Séoul, vite, vite !

Séoul, vite, vite !


 Cette anthologie rassemble 8 textes de 8 auteurs différents. L’éditeur la présente comme un panorama de la littérature sud-coréenne contemporaine. Le titre, Séoul, vite, vite ! est moins le reflet d’un fil rouge qui relierait ces nouvelles que celui de l’évolution de la société coréenne. Les huit textes abordent en effet des sujets très différents comme la famille, la solitude, le deuil ou le sens de la vie. Je ne suis pas certaine d’avoir toujours bien compris où les auteurs voulaient en venir mais j’ai lu la plupart des histoires sans déplaisir. 

Le déménagement de Kim Young-ha est sans doute la nouvelle qui m’a le plus divertie. L’auteur a déjà publié plusieurs livres en France (toujours chez Picquier), parmi lesquels deux recueils de nouvelles intitulés Qu’est devenu l’homme coincé dans l’ascenseur (2011) et Deux personnes seules au monde (2019). Dans Le déménagement, Kim Young-ha nous amuse d’un récit qui montre comment une succession d’imprévus, alliée à la méfiance des uns et la mauvaise foi des autres peuvent dégénérer au point de saboter l’organisation d’un évènement bien orchestré. 

Dans le récit intitulé Au grand magasin Sampung, Jeong Yi-Hyun s’inspire d’un fait divers réel. Le 29 juin 1995, à 17 h 52 heure locale, le bâtiment s’est effondré. Cet immeuble commercial avait ouvert ses portes en  décembre 1989 dans l'arrondissement de Seocho-gu à Séoul. Au milieu des années 1990, le grand magasin employait 1 000 personnes et accueillait 40 000 clients par jour. Le bilan a donc été très lourd. Il s'est élevé à 502 morts et 937 blessés. L’évènement nous est rapporté du point de vue de la narratrice qui a perdu une amie proche dans l’accident. Elle était vendeuse dans le grand magasin. Le lecteur établit rapidement un parallèle entre l’effondrement de ce temple de la consommation et la crise économique qui a frappé les pays asiatiques (dont la Corée du sud) deux ans plus tard. Au grand magasin Sampung (Sampung baekhwajeom) a reçu le prix de littérature contemporaine (Hyundae Munhak) en 2006. Son autrice, Jeong Yi-Hyun a commencé sa carrière littéraire en 2001. Son histoire courte intitulée La solitude des autres (Ta-inui godok) a été récompensée le prix littéraire Lee Hyo-seok. Après la parution de son roman Tu ne sais pas (Neoneun moreunda) sur le blog de la librairie Kyobo Book Center, Jeong Yi-Hyun s’est spécialisée dans la publication de nouvelles en feuilleton sur Internet. 

Parmi les nouvelles du recueil qui m’ont le plus touchée, il y a celle de Kim Jung-Hyuk, Une bibliothèque d’instruments. Après un grave accident de voiture qui aurait pu lui coûter la vie, le héros de ce récit se met en tête qu’il ne peut pas mourir sans avoir rien réalisé d’important. Engagé dans une boutique d’instruments de musique alors qu’il n’a aucune compétence et qu’il n’est même pas mélomane, il décide de réaliser une sorte de bibliothèque des sons. Son idée attire beaucoup de monde, mettant fin à la solitude mal assumée du narrateur. La nouvelle Akgideurui doseogwan, traduite également sous le titre La Bibliothèque des instruments de musique est parue dans un opus indépendant chez Decrescenzo. L’ouvrage contient d’autres textes de Kim Jung-Hyuk. La maison d’édition Decrescenzo a publié deux autres ouvrages de l’écrivain :  Bus errant (en 2013) et Zombies, la descente aux enfers (en 2014). 

Séoul, vite, vite ! a le mérite de présenté un panel varié d’écrivains coréens comme Kim Ae-ran, qui est également édité chez Decrescenzo, (Cours, papa !), Shin Kyung-sook (Quand viendra l’heure) ou Kim In-sook (Une autobiographie féminine). J’ai eu plaisir à les lire même si j’ai souvent eut l’impression de passer à côté des messages profonds portés par les auteurs. J’imagine que je ne maîtrise pas les éléments culturels qui m’auraient permis de les décrypter. La postface de Jeong Myeong-kyo, intitulée Point de vue sur la littérature coréenne : la genèse de l’individu, nouvel horizon de la littérature coréenne m’a néanmoins apportée quelques réponses. 

Lecture dans le cadre du challenge des Bonnes nouvelles

Séoul, vite, vite ! Anthologie de nouvelles coréennes contemporaines. Picquier, 352 pages (2015)

Bonnes nouvelles 2025


Commentaires

  1. Ce challenge est une excellente idée! Là je suis dans des nouvelles de SF (ben oui, le deux en un, trop forte!)

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    1. oui, ça tombe bien. On va pouvoir croiser avec le défi de Sandrine

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  2. Alors, si j'aime bien les nouvelles, je ne suis pas fan des recueils de plusieurs auteurs... ça me demande trop d'adaptation à chaque nouveau texte, je crois. Je note plutôt les recueils de Kim Young-Ha...

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    1. C'est vrai ce que tu dis mais, d'un autre côté, cela permet d'avoir un petit panel d'auteurs. C'est bien pour découvrir la littérature d'une région

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  3. oh comment j'ai pu passer à côté ? j'ai un autre recueils de nouvelles coréennes, du coup il me le faut. L'effondrement du grand magasin est aussi la base d'une très belle et triste série coréenne sur Netflix qui revient sur cet évènement tragique. Bon, je le commande car je ne l'ai pas vu en librairie, merci et bonne année à nouveau !

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    1. Ce n'est pas un livre très récent. Je suis tombée dessus par hasard à la bibli. Je ne savais pas qu'il y avait une série Netflix.

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  4. Oh ça a l'air original, belle pioche !

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    1. C'est un bon recueil pour découvrir la littérature coréenne.

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  5. Malgré mon attrait pour la littérature coréenne, je passe. Je n'aime pas cette sensation de ne pas comprendre où les auteurs veulent en venir, c'est aussi une des raisons pour lesquelles je me méfie des nouvelles en général.

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    1. Tu préfères sans doute les nouvelles avec des chutes inattendues. Ici, il s'agit plutôt de mini romans.

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  6. Le jour où je veux connaître la littérature coréenne j'espère me souvenir de ce recueil je manque de temps !!

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    1. oui, les histoires sont très différentes. C'est un bon moyen pour découvrir la littérature coréenne.

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  7. Même si tu ne penses pas avoir su saisir entièrement les messages des auteurs, ton avis est assez explicite pour se révéler tentateur. Je ne connaissais pas ce fait divers autour du grand magasin...

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    1. Merci, ça me fait plaisir. J'avoue que je n'ai pas apprécié autant toutes les histoires

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  8. Même réflexion que Kathel, je préfère un recueil du même auteur. Mais si celui-ci me tombe sous la main, je tenterai quand même.

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    1. Je comprends. En général, je préfère aussi lorsqu'il s'agit d'un recueil rassemblant les textes d'un même auteur. Celui-ci est une sorte de mise en bouche pour appréhender la littérature coréenne. Il n'y a pas de thème unique, servant de fil rouge. Dans l'ensemble, j'ai eu plaisir à le lire.

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  9. J'ai lu Deux personnes seules au monde, que j'avais beaucoup aimé, à part un texte auquel je n'avais rein compris, complètement loufoque...

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    1. Ah donc, c'est aussi un recueil de nouvelles.

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  10. Je n'aime pas vraiment les recueils avec plusieurs auteurs mais d'un autre côté pourquoi pas pour faire leur connaissance, cela peut être intéressant comme première approche...

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    1. Ce n'est pas ce que préfère non plus en général mais, comme tu le dis, c'est pas mal pour découvrir de nouveaux auteurs

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