Pluie. Ng Kim Chew

Pluie. Ng Kim Chew


 L’auteur de Pluie a été récompensé par le Prix Emile Guimet qui lui a été remis lors d’une cérémonie à l'occasion Des Nuits de la Lecture, le 20 janvier 2022. Il est également le récipiendaire du Grand Prix du Salon du Livre de Taipei et du prix Trépied de la Littérature. Trois bonnes raisons, il me semble, de choisir cet ouvrage parmi la multitude qui se distingue durant cette période de l’année. Par ailleurs, les hasards du calendrier éditorial font que La traversée des sangliers de Zhang Guixing était disponible en Français à la même période. Il m’a semblé intéressant de pouvoir comparée ces deux œuvres taïwanaises qui ont pour décor la Malaisie. Et je dois dire que je suis surprise par l’inventivité de la littérature sinophone. 

La forme narrative de Pluie a de quoi déstabiliser son lecteur. Peut-on qualifier ce livre de recueil de nouvelles ? Pour Ng Kim Chew, il s’agit plutôt d’une succession de tableaux, comme autant de versions d’une intrigue possible avec des personnages et des éléments récurrents parmi lesquels cette pluie diluvienne omniprésente. Les différents récits (7 tableaux et un chapitre intitulé Coâ, coâ, coâ) s’articulent autour d’une famille de migrants chinois installés au cœur de la forêt malaisienne. Ils vivent de la récolte du latex, tiré de leur plantation d’hévéas. Malheureusement, la pluie réduit les récoltes à néant. Les protagonistes doivent donc attendre qu’elle cesse, dans le huis-clos de leur maisonnée. Sin, le fils de la famille, nous apparaît tantôt sous l’apparence d’un garçonnet de 5 ans, tantôt à l’âge adulte. S’est-il réincarné comme le suggère les croyances du lieu ? A l’instar de Sin, les autres protagonistes changent constamment de rôle. Sa maman, par exemple, est tour à tour, fille-mère, épouse aimante, veuve abusée…. Il en est de même pour les objets. Une antique pirogue apparait dans plusieurs tableaux et dans des circonstances totalement différentes à chaque fois. Il n’y a pas non plus de véritable chronologie… à peine quelques points de repères quand les Japonais investissent la Jungle durant la seconde guerre mondiale, suivis par les chantres de la révolution communiste. Bref, les séquences oniriques alternent avec le réalisme historique dans un étonnant embrouillamini qui évoque la dureté de la vie, les croyances et le mode de pensée de la diaspora chinoise en Malaisie.

Pluie. Ng Kim Chew. Philippe Picquier, 144 p. (2020)


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