Mrs. Dalloway. Virginia Woolf
Comme de nombreux lecteurs, j’ai une liste d’auteurs incontournables (souvent des classiques) que je projette de lire un jour. Or, il se trouve que le chef d’œuvre de Virginia Woolf, Mrs. Dalloway, fête son centenaire cette année et qu’une nouvelle traduction du roman a été publiée dans la prestigieuse collection de la Bibliothèque de la Pléiade. C’était l’occasion idéale pour me lancer dans une lecture que j’appréhendais et repoussais sans cesse à plus tard. L’argument ultime a été la proposition de lecture commune de Cléanthe autour du roman européen de l’entre-deux-guerres dont Mrs Dalloway est un exemple emblématique. Impossible de me défiler davantage !
Evidemment, j’ai lu quelques études de l’œuvre au cours de ma vie de lectrice et je savais que Mrs Dalloway était un roman expérimental par bien des aspects, sur le fond comme sur la forme. On dit souvent qu’il n’y a pas d’intrigue, au sens traditionnel, mais des pérégrinations introspectives. Celles-ci finissent par former un maillage complexe, un chœur silencieux mais un peu étourdissant. Au milieu de cette cacophonie, Big Ben s’impose comme le métronome des heures qui s’écoulent. Le titre initial du roman, The Hours (Les heures), a d’ailleurs été repris par Michael Cunningham dans son roman s’inspirant de Virginia Woolf, puis le film réalisé par Stephen Daldry,
Virginia Woolf invite son lecteur à suivre la journée de Clarissa Dalloway, une aristocrate londonienne quinquagénaire. Nous sommes en juin 1923. Notre héroïne prépare une réception qui doit avoir lieu le soir même. La journée est splendide, si bien qu’elle décide de se dispenser de sa domestique et d’acheter elle-même les fleurs pour la décoration. Cette promenade permet au lecteur de profiter avec elle du paysage urbain dans le quartier de Westminster. Chemin faisant, Clarissa s’abandonne dans quelques divagations intimes, préjugés et souvenirs de jeunesse. Mrs. Dalloway rencontre d’autres protagonistes, des proches (comme Peter Walsh, son ex fiancé revenu des Indes) et des inconnus (comme Septimus Warren Smith, un ancien soldat qui présente les symptômes d’un choc post-traumatique). Chaque fois que des personnages se croissent, ils semblent se transmettre un témoin fictif, comme dans une course de relais. Le lecteur entre ainsi dans leurs cerveaux et entend leurs soliloques intérieurs respectifs. Grâce à l’effet de miroir obtenu, Virginia Woolf brosse un portrait saisissant de la société londonienne des années 20.
Pour être vraiment honnête, je dirais que j’ai davantage apprécié ce livre à rebours que pendant ma lecture effective. Les circonvolutions introspectives des personnages semblent parfois bien longues et bien ennuyeuses quand on pas d’appétence particulière pour les désidératas de l’aristocratie britannique. Evidemment, le roman de Virginia Woolf ne se réduit pas à cela : la guerre et la pauvreté sont évoquées plus ou moins brièvement, ainsi que les rapports de la population à la famille royale. Par ailleurs, je me rends bien compte que les partis pris de l’autrice sont les atouts majeurs du roman. Il faut resituer l’écriture et la parution du roman dans son contexte, car la romancière s’affranchie des règles de narration qui étaient alors la norme. Trois ans plus tôt, James Joyce avait déjà créé la controverse avec son Ulysse. Pour mémoire, il raconte la journée et les déambulations de Leopold Bloom (Ulysse) et Stephen Dedalus (Télémaque) dans la ville de Dublin. Bref, les raisons de lire Mrs. Dalloway sont solides et il serait dommage de passer à côté, comme je l’ai fait jusqu’à aujourd’hui.
💪Pour cette première étape des Escapades en Europe, Cléanthe a lu La Conscience de Zeno, Patrice a lu Raboliot de Maurice Genevoix, Sandrine a lu La grande peur dans la montagne de Charles Ferdinand Ramuz et Tullia a lu Avril enchanté d'Elizabeth von Arnim.
📌Mrs. Dalloway et autres écrits. Virginia Woolf. Bibliothèque de la Pléiade, 800 pages (2025) / Mrs. Dalloway. POL, 384 pages (2021) / Le Livre de Poche, 224 pages (1982)
Je l'ai lu, et actuellement me suis lancée dans Flush, toujours pour ce challenge (je serai hors date, peu importe)
RépondreSupprimerJe ne sais pas pourquoi mais j'étais persuadée que tu avais déjà lu Flush... est-ce que je confonds avec Kathel peut-être ?
SupprimerJe rentre de vacances et je viens voir ce que tu as lu en mon absence. Je vois que je n'en connais aucun. Il y en a tant à découvrir !
RépondreSupprimerJe n'ai pas été si fainéante finalement ! ^_^
SupprimerJ'ai découvert l'auteure avec ce titre, il y a une quinzaine d'années, et il m'a fallu tout ce temps pour y revenir, alors que j'avais vraiment apprécié ma lecture... Mrs Woolf a quelque chose d'intimidant...
RépondreSupprimeroui, il m'a fallu du temps pour me lancer. Je lirai d'autres titres plus tard
SupprimerMerci pour cette première participation. Je remarque que si ton plaisir est resté mitigé au cours de ta lecture, tu parviens en revanche très bien à restituer l’atmosphère singulière de ce roman. Ce que tu dis du plaisir rétrospectif me parle assez bien: je me demande si ce n'est pas le genre de livres (comme beaucoup de romans expérimentaux des années 1920 justement) qu'on prend plus de plaisir à relire qu'à lire. Justement, ton billet me donne une sacrée envie de le relire!
RépondreSupprimerTu as raison, je pense qu'il faut y revenir après une pause.
SupprimerJ'ai lu ce roman qui heureusement était enrichi de notes qui m'ont bien aidées
RépondreSupprimeroui, les notes permettent de mieux apprécier ce roman. Elles m'ont été très utiles aussi
SupprimerUn roman qu'il faut que je relise : je n'en garde aucun souvenir.
RépondreSupprimerA quelques rares exceptions, j'oublie assez facilement mes lectures
SupprimerJ'ai beaucoup apprécié cette lecture sur le moment, mais encore plus a posteriori moi aussi. Elle a besoin d'"infuser" en quelque sorte 😉.
RépondreSupprimeroui, c'est exactement ça !
SupprimerJe garde un souvenir d'ambiance assez flou et imprécis mais c'est le livre qui veut ça aussi. Le relire me dirait bien.
RépondreSupprimeren effet, le lecteur est pris dns une sorte de tourbillon de pensées
SupprimerUn livre que j'ai pris plaisir à détester, enfin, à dire que j'ai détesté, dans un lointain billet.^^ Par contre j'ai adoré Une chambre à soi, mais c'est de la non-fiction, pas vraiment comparable.
RépondreSupprimerJe suis plutôt d'accord avec ce que tu dis dans ton billet sur Mrs Dalloway. C'est un peu long ces monologues intérieurs et le manque d'intrigue peut devenir pesants... mais, d'un point de vue expérimental, on ne peut que saluer la performance, l'originalité de la construction, la langue, etc. C'est un roman idéal à décortiquer avec des élèves.
SupprimerLu il y a bien longtemps, j'avoue ne pas m'en souvenir avec précision. Une relecture ne serait pas du luxe. J'ai beaucoup aimé le film "Les heures".
RépondreSupprimerJ'ai pour ma part un souvenir assez flou du film mais il me semble que je l'avais apprécié
SupprimerDepuis le temps que je veux prendre le temps de la relire, il faudrait que je me décide à le faire, en tous les cas ce ne sera pas cet été qui va me voir très occupée mais j'y pense sérieusement.
RépondreSupprimeril y a tellement à lire ! Je relis rarement les ouvrages que je connais déjà
SupprimerJ'ai pour ma part découvert Ramuz avec bien moins d'enthousiasme que toi au final... Pour Virginia Woolf, je ne suis pas encore prête... je n'ai pas envie de m'ennuyer.
RépondreSupprimeroh mince, moi qui comptait lire Ramuz ! ça me refroidie un peu. Je vais allée voir ton billet.
SupprimerIngannmic et moi avons lu Flush !
RépondreSupprimerC'est sûr que c'est un roman déconcertant. Quand on ne connaît pas, on se demande où ça va... Mais je trouve qu'il y a un effet addictif de ces phrases si enveloppantes. Et je rejoins le concert de "à relire".
Bon, je note Flush au cas où je me déciderais à lire un autre livre de Virginia Woolf
SupprimerJe l'ai abandonné étant confuse devant le manque de fil conducteur mais pour autant, je n'exclus pas un jour de le lire jusqu'au bout comme tu l'as fait :)
RépondreSupprimerJe t'avoue que j'ai dû m'accrocher un peu.
SupprimerJe relis Virginia Woolf très régulièrement. Un auteur phare pour moi.
RépondreSupprimerC'est évidemment une autrice phare. Par contre, je ne pense pouvoir la lire qu'à petites doses pour l'apprécier à sa juste valeur
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