Panorama. Lilia Hassaine
« C’était il y a tout juste un an. Une famille a disparu, là où personne ne disparaissait jamais. On m’a chargée de l’enquête, et ce que j’ai découvert au fil des semaines a ébranlé toutes mes certitudes. Il ne s’agissait pas d’un simple fait-divers mais d’un drame attendu, d’un mal qui irradiait tout un quartier, toute une ville, tout un pays, l’expression soudaine d’une violence qu’on croyait endormie. »
Imaginez une ville où tous les murs seraient transparents. La vie de chaque foyer serait exposée au regard de tous. Comment convaincre des milliers de citoyens lambdas de vivre ainsi en vitrine ? L’alibi sécuritaire est un puissant argument. Nous sommes en 2049. Vingt ans plus tôt, la France a connu une révolution sans précédent. C’est un fait divers, relayé par les réseaux sociaux, qui a mis le feu aux poudres et entraîné une suite d’évènements en cascade. Des milliers de gens sont descendus dans les rues pour se substituer à l’appareil judiciaire déficient. Ce jour est resté dans l’histoire sous le nom de Revenge Day et une amnistie massive a été accordée à tous ceux qui s’étaient fait justice. Dans la foulée, le peuple votait une loi de transparence. Son mantra : plus jamais ça ! Avec les murs de verre, pense-t-on, finies les violences domestiques, terminés les actes de pédophilie, éradiqués les crimes et violences en tous genres. Dans les maisons-vivariums des beaux quartiers, on peut observer les faits et gestes de ses voisins 24h sur 24. Des patrouilles citoyennes et des lumières nocturnes complètent le dispositif de dissuasion. Tout est sous contrôle, toutes les relations sociales sont dûment policées, l’auto censure s’impose d’elle-même… Un vrai paradis ! Mais puisqu’on est toujours en démocratie, des zones de non-droits, avec des murs en brique, subsistent. Les citoyens rebelles ayant choisi d’y rester malgré la pression sociale sont donc livrés à eux-mêmes. Ici, aux Grillons, pas de patrouille. Les agents de protection (le mot police est banni dans ce nouveau monde) ne mettent pas les pieds dans ces quartiers d’ostracisation. En revanche, mesure de précaution oblige, des caméras filment les lieux en permanence. Et pourtant, c’est bien à Paxton, le quartier le plus huppée et le plus sécurisé de la ville, que se produit l’inimaginable. Une famille, les Royer-Dumas, a disparu sans laisser de traces. L’enquête est confiée à Hélène Dubern, la plus ancienne de la brigade. A ce titre, elle connait les méthodes d’investigation utilisées par le passé pour résoudre ce type d’affaire. Nico, son coéquipier-ami-voisin, lui donne un coup de main.
Lilia Hassaine sait comment ferrer son lecteur ! Cette idée de créer une intrigue policière dans un monde dystopique était plutôt maligne de la part de l’autrice. Les questions qu’elle amène sur notre mode de vie et/ ou notre organisation sociale et politique sont à la fois nécessaires et passionnantes. C’est aussi une façon plus ludique (qu’un essai) et peut-être plus consensuelle d’aborder certaines thématiques complexes comme le totalitarisme, l’uniformisation, le wokisme, etc. Pour ma part, j’ai dévoré ce roman en quelques heures.
💪J’ai piqué cette idée de lecture chez Keisha, Le Bouquineur, Thaïs et Marilyne. Elle s’inscrit dans le cadre du Challenge "Sous les pavés, les pages", organisé par Ingannmic et Athalie.
📌Panorama. Lilia Hassaine. Gallimard, 240 pages (2023)
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