Histoire de ma vie. Lao She

Histoire de ma vie. Lao She


Cet opus, réédité chez Folio en 2023, est en réalité une nouvelle extraite de Gens de Pékin. Le titre du recueil est assez explicite. Le fil rouge qui relie ces textes est le petit peuple pékinois dans le cadre urbain des Hutongs, ces quartiers traditionnels constitués de cours et de ruelles étroites.  

Histoire de ma vie est le conte le plus long du recueil. Il s’agit de l’autobiographie fictive d’un ex agent de police au début du 20ème siècle. Au crépuscule de sa vie, il raconte comment et pourquoi la fortune semble lui avoir définitivement tourné le dos en dépit de ses grandes qualités et compétences. Le narrateur est issu d’un milieu populaire mais il prétend savoir lire et écrire bien mieux que les hauts fonctionnaires. Ses parents l’ont incité à entrer en apprentissage très jeune pour devenir Colleur de papiers. C’est un métier sans doute méconnu aujourd’hui. Il était exercé par des artisans qui confectionnaient les nombreuses effigies funéraires pour les enterrements. 

Gens de Pékin. Lao She
Le destin du narrateur a été influencé par deux évènements majeurs. L’un est lié à la grande histoire. Le héros  a assisté aux troubles politiques de 1911 remettant en cause l’ancien régime (la révolution Xinhai), le soulèvement des soldats, la fin de l'Empire des Qing et le début de la République de Chine. Le second évènement est d’ordre très personnel.  Sa jeune épouse s’est enfuie avec un autre artisan colleur surnommé Le Noiraud, abandonnant ses deux enfants en bas âges. Pour échapper aux regards de ses anciens collègues, le narrateur décide de changer de métier. Sa condition lui laissant peu d’options, il choisit d’être agent de police plutôt que tireur de pousse-pousse. C’est l’occasion pour l’auteur d’évoqué aussi très brièvement les contraintes de ce métier auquel il a consacré un roman indépendant (Le pousse-pousse en 1937).  

A travers le récit de son personnage principal, Lao She évoque la vie de labeur des déshérités, souvent sans espoir d’améliorations. La corruption est endémique et le système administratif apparait totalement sclérosé. Certes, le narrateur est un personnage vaniteux, qui peut parfois lasser par ses lamentations incessantes, mais le lecteur ne peut s’empêcher de compatir à son malheur. L’homme n’est peut-être pas très courageux lorsqu’il s’agit d’attraper les voleurs mais ce n’est pas un mauvais bougre. 

Je pense que j’aurais gagné à lire l’Histoire de ma vie dans le contexte des autres récits des Gens de Pékin car il m’a manqué cette mise en perspective pour en apprécier tout le jus. 

J'ai lu ce livre dans le cadre du challenge des Bonnes Nouvelles.

Histoire de ma vie. Lao She, traduit par Trad. du chinois par Paul Bady, Li Tche-houa, Françoise Moreux, Alain Peyraube et Martine Vallette-Hémery. Folio, 128 pages (2023)

challenge des Bonnes Nouvelles 2025


Commentaires

  1. Tu as une fois encore fait une trouvaille intéressante du côté de la Chine ! Sur tes conseils, je note le recueil plutôt que la nouvelle.

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    1. Si tu aimes la littérature chinoise, je pense que ça vaut le coup de lire l'ensemble en effet. Pour une première approche, cet opus est bien aussi

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  2. Je passe... Je n'arrive décidément pas à entrer dans la littérature chinoise, à de très rares exceptions près. Ce qui s'est encore confirmé avec Cité de la poussière rouge.

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    1. Effectivement, j'ai peur que cet opus ne te plaise pas non plus.

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  3. Voila qui est original et intéressant!

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    1. On apprend beaucoup sur la vie quotidienne chinoise à cette période.

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  4. j'avais bien aimé les nouvelles sur les quartiers traditionnels de Pékin de Qiu Xialong Cité de la poussière rouge , je me demande si je trouverai le même intérêt

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    1. J'ai bien aimé les deux aussi. La Cité de la poussière rouge est peut-être plus facile à lire car l'écriture est plus contemporaine

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  5. coucou ! je pioche aussi des nouvelles dans plusieurs recueils, je vais rédiger mes billets pour le challenge. Pour la Chine, je suis aussi ambivalente, j'ai adoré un roman il y a quelques années mais je passe souvent à côté. Si tu poursuis plus tard du reste du recueil, j'aimerais connaître ton avis dessus !

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    1. Oui, c'est une bonne idée. On ne va pas se brider avec des règles trop rigides.

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  6. PHILIPPE8.1.25

    Les auteurs asiatiques, je ne m'y frotte plus, mais je retenterai un jour l'expérience...

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    1. Je te comprends, j'ai eu quelques surprises aussi...

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  7. J'ai toujours cru que ce titre se rapportait à la vie de Lao She !^^ Ton billet m'aura au moins éclairé sur ce point. Aaah pour ma part, c'est plus tentant de me lancer dans la nouvelle seule que dans le recueil, mais le titre du recueil m'attire bien aussi. En tout cas, j'ai toujours cru que le titre de la nouvelle se rapportait à la vie de Lao She !^^ Ton billet m'aura au moins éclairé sur ce point.

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    1. Tiens, c'est marrant, moi aussi je croyais que la nouvelle était une biographie de Lao she. Je me sens moins seule ! Donc, non, ce n'est pas le cas mais ça reste très intéressant.

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  8. Bien que le narrateur soit plutôt vaniteux, la nouvelle semble intéressante notamment pour le contexte social qu'elle dépeint.

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    1. Ce n'est pas toujours très explicite, notamment en ce qui concerne le changement politique mais le contexte social est longuement dépeint.

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