La faussaire. Patricia Delahaie

La faussaire. Patricia Delahaie

Patricia Delahaie explique en exergue qu’elle s’est inspirée d’un fait divers. Il m’a suffi de quelques clics sur Internet pour découvrir qu’il s’agit de l’affaire Zawadzki. Celle-ci a défrayé la chronique à la fin des années 90 et au début des années 2000. Les noms des protagonistes et ceux des lieux ont bien-sûr été modifiés. Jean-Paul Zawadzki, la victime, est devenu Marc Ellis. Sa femme, Nicole, s’appelle désormais Camille, tandis que Michel Trouillard-Perrot, son amant, est identifié sous le pseudonyme de Paul Ménard. De la même manière, le lieu du crime n’est plus Sougy, dans le Loiret, mais Cernon-en-Beauce. 

Nous sommes le 13 juillet 1998, il fait beau, les bleus ont gagné la coupe du monde de football et les Français sont en liesse… sauf les Ellis, frappés par un malheur inattendu. Marc, un colosse de 39 ans, père de famille, grand sportif et pilote dans l’armée de l’air vient de mourir. Depuis son retour de mission, il se plaignait de fatigue et de divers maux dont il ne parvenait pas à se débarrasser malgré les traitements prescrits par le bon docteur Ménard. Selon ce dernier, son patient aurait été victime d’un arrêt cardiaque. Bien que sa liaison avec l’épouse du défunt soit de notoriété publique, personne n’a songé, dans un premier temps, à mettre sa parole en doute. Il faut dire que le docteur Paul Ménard est très estimé dans la région. On le considère comme un excellent médecin de famille, dont l’empathie, le dévouement et la patience sont les principales qualités. La fiction trouve sa conclusion 20 ans plus tard, lors de la victoire de l’équipe de France en 2018 (J’ouvre ici une parenthèse pour m’interroger sur ce détail accrocheur.  Pourquoi avoir choisi cet évènement sportif, qui ne correspond pas à la réalité des faits, comme bornes chronologiques du roman ? Quelle plus-value pour le récit ? S’agit-il d’une volonté de mise en perspective ?).

Je m’attendais à entrer dans un palpitant polar et je me suis retrouvée à lire une sorte de chronique judiciaire sur une banale histoire de triangle amoureux. Patricia Delahaie a divisé son intrigue en trois séquences. J’imagine que ce découpage a pour objectif d’apporter de l’eau au moulin et d’élever l’intrigue au-delà du simple voyeurisme. La première partie du roman, et la plus longue, s’attarde sur le déroulement des évènements qui conduisent à l’assassinat de Marc Ellis. Le second volet est consacré au procès.  Le dernier épisode, enfin, nous projette 20 ans après les faits, lorsque le docteur Ménard sort de prison. Céleste, la fille unique des Ellis, tente de donner un sens aux évènements qui ont marqué son enfance. L’autrice interroge ici la possibilité de résilience.

J’ignore quels éléments font que l’opinion publique ou les médias s’emparent davantage d’un fait divers plutôt que d’un autre. J’ai bien compris que Patricia Delahaie s’intéressait surtout à la mécanique des faits et à la psychologie des personnages mais je n’ai pas eu envie de la suivre sur ce chemin. Paul Ménard était-il si naïf ? Était-il réellement persuadé d’avoir débarrassé sa fragile maîtresse d’une brute qui, soi-disant, la frappait et la violait ? En ce sens, pensait-il sincèrement avoir accompli un acte héroïque ? Comment cet homme si droit a-t-il pu se laisser ensorceler par Mathilde Ellis et réaliser une sortie de route aussi spectaculaire ? La veuve noire, ainsi que les observateurs ont surnommé Camille Ellis, était-elle une machiavélique manipulatrice ou une simple affabulatrice.  Telles sont les questions qui hantent ce roman que j’ai lu dans le cadre du challenge "Les Louves du polar", organisé par Collectif Polar

La faussaire. Patricia Delahaie. Belfond, 368 p. (2022)


Commentaires

  1. Je ne me souviens pas du tout de ce fait divers... (la coupe en 98, si)

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  2. Je ne te sens pas vraiment enthousiaste, je passe...

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  3. Si je peux m'en passer, je m'en passerai vu la quantité de livres qui m'attend déjà ;-)

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    1. Tu as raison. La vie est trop courte et les PAL sont trop hautes !

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