Le club des mamans mortes. Paul Hurlink

Le club des mamans mortes. Paul Hurlink

C’est vrai que le titre de ce polar peut paraître un peu bizarre et surtout très glauque. Il fait référence à une société secrète dont les membres sont quatre lycéens complètement paumés. Leur principal point commun, vous l’aurez peut-être deviné, tient au fait qu’ils sont tous orphelins de mère. Pour le reste, c’est une histoire d’amitié toxique et de manipulation. Comment Louison, la narratrice, une adolescente effacée vivant dans une ville de province calme est-elle devenue une punkette pointant toutes les semaines au commissariat de quartier avant d’aller dormir dans un foyer loin de sa famille ? Le récit s’inscrit dans une double temporalité. Les références au passé (la rencontre entre Louison et Courtney, sa nouvelle meilleure amie, puis le recrutement des garçons, Kodeveï, le geek et Samir le taiseux) alternent avec le présent (la nécessité de cacher son identité pour échapper aux représailles de ses anciens complices mais aussi à la traque organisée par les justiciers amateurs du réseau #majustice). Louison tente sans véritable conviction de résister à la pression du groupe. L’aveuglement volontaire ou non des adultes participe sans doute à sa chute. Son père et sa belle-mère ne sont pas de mauvais bougres, ils semblent juste dépassés. Tout comme le père de Samir, qui noie son chagrin dans l’alcool depuis le décès de son épouse. Le paternel de Courtney, quant à lui, est une sorte d’ado attardé, égoïste et irresponsable.  

Ce premier roman de Paul Hurlink a été qualifié de polar underground et grunge… sans doute parce qu’il fait de nombreuses références musicales à Hole, le groupe de Courtney Love, Nirvana, The Libertines, etc. Pour ma part, je lui ai surtout trouvé un esthétisme très cinématographique (avec une chasse à l’homme époustouflante à la fin du roman) d’autant que la playlist s’impose d’elle-même. J’ai été bluffée par la maîtrise dont l’auteur fait preuve, à la fois dans la construction narrative et la psychologie des personnages. Il parvient à se glisser dans la peau d’une jeune fille de 15 ans (puis 17) avec une étonnante facilité. Ensuite, il montre bien l’engrenage qui conduit les CMM (les membres du Club des Mamans Mortes) à retourner les violences psychologiques et/ou physiques qu’ils subissent, contre les "hamsters" (ainsi qu’ils appellent les personnes qu’ils jugent formatées). 

J’ignorais, avant de tomber sur ce roman, que les éditions Alibi avaient été rachetées par le groupe Dargaud. Pour ceux qui ne connaissent pas, je précise qu’Alibi a commencé par publier des mooks ("magbooks" ou "livres magazines") dédiés à l’univers du polar. Depuis 2020, l’éditeur propose huit à dix romans par an, dont certains sous le label Filature(s).

Le club des mamans mortes. Paul Hurlink. Editions Alibi, 318 pages (2023)

Commentaires

  1. Je doute que les références musicales soient vraiment les miennes, mais bah.

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    1. En lisant la 4ème et les références musicales, je pensais que l'intrigue me conduirait dans les années 90... mais non. Les réseaux sociaux et l'usage du portable n'étaient pas si développés, il me semble.

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  2. Je me sens assez éloignée de cet univers là ; je ne suis pas sûre que ça me plairait.

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    1. Il est surtout question de manipulation et de jeunes à la dérive...

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  3. Comme Aifelle, et la thématique "jeunes à la dérive" ne m'emballent pas non plus. Et je n'y étais pas du tout pour le titre. Je n'avais absolument pas pensé à un club d'orphelins de mère. Mais ça se tient, en effet.^^

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    1. Je ne suis pas non plus adepte des histoires trash mais là, ça passe bien. C'est peut-être le style. Pour le titre, je n'avais pas non plus pensé à ça.

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  4. C'est tentant quand même !

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    1. Je crois que tu n'as pas peur des romans noirs et celui-ci est plutôt captivant. Je pense que ça peut te plaire

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