Sans loi ni maître. Arturo Pérez-Reverte

Sans loi ni maître. Arturo Pérez-Reverte

Après s’être essayé avec succès à l’intrigue policière (Le Maître d'escrime, Le Tableau du maître flamand ou Le Club Dumas) puis au récit de cape et d’épée (dans les 7 tomes du Capitaine Alatriste), Arturo Pérez-Reverte nous propose un conte animalier qui a les saveurs du roman noir. J’ai pensé à Blacksad, la série de bandes dessinées qui s’inspire des œuvres de Dashiell Hammett et/ou de Raymond Chandler. Dans les BD de Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido, le héros est un chat, tandis que dans Sans loi ni maître, les protagonistes principaux sont des chiens. 

Negro, le chien narrateur, est un métis, né d’un croisement de mâtin espagnol et de fila brasileiro. Ancien lutteur, il a abandonné les combats clandestins organisés par les humains, et gagne désormais sa pitance quotidienne comme gardien. Il fréquente l’Abreuvoir, un lieu tenu par une chienne d’origine argentine appelée Margot. Il s’agit d’une rigole où coulent les résidus d’anis des bars voisins. La plupart des chiens du coin s’y retrouve régulièrement pour fraterniser et échanger quelques ragots. Or, Teo, un limier de Rhodésie que Negro considérait comme son meilleur ami, n’y a pas mis les pattes depuis un bon bout de temps. Il semble avoir disparu en même temps que Boris le Beau, un barzoï très aristocratique qui habite dans les beaux quartiers de la ville. Negro décide de mener sa petite enquête. Les premiers témoignages le conduisent dans le bidonville de Cañada Negra puis à l’Abattoir, un lieu où les hommes forcent les chiens à s’entretuer. 

A travers le tragique destin de ses personnages canins, le romancier espagnol traite évidemment la question de la maltraitance animale. La cruauté et la cupidité des humains poussent une partie d’entre eux à se rebeller, suivant l’exemple de Spartacus et des esclaves de la Rome antique. 

J’ai la sensation qu’Arturo Pérez-Reverte a autant de plaisir à écrire que nous à le lire. Quel style vraiment ! En dépit de la noirceur du roman, on ne peut s’empêcher de remarquer la verve et l’humour du romancier espagnol. Les dialogues canins et les parallèles anthropomorphiques sont extrêmement savoureux. J’imagine que ses références sont plus littéraires que les miennes et qu’il s’est inspiré d’un autre de ses compatriotes : je pense en particuliers à Miguel de Cervantès et à sa nouvelle intitulée Le colloque des chiens. Par ailleurs, le titre du roman en version originale, Los perros duros no bailan (Les chiens durs ne dansent pas) suggère (ainsi que le signale l’essayiste Jean-Paul Brighelli dans une recension) une allusion au roman de Norman Mailer, Les Vrais durs ne dansent pas

Sans loi ni maître. Arturo Pérez-Reverte. Seuil, 224 p. (2022)


Commentaires

  1. J'ai découvert l'auteur il y a cinq ans avec "Deux hommes de bien" que j'avais adoré. J'en avais lu deux autres dans la foulée, puis plus rien, et pourtant je dois avoir au moins deux autres de ses romans dans ma pal. Ton billet me sert de piqûre de rappel, merci 🙂

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    1. ça faisait très longtemps aussi que je n'avais pas lu un livre d'Arturo Pérez-Reverte. Je ne sais pas trop pourquoi car je me suis régalée avec ses romans policiers et historiques.

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