La trilogie berlinoise. Philip Kerr
Bernhard Gunther, dit Bernie, est
une sorte de réincarnation de Sam Spade ou de Philip Marlowe, mais qui aurait
été téléporté dans le Berlin des années 30-40. Vétéran de la campagne de
Turquie et ex commissaire de la Krippo (police criminelle), il a préféré
devancer la purge des services et s'installer à son compte. Sa spécialité ? La
recherche de personnes disparues. Or, la capitale d'Hitler est en proie à une
étrange épidémie de disparition, qui touche essentiellement les juifs.
La trilogie berlinoise rassemble les trois premiers volumes de la série (L'Été de cristal, La Pâle figure et Un requiem allemand), parus entre 1989 et 1991. Depuis, les aventures de Bernie se sont enrichies d’une dizaine épisodes supplémentaires, dont L'Offrande grecque (2018) et un préquel intitulé Metropolis (2019) pour ne citer que les ouvrages les plus récents.
La première partie de la
trilogie, originellement intitulée Les violettes de mars (en référence aux
opportunistes qui ont rallié le parti en 1933), nous ramène en 1936, alors que
Berlin se refait une façade honorable pour accueillir les jeux olympiques.
Bernie est sollicité par l'industriel Hermann Six pour enquêter sur la mort de
sa fille et de son gendre, assassinés chez eux, lors d'un cambriolage. Le
détective comprend vite que le coffre-fort du couple ne contenait pas de
précieux diamants, comme le prétend son employeur, mais des documents
extrêmement compromettants pour ce soi-disant patriote. Gunther poursuit néanmoins
son enquête dans les boîtes de nuit miteuses, les chantiers de construction des
nouvelles autoroutes et même jusqu'au camp de Dachau.
La seconde partie, La pâle
figure, nous conduit en septembre 1938, alors que les Allemands attendent
impatiemment les résultats de la conférence de Munich. Il s'agit de savoir si
Hitler va envahir les Sudètes et plonger l'Europe dans la guerre. En dépit de
la menace qui plane sur le monde, Bernie poursuit son commerce. Il est engagé
par une riche veuve, propriétaire d'une importante maison d'édition, qui veut
savoir qui fait chanter son fils homosexuel. Il faut dire que sous le IIIème
Reich, ce penchant n'est pas particulièrement bien vu. Parallèlement à cette
triste affaire, Bernie est contacté par ses anciens collègues de la Kripo pour
enquêter sur des meurtres en série. De blondes adolescentes sont en effet la
cible d'un monstre qui les égorge suivant un rituel particulier qu'une certaine
presse antisémite attribue aux pratiques juives.
Le troisième volet, Un requiem
allemand, nous fait faire un bond dans le temps, puisque nous atterrissons en
1947 alors que l'Allemagne vaincue, survit dans des ruines partagées entre
Américains, Russes, Britanniques et Français. Nous retrouvons un Bernie en
petite forme, amaigri par des années de guerre et de captivité et démoralisé
par l'infidélité de son épouse fricotant avec un militaire américain.
Néanmoins, notre privé n'a rien perdu de ses convictions et de ses compétentes
d'enquêteurs. Ses « vieux amis » le savent bien. Ainsi, le détective
berlinois se voit embarqué dans une nouvelle aventure qui le conduit à Vienne,
où l'un de ses anciens camarades est d'accusé du meurtre d'un officier
américain. Malgré quelques réticences liées aux activités de l'ex-SS pendant la
guerre, Bernie accepte de se rendre en Autriche. Il a besoin de se changer les
idées et, en ces temps de pénurie, on ne refuse pas une récompense en dollars.
Personnellement je ne vois rien à
redire sur le travail de l'auteur, si ce n'est qu'il est extrêmement soigné,
tant au niveau de l'écriture, que de la construction des intrigues et du
contexte historique. Bernie emploie pléthores de métaphores incongrues,
notamment dans le premier volet, qui le rendent immédiatement sympathique aux
yeux du lecteur. Un type qui use de telles expressions ne peut pas être
mauvais. Ce fait est d'ailleurs confirmé par ses tentatives bravaches pour
résister au rouleau compresseur de la propagande nazie et ses actions d'éclat
chevaleresques. Si les enquêtes de Bernie ne lui offrent pas l'occasion de
protéger la veuve et l'orphelin, du moins défend-t-il les innocents et
respecte-t-il les prostitués. Bien sûr, on pourrait lui reprocher certaines
fréquentations que lui impose son métier. Au cours de ses trois enquêtes
successives, le détective allemand croise une bonne partie des hauts
fonctionnaires nazis, depuis Heydrich, en passant par Himmler et Goering.
La trilogie berlinoise a été
adapté en bande dessinée par Pierre Boisserie (scénariste) François Warzala
(dessinateur). L’album est paru en 2021 aux éditions Les Arènes.
💪Je profite des trois challenges de
lecture en cours ce mois-ci, pour recycler ce billet paru initialement sur mon
ancien blog. Il s’agit d’une lecture commune proposée par Athalie
et Ingannmic dans le cadre de la 3ème édition "Sous les pavés, la page". Les mille et quelques pages de ce livre me permettent de participer
également aux Pavés de l’été chez La Petite liste et aux plus volumineux encore
Epais de l’été proposé par Tadloiduciné, squatteur chez Dasola.
📌La trilogie berlinoise. Philip Kerr. Le Livre de Poche, 1024 pages (2010)
Une lecture commune, alors? A noter pour les pavés 2025? ^_^
RépondreSupprimerBonjour
RépondreSupprimerAh, je n'avais pas repéré encore (à l'occasion d cela participation d'Ingannmic aux Epais d l'été 2024) l'adaptation en BD, voilà qui est chose faite, merci! Ca peut être pour moi une "clé d'entrée" dans l'oeuvre, je chercherai si je la trouve en BD à Paris...
(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
J'aurais pu aussi recycler un billet de mon ancien blog pour ce roman lu en 2012. ;-)
RépondreSupprimerJe me souviens avoir préféré les deux premières parties à la troisième et comme toi, j'étais amusée par les comparaisons incongrues utilisées par Bernie.