La tempête que nous avons déchaînée. Vanessa Chan
Dans une note adressée à ses lecteurs, l’autrice évoque une anecdote historique incroyable. Pendant la seconde guerre mondiale, un contingent de soldats japonais dotés de bicyclettes a participé à l’invasion de la Malaisie en passant par la Thaïlande. Leur vitesse de déplacement leur a permis de prendre les forces alliées par surprise, en dépit de la lourde charge que représentait le poids de leurs rations d’eau et de nourriture. La même tactique avait été utilisée lors de l’invasion de la Chine en 1937 avec une troupe de 50 000 fantassins à vélos. La suite n’est pas très drôle du tout et on sait bien aujourd’hui quelles ont été les conditions de l’occupation japonaise dont l’embrigadement forcé des populations locales dans les camps de travail et l’exploitation des femmes dans les maisons de réconfort sont les aspects les plus connus.
Le roman de Vanessa Chan se focalise sur le destin d’une famille eurasienne, les Alcantara, sous la domination des Britanniques puis pendant l’occupation japonaise. Les chapitres alternent entre les deux périodes pour mettre en avant les sentiments de culpabilité de chaque membre de la famille. Cecily, la mère, s’est laissée séduire par la promesse d’une « Asie aux Asiatiques », leitmotiv de la propagande nippone pour s’assurer le soutien des autochtones. Dès 1935, la mère de famille espionne son mari, Gordon, qui travaille pour les Anglais. Cette activité lui apporte le frisson salutaire dont sa vie domestique est totalement dépourvue. Son contact, le séduisant général Fuijwara, se présente sous l’identité de Bingley Chan, un commerçant de Hong Kong. Jujube, sa fille aînée, travaille dans un salon de thé où elle se lie d’amitié avec un client japonais. Lorsque son frère Abel disparait soudainement, puis sa sœur cadette, Jasmin, la jeune fille se sent responsable. Gordon, le père, est réquisitionné dans un atelier de fonderie. Il ne parvient plus à nourrir correctement sa famille ni à soutenir les cadences imposées.
A travers ce roman déchirant, Vanessa Chan se fait le porte-parole des victimes de la seconde guerre mondiale. Ses grands-parents dit-elle avaient fait le choix de la vie. Celui-ci impliquait le silence à défaut de l’oubli. Il y a une grande force évocatrice dans son récit, les fortes chaleurs et la moiteur du climat qui alanguissent les corps comme les esprits, puis le déchaînement de la mousson au plus fort de la guerre. La campagne de Malaisie a débuté le 8 décembre 1941, après minuit (heure locale), soit avant l'attaque de Pearl Harbor. Les troupes impériales japonaises ont contraint les forces britanniques à se retirer vers Singapour en janvier 1942 puis à abandonner la péninsule malaise en février. Elle est restée aux mains des Japonais jusqu’en 1945, entraînant la population dans une guerre extrêmement brutale.
Ce roman n’a peut-être pas la puissance narrative de La traversée des sangliers de Zhang Guixing mais il est plus fluide et plus intelligible.
💪J’ai lu ce roman dans le cadre du Challenge Littératures d’Asie du Sud-Est organisé par Sunalee.
📌La tempête que nous avons déchaînée. Vanessa Chan. Haper Collins, 389 pages (2024)
Un aspect de la deuxième guerre mondiale que je connais nettement moins bien. Rien que pour ce contexte historique, la lecture vaut le coup je pense.
RépondreSupprimerLe contexte historique m'étais un peu familier car j'ai déjà lu plusieurs romans et BD sur la région mais j'ai appris encore des choses. L'intrigue romanesque est bien traitée aussi
SupprimerOui vraiment je connais mal ou pas du tout l'histoire de ce coin là...
RépondreSupprimerLa colonisation japonaise a été terrible en Malaisie et dans d'autres régions de l'Asie. Le roman ne nous épargne pas grand chose mais c'est nécessaire.
SupprimerJe ne connaissais pas du tout ce roman qui a l'air passionnant. Cela rejoint ce que raconte Tan Twan Eng dans ses deux premiers romans. Je vois dans tes mots clés que ça se passe à Kuala Lumpur ?
RépondreSupprimerMerci pour cette participation !
Le roman a été traduit récemment en Français. L'intrigue se passe bien dans un quartier de Kuala Lumpur
SupprimerTu as déniché là un titre à la fois original et instructif... je retiens !
RépondreSupprimerC'est une lecture difficile à cause du contexte et des évènements présentés mais ça vaut le coup de se donner un peu de mal
SupprimerQuelle anecdote incroyable ! Je suis curieuse d'en apprendre plus sur l'occupation japonaise et le sort des populations occupées, des sujets peu abordés en Europe où nous nous penchons surtout sur notre propre histoire évidemment.
RépondreSupprimerIl me semble qu'au collège et au lycée, le sujet n'est pas du tout abordé. D'un autre côté, le programme est déjà bien chargé et je suppose qu'il faut bien faire des choix.
SupprimerUne découverte intéressante, pour qui comme moi patauge un peu dans l'histoire de cette partie du monde.
RépondreSupprimerL'autrice a choisi d'aborder ce sujet à travers la fiction car elle a eu toute les peines du monde à faire parler les membres de sa famille. Son récit est sans concession mais il n'est pas manichéen non plus.
Supprimerah je le note ! pareil, je connais mal la Malaisie, même si maintenant je connais beaucoup mieux l'histoire en Asie , il me reste encore ces pays à découvrir, du coup je veux le lire. Merci !
RépondreSupprimerJ'aime aussi la littérature asiatique mais il y a des pays que j'ai peut-être délaissés. D'un autre côté, le lecteur est tributaire des traductions. Il y a eu une vague de publication d'auteurs coréens, maintenant les éditeurs semblent élargir le champ à d'autres pays. C'est tant mieux.
SupprimerBelle trouvaille côté Malaisie ! Je ne connaissais pas du tout cette anecdote de départ et d'ailleurs j'ignorais même que les Japonais avaient occupé la Malaisie ! On ne lit pas assez, il faut croire.^^
RépondreSupprimerPlus je lis plus j'ai l'impression de ne rien savoir !
Supprimercela donne envie de le découvrir en tout cas!
RépondreSupprimerJe le recommande en tout cas. C'est un bon roman. Le contexte historique est riche et l'intrigue est bien menée
SupprimerQuelle belle trouvaille! Je ne connais que très peu l'histoire asiatique et ce titre m'intéresse bcp, d'autant plus que j'ai des amis malaisiens que je vais retrouver à Kuala Lumpur cet été 😊
RépondreSupprimerQuelle chance ! J'espère y aller un jour. Il apparait que la culture culinaire est très développée en Malaisie et qu'on y mange très bien. Il y a quelques plats un peu trop exotiques à mon goût mais si tu aimes les aventures gustatives, il faut essayer.
SupprimerJ'ai beaucoup à apprendre de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale dans cette partie du globe et le sujet ainsi traité est intéressant. En tous les cas tu me donnes envie de découvrir cette écrivaine.
RépondreSupprimerJe crois que c'est son premier roman. C'est une réussite en tout cas. D'ailleurs, le livre a été traduit dans plusieurs langues.
Supprimerc'est un aspect de la deuxième guerre mondiale que je ne connaissais pas, le Japon est un pays qui a plusieurs aspects
RépondreSupprimerLe Japon n'a pas laissé un très bon souvenir dans la région. En Corée et en Chine non plus.
SupprimerJe vois que se posait le problème de la "collaboration" avec les Japonais. Finalement on le retrouve partout. Cette femme qui espionne son propre mari, quelle horreur !
RépondreSupprimeroui, c'est terrible et elle va le payer cher.
SupprimerSi le point de départ est assez drôle (une invasion à vélos) le reste du livre doit l'être beaucoup moins.
RépondreSupprimerCette anecdote est racontée dans une note d'introduction. Le reste de l'histoire effectivement est nettement moins amusant. L'occupation japonaise a été très violente. Il y a des scènes à la limite du supportable.
SupprimerOh j'en apprendrais beaucoup !! C'est dingue cette histoire de vélos !
RépondreSupprimerEn regardant un documentaire, il y a quelques jours, j'ai pu constater que les Européens aussi ont utilisé les vélos pendant la guerre.
SupprimerCe sont toujours les mêmes réactions sous toutes les guerres et toutes les terreurs, les collabos, la majorité silencieuse et endurante, et les victimes de ceux dont le pouvoir ravive les bas instincts. Merci pour cette lecture sur le seconde guerre mondiale côté Est.
RépondreSupprimerC'est malheureusement vrai mais je ne veux pas être trop pessimiste. Je pense que c'est le fait d'une minorité visible. En temps de guerre ou d'occupation, je crois que la majorité des gens font surtout profil bas, espérant passer entre les goutes. Il y a aussi des gens courageux, des résistants, des justes...
SupprimerTu me fais découvrir un épisode historique que je connais vraiment mal...
RépondreSupprimerLes Japonais n'ont pas laissé de très bons souvenirs chez leurs voisins. Les Coréens et les Chinois aussi ont souffert de leurs ambitions expansionnistes. Ils n'ont rien à envier au colonisateurs européens.
SupprimerHé bien... Retenons l'idée des "Vélib' de la Marne" pour la prochaine fois qu'il y aura une invasion à l'horizon....!
RépondreSupprimer(s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola
@ tadloiducine oui, gardons les trottinettes en réserve aussi
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