des bases d'Anglais en effet). L'oral, c'est plus dur à cause de l'accent.

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  7. Je tenterai sans doute un jour la version audio. L'accent québécois ne doit que rajouter une dimension à ce texte (j'adore lire pour cette raison Michel Tremblay qui sait faire résonner son écriture de l'accent québécois)

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    1. Michel Tremblay est dans ma liste d'auteurs à découvrir. Peut-être pour le 12 août, pour la journée du livre québécois

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    2. J'avais laissé passer ce rendez-vous. Je me joindrais bien à toi avec un livre de Tremblay justement.

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  8. J'ai failli passer à "autofiction", mais les récits d'exil et d'expatriation me parlent, on n'est pas dans le genre de récit nombriliste. Trop triste ce décès survenu bien trop tôt.

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    1. non pas ce n'est pas du tout nombriliste, contrairement (comme tu le dis) à de nombreuses "autofictions". D'ailleurs j'aurais mieux fait d'utiliser le terme d'autobiographique. C'est un récit émouvant sur la famille, l'exil, la pauvreté...

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  9. Un très beau sujet que l'exil pour clore le challenge en effet. Tant de familles ont quitté le Chili au moment de la dictature...c'est super de nous le présenter. Merci aussi pour le lien vers le livre audio, je testerai pour voir si l'accent est compréhensible pour moi.

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    1. Je suis tombée sur ce livre par hasard et j'ai trouvé qu'il concluait bien le challenge. C'est un texte relativement court, très touchant. On éprouve beaucoup d'empathie pour la narratrice.

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  10. Sympa cette Chilienne à l'accent québécois, c'est original.

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    1. Je trouve aussi. Et le personnage est vraiment sympathique

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  11. Merci pour le lien. Je pense l'écouter mais contrairement à d'habitude sans rien faire d'autre pour mieux suivre, la langue semblant nécessiter une certaine confrontation. Je trouve intéressant de découvrir un témoignage de l'intérieur de quelqu'un ayant connu l'exil...

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    1. Je pense que j'ai choisi l'extrait le plus compliqué pour un non québécois. En réalité, le texte est très abordable.

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  12. Je viens de lire qu'elle est morte jeune, quelle tristesse.

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  13. l'autofiction n'est pas forcément ma tasse de thé, mais ce que tu en dis est intéressant. je note.

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    1. Je me rends compte que je n'aurais peut-être pas dû utiliser le terme d'autofiction mais plutôt d'autobiographie

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