Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur. Harper Lee

Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur. Harper Lee


J’ai été surprise d’apprendre que ce classique de la littérature américaine, récipiendaire du Prix Pulitzer en 1961 et adapté au cinéma l'année suivante, avait mis beaucoup de temps à conquérir le lectorat français. Dans les années 60, la première traduction de Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur chez Seghers, est passée inaperçue. Vingt ans plus tard, une seconde version chez Julliard n’a toujours pas suscité d’intérêt. Il a fallu attendre la réédition du roman chez De Fallois en 2005 pour que tous ces efforts portent enfin leurs fruits. Ce livre est resté l’unique roman connu d’Harper Lee jusqu’en 2015, date de parution de Va et poste une sentinelle.  Longtemps considéré comme la suite Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur, il s’agirait en fait d’une première version de ce dernier.

La petite ville de Monroeville dans l'Alabama (bourgade natale d’ Harper Lee) sert de décor à la ville fictive de Maycomb où vit la narratrice, Jean-Louise (Scout) Finch. Scout est une fillette de 8 ans, plutôt espiègle. Elle vit avec son père, Atticus, un avocat intègre, et son frère aîné Jem. L'austère tante Alexandra prétend prendre en main l'éducation des deux enfants, qu'elle juge livrés à eux-mêmes. Notre jeune héroïne a fait une entrée fracassante à l'école et la première partie du roman est principalement alimentée par le récit de ses frasques quotidiennes.

L'histoire prend une tournure plus dramatique, lorsque Atticus est commis d'office pour défendre Tom, un Noir injustement accusé d'avoir violé une femme Blanche. A travers le regard enfantin de Scout, se dessine progressivement l'univers d'une société embourbée dans la crise économique des années 30, le conservatisme frileux et la ségrégation raciale.

A la fois roman initiatique et fresque sociale, le roman d'Harper Lee est paru dans une période de lutte pour les droit civiques des Afro-Américains. Il doit aussi son succès au style d'écriture, mêlant la fraîcheur de la narratrice au jugement sans concession de l'auteur. 

« Ses deux premiers clients furent les deux derniers condamnés à la pendaison de la prison du comté. Atticus leur avait conseillé d’accepter la générosité de l’État qui leur permettait de plaider coupables de meurtre au second degré et de sauver ainsi leur tête, mais c’étaient des Haverford, nom devenu synonyme de crétin dans le comté de Maycomb. À cause d’un malentendu provoqué par la détention a priori injustifiée d’une jument, ils avaient commis l’imprudence de descendre le meilleur maréchal-ferrant de la ville devant trois témoins, et ils crurent pouvoir se défendre en affirmant que « ce salaud ne l’avait pas volé ». Ils persistèrent à plaider non coupables de meurtre au premier degré, aussi Atticus ne put-il faire grand-chose pour eux, si ce n’est d’assister à leur exécution, événement sans doute à l’origine de la profonde aversion de mon père envers le droit pénal. »

📌Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur. Harper Lee, traduite par Isabelle Stoïanov. Le Livre de Poche, 320 pages (2006) / Grasset, 480 pages (2015)


Commentaires

  1. Il me semble que ce roman était quand même connu en France bien avant 2005. C'est en effet un beau roman qu'il faut avoir lu.

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  2. nathalie1.3.25

    C'est une réussite. Il y a aussi toute l'ambiance de l'Alabama, avec cette maison soi-disant hantée, c'est presque gothique, ces rapports sociaux d'une grande violence en général. On me l'avait prêté, mais j'ai tellement aimé que je l'ai acheté.

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  3. Tout à fait d'accord avec ton avis, j'ai un très bon souvenir de ma lecture en 2009.

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  4. Lu, et aussi vu le film, qui (de mémoire) se consacre plus à l'affaire criminelle.

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  5. Je l'ai découvert assez tard, poussée par les nombreuses références littéraires et cinématographiques à ce roman qu'on trouve dans les oeuvres américaines. Et j'ai été assez bouleversée, je dois dire. Je l'ai beaucoup offert et conseillé autour de moi ensuite, aux ados notamment.

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  6. Je l'ai lu juste avant de tenir mon blog, je crois, et j'ai beaucoup aimé aussi. "Va et poste une sentinelle", qui en serait une 1e version non publiée, mais a été édité en 2015 et vendu comme une "suite", m'a tellement déçue que je l'ai abandonné en cours de route...
    Et sinon, l'américaine Casey Cep a écrit un récit passionnant sur le projet d'écriture d'un "true crime" qu'Harper Lee n'a jamais terminé. On y retrouve Truman Capote, qu'elle a beaucoup aidé dans l'écriture de De sang-froid, et on y découvre un incroyable fait divers !

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  7. je n'en ai lu qu'une adaptation BD, mais que j'ai beaucoup aimée!

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