Tokyo la nuit. Mateusz Urbanowicz

Tokyo la nuit. Mateusz Urbanowicz


 L’artiste polonais Mateusz Urbanowicz est très présent sur les réseaux sociaux. C’est d’ailleurs ainsi que j’ai découvert son travail avant de me procurer son dernier ouvrage paru en Français (Il s’agit en fait d’un ouvrage bilingue Japonais/Français) : Tokyo la nuit. Le sous-titre, L'Art du dessin de Mateusz Urbanowicz II, rappelle que se livre fait suite à celui dédié aux boutiques de Tokyo. Le projet initial est plutôt original puisque l’auteur n’a pas cherché à (représenter des lieux attractifs mais plutôt des endroits insolites (ponts, souterrains, Parkings, angles de rues, impasses, buildings, etc.). Mateusz Urbanowicz a repéré ses endroits lors de ses déambulations nocturnes dans la capitale japonaise. C’est une des raisons pour lesquels, ses illustrations font transparaître une ambiance très particulière, parfois un peu inquiétante. Pour ma part, j’ai un faible pour la série intitulée Tokyo pluvieux (chapitre 4). Le rendu est très impressionnant, notamment le reflet des différents éléments de décors dans les flaques d’eau.

Tous les dessins sont réalisés à l’aquarelle. La technique utilisée est longuement décrite, non seulement au fil des pages pour souligner les difficultés de chaque illustration, mais aussi dans une annexe à la fin de l’album. Le livret qui clôture l’ouvrage est un véritable making of, comprenant une interview de Makoto Shinkai (un membre de l’équipe artistique du studio d’animation CoMix Wave Films), ainsi qu’une série de documents concernant les préparatifs du projet, le matériel, la recherche des lieux à peindre avec des cartes géographiques pour les localiser, etc. En effet, Mateusz Urbanowicz, qui semble décidément très méticuleux, pousse la précision au point d’indiquer l’adresse de ses 30 sujets. De plus, à la suite des illustrations en pleine-page (voire en double-page), il présente des fragments de dessins, sortes de zoom sur les points qui nécessitent un éclaircissement technique. Finalement, Tokyo la nuit tient autant du livre d’art que du guide pratique destiné aux dessinateurs. 


Tokyo la nuit. Mateusz Urbanowicz. P78-79


Il faut savoir que Mateusz Urbanowicz vit au Japon depuis plusieurs années. Il a fait une partie de ses études à Kobe avant d’être embauché par CoMix Wave Films, en tant que dessinateur de décors. Il a notamment travaillé à la réalisation de Your Name, un film d’animation de Makoto Shinkai. Mateusz Urbanowicz est l’auteur de plusieurs projets éditoriaux parmi lesquels un roman graphique intitulé Yuragi (en anglais) et un livre de croquis consacré à l’ile d’Hokkaidō (bilingue Japonais/Anglais). En France, son premier ouvrage, Les boutiques de Tokyo, est paru en 2019. On peut facilement accéder à ses travaux via Internet, soit sur le site officiel de l’artiste, soit sur Instagram et Tumblr ou encore à travers sa chaîne Youtube.

Le thème de l’architecture semble assez récurrent en Asie. Je pense, par exemple, aux ouvrages du Taïwanais Cheng Kai-Hsiang sur les maisons et échoppes de son île natale ainsi qu’à celui de la Coréenne Mekyeong Lee sur les épiceries traditionnelles. Les éditions Elytis publient également un leporello (livre accordéon) du néerlandais Albert Kiefer dédié à l’architecture japonaise. 


Tokyo la nuit. Mateusz Urbanowicz. P116-117


📌Tokyo la nuit. Mateusz Urbanowicz. Elytis, 160 p. (2021)


La félicité du loup. Paolo Cognetti

La félicité du loup. Paolo Cognetti

 

Paolo Cognetti s’est fait connaître grâce à son précédent roman, Les huit montagnes, qui a été récompensé par le Prix Médicis étranger en 2017. Avec La félicité du loup, nous le retrouvons au cœur du val d’Aoste, dans cette montagne qui lui est chère. 

Fausto et Sylvia, les héros qui ne se connaissaient pas encore, s’y sont exilés pour se reconstruire. Ils se rencontrent dans le restaurant d’altitude de la petite station de ski de Fontana Fredda, dans le massif du Mont Rose. Le Festin de Babette (en référence à la fameuse nouvelle de karen Blixen) reçoit essentiellement les skieurs, les dameurs et les perchistes de la station en haute saison ; les maçons et les éleveurs de bétail, le reste du temps. Fausto y officie comme chef cuisinier et Sylvia comme serveuse. Leur histoire sera à l’image de ce cadre particulier : un amour sans fioritures et sans contraintes. 

De loups, il n’est pas souvent question dans ce roman mais ils apparaissent, par intermittence, tantôt solitaires tantôt en hordes. En revanche, Paolo Cognetti brosse un portrait affectueux des montagnards : Babette, la propriétaire du restaurant ; Santorso, l’ancien garde-chasse ; Gemma, la vieille voisine de Fausto ; ou encore Passang, le guide tibétain. Le lecteur imagine volontiers que Fausto, ex-écrivain attaché à la montagne depuis l’enfance, est l’alter-égo de Paolo Cognetti. 

Le romancier italien procède par petites touches qui sont autant d’images, d’odeurs ou de sensations du quotidien. Il décrit l’alternance des saisons, puis le retour dans la vallée et à la vie citadine avec un réalisme saisissant. Autant de tableaux qui rendent hommage aux Trente-six vues du mont Fuji de Katsushika Hokusai (Sylvia offre cet ouvrage à son amant à la fin de la saison hivernale). 

Même s’il est différent par bien des aspects, j’ai souvent pensé au roman de montagne de Jean-Christophe Rufin, Les Flammes de Pierre

Extrait : 

« Fausto avait quarante ans quand il se réfugia à Fontana Fredda, dans l’espoir de trouver un endroit pour recommencer. Il connaissait ces montagnes depuis qu’il était enfant, et le mal-être qu’il ressentait lorsqu’il en était loin avait été l’une des causes, si ce n’est la cause, des problèmes avec celle qui était presque devenue sa femme. Après leur séparation il avait loué un meublé là-haut et passé un septembre, un octobre et un novembre à s’échiner sur les sentiers, à ramasser du bois en forêt et à dîner devant le poêle, savourant le sel de la liberté et remâchant l’amertume de la solitude. Il écrivait, aussi, ou plutôt il essayait : à l’automne il vit les troupeaux quitter les alpages, les aiguilles des mélèzes jaunir puis tomber, jusqu’au jour où, aux premières neiges, même en ayant réduit ses besoins à l’os, il finit par ne plus avoir un sou de côté. L’hiver lui présentait la facture d’une année difficile. Il avait bien des contacts à Milan auxquels il aurait pu demander du travail, mais pour cela il fallait descendre, passer des heures au téléphone, régler les questions en suspens avec son ex, et un soir, peu avant de s’y résoudre, le hasard voulut qu’il se confie devant un verre de vin, dans le seul lieu de rencontre de Fontana Fredda. »

📌La félicité du loup. Paolo Cognetti. Stock, 216 p. (2021)


Blacksad, T06. Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido

Blacksad, T06.  Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido


Tous les médias le répètent à l’envie : la sortie d’un nouveau Blacksad est un évènement dans l’univers du 9ème art. Et c’est vrai, évidemment ! D’abord parce que ce sixième volet s’est longuement fait attendre (8 ans) ; Ensuite (et ce n’est pas la moindre des choses) parce que la série est un chef d’œuvre dont le succès s’est rarement démenti.

Pour mémoire (et pour les néophytes, s’il en est), John Blacksad est un détective privé new-yorkais. Il afficherait quelques ressemblances avec un certain Humphrey Bogart dans Le Faucon maltais de John Huston s’il n’avait le faciès d’un grand chat noir. Ses aventures, vous l’aurez compris (ou vous le saviez déjà) mêlent donc pastiche et zoomorphisme sur fond de films noirs des années 1950. Au fil du temps (et des parutions), quelques différences sont apparues. Les précédentes enquêtes de notre héros félin trouvaient leurs conclusions en un seul volume. Cet album-ci n’est pas un one-shot… mais pas de panique, il parait que la deuxième partie de l’intrigue nous sera livrée dès 2023. Dans le 4ème volet de la série, intitulé L'Enfer, le silence, John Blacksad et Weekly (son ami journaliste rencontré dans le tome 2) partaient se frotter aux jazzmen de la Nouvelle-Orléans. Dans Amarillo, le 5ème volume de la série, le détective s’embarquait dans un véritable road movie à travers l’Amérique de la Beat génération. Dans ce nouvel album, il renoue avec sa ville fétiche sur la cote Est, Weekly à ses cotés (ou pas très loin). Nos deux acolytes ayant la fâcheuse habitude de se trouver au mauvais moment au mauvais endroit, le lecteur est rapidement entrainé dans une nouvelle enquête.


Blacksad, T06.  Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido. P38


Tout commence dans la cadre bucolique de central Park. Blacksad et Weekly assistent à une représentation de Shakespeare en plein air. Celle-ci vire presque à la tragédie au moment où la police débarque pour disperser les spectateurs. La directrice de Shakespeare in the Park, Iris Allen, apprend que la mairie accuse la troupe de vandaliser la pelouse. L’affaire se règle finalement à l’amiable grâce à l’intervention de notre détective privé. En gage de bonne volonté, Iris propose de se présenter au commissariat dès la fin du dernier acte. L’important étant que le contact soit noué entre la belle Alpaga et le félin enquêteur… Suite à cette rencontre décisive (et une bagarre de rue plus loin), Blacksad accepte une nouvelle affaire. Il doit protéger Kenneth Clarke, président du syndicat des travailleurs du métro (et néanmoins ami d’Iris Allen), poursuivi par un tueur, mandaté par la mafia des Belettes. Si cette lutte de pouvoir entre syndicats (les belettes contrôlent celui des dockers et des camionneurs) se déroule dans l’ombre, un inquiétant personnage apparait, lui, en pleine lumière. Il s’agit de Salomon, un maître bâtisseur qui milite en faveur du démantèlement des transports en commun au profit du réseau autoroutier. Ce personnage, un brin mégalo, est un proche du pouvoir municipal. 

Juan Diaz Canales pose tranquillement les jalons de son nouveau scénario, tandis que Juanjo Guarnido fait des clins d’œil graphiques à Edward Hopper. Un régal ! Il y a tous les ingrédients d’un bon polar depuis les syndicats mafieux, en passant par les politiciens véreux et leurs hommes de mains, sans oublier les jolies pépées. Voix off, dialogues de série noire, faciès anthropomorphiques et décors de cinéma s’allient à merveille pour immerger le lecteur dans cette ambiance particulière. Les nuances de couleurs, qui oscillent entre les marrons et les orangés, donnent un aspect vintage à l’album en parfaite adéquation avec son sujet. Vivement la suite ! 

📌Blacksad, T06. Alors, tout tombe. Première partie. Juan Diaz Canales & Juanjo Guarnido. Dargaud, 60 p. (2021)


Les Oiseaux ne se retournent pas. Nadia Nakhlé

Les Oiseaux ne se retournent pas


Ce roman graphique s’ouvre sur une illustration pleine page en noir et blanc. Une fillette se tient au milieu des décombres d’une ville. Elle lui fait ses adieux. Plus loin, les oiseaux sont remplacés par des avions de chasse. Seule tâche de couleur : un cerf-volant, rouge sang. Que symbolise-t-il ? Les victimes de guerre ? Les migrants ? L’espoir ? Peut-être tout cela à la fois. En guise de prologue, il y a une citation du poète palestinien Mahmoud Darwich : « Nous souffrons d’un mal incurable qui s’appelle l’espoir » Sommes-nous en Israël ou en Palestine ? Ou peut-être ailleurs ? Quelque part, au Moyen-Orient, dans un pays en guerre. Qu’importe le lieu, partout en ce monde des enfants doivent quitter leur famille dans l’espoir d’échapper à la barbarie. Le lecteur comprendra plus tard, qu’il s’agit probablement du Liban des années 1980. Nous venons de rencontrer Amel. Elle a 12 ans et elle est orpheline. Ses grands-parents s’apprêtent à la confier à une autre famille pour passer la frontière et quitter le pays. Avant de partir, il faut répéter encore les dernières consignes : 

  • 1. Avancer quoi qu’il arrive 
  • 2. Ne donner sa confiance à personne 
  • 3. Eviter les passeurs et les militaires 
  • 4. Ne jamais montrer ses peurs « La peur attire les mauvaises personnes. » a dit Jeda. 
  • 5. Garder ses croyances pour soi 
  • 6. Toujours dormir avec mes chaussures. « C’est la dernière chose qu’on doit me voler. » 
  • 7. Ne jamais révéler mon identité. « Tu es la fille des Hudhad maintenant : la deuxième. Tu as un frère, une sœur, deux parents. Tu t’appelles Nina. »


Les Oiseaux ne se retournent pas. Nadia Nakhlé.P52-53


Les yeux restent secs, parce qu’on a déjà versé beaucoup de larmes depuis le début de cette guerre, mais la douleur des grands parents se lie sur leurs visages fatigués. Et puis, vient l’heure de partir, le début d’un long chemin, celui de l’exil. Sur la route, Nina/Amel devra faire face à mille pièges et échappera à mille dangers. Au premier check-point, elle est séparée de sa famille d’adoption et doit se rendre seule dans le camp de réfugiés où tous les coups sont permis. Par chance, Nina/ Amel trouve rapidement un compagnon de route en la personne de Bacem. C’est un déserteur. Un musicien devenu soldat par désir de vengeance puis fatigué par l’absurdité de donner la mort à son tour. Il a tout abandonné sauf son oud (luth oriental), cet instrument qui lui permet de redevenir lui-même : un poète. Ensemble, Amel et Bacem, vont chercher une nouvelle vie, loin de chez eux. 

L’ouvrage de Nadia Nakhlé a été récompensé par de nombreux prix (Prix Solidarité Harmonie Mutuelle 2020, Prix Première Rtbf du Roman graphique 2020, Prix des lycées Festival d'Angoulême 2021, etc.). On comprend vite pourquoi. L’album est très émouvant. Les illustrations et le texte sont pleins de pudeur et de poésie. Les dessins en noir et blanc sont ponctués de nombreuses tâches de couleurs comme autant de notes d’espoir. Le graphisme s’inspire des fresques orientales telles qu’on pourrait les voir sur les céramiques d'iznik. Rosaces et fleurs délicates partagent la place avec une multitude d’oiseaux. L’ensemble crée une ambiance très onirique, une bulle qui protège l’héroïne des laideurs de ce monde. Chaque chapitre débute par un vers choisi parmi les poèmes de Khalil Gibran, Nâzım Hikmet, Antoine de Saint-Exupéry, Andrée Chedid, Farid al-Din Attar et Djalâl ad-Dîn Rûmî… des auteurs de tous horizons et de toutes époques, souvent confrontés à la tragédie de l’exil.


Les Oiseaux ne se retournent pas. Nadia Nakhlé. P154-155

 

Le roman graphique de Nadia Nakhlé a donné lieu à un spectacle musical et dessiné, mis en scène par l’auteur elle-même. Sur scène, sont présents le compositeur et interprète Mohamed Abozekry (oud) et Ludovic Yapoudjian (piano), ainsi que les comédiennes et chanteuses, Mayya Sanbar et Negar Hashemi. La tournée française s’est achevée en décembre 2021 mais la sortie d’un film d’animation est prévue pour 2023 (Source : L’Orient le jour). Nadia Nakhlé n’en était pas à son coup d’essai puisqu’elle était à l’origine d’un autre spectacle intitulé Zaza Bizar (2014-2015). Un roman graphique éponyme est paru en 2021.

📌Les Oiseaux ne se retournent pas. Nadia Nakhlé. Delcourt, 224 p. (2020)


La traversée des sangliers. Zhang Guixing

La traversée des sangliers. Zhang Guixing


 Nous sommes en décembre 1941. Quelques jours après le bombardement de Pearl Harbor, les Japonais débarquent sur l’île de Bornéo. Dans le Sarawak, ils se heurtent à la communauté chinoise du Bouk aux Sangliers à Krokop. L’instituteur organise une kermesse pour récolter des fonds et la résistance s’organise autour d’un certain Tzo Da-dy, fameux chasseurs de Suidés en d’autres temps. Avec lui, des figures du village prennent le maquis comme Kwan la Face Rouge ou Plat-Pif. Dans un camp, comme dans l’autre, la répression sera sans pitié. 

Comment choisit-on un livre ? Pour ma part, j’use de plusieurs tactiques, sachant que la meilleure consiste toujours à demander conseil à son libraire. D’accord, mais j’utilise une liseuse. Du coup, je me rabats sur les médias à ma disposition (émissions littéraires, journaux, blogs). Bref, quand je lis des critiques dithyrambiques simultanées dans Le Monde, Libération, Livres Hebdo et même Le Figaro… en toute logique, je cède. C’est ainsi que je me retrouve avec un ovni comme La traversée des sangliers, entre les mains. Evidemment, je n’ai pas fait que le tenir, je l’ai ouvert, je l’ai même lu jusqu’au bout et j’en ai pris plein la figure ! Des larmes, du sang, de la sueur, de l’urine et le reste. Bref, c’est la mousson, les décapitations à gogo ; c’est la jungle en guerre contre les japonais, les guérilleros en manque d’opium, les Dayaks (ces chasseurs de têtes autochtones) qui ramènent leur grain de sel, les hommes en manque de sexe, les femmes et les enfants qui subissent les pires horreurs. Cette folie se reflète dans la chronologie capricieuse qui entraîne le lecteur dans un tourbillons d’évènements déroutants, parfois déformés par les effluves de drogue ou les écrans de fumée de magie noire (on ne sait plus très bien). Les descriptions semblent s’enrouler telles des lianes tant elles sont volubiles, et la multitude de personnages défilant dans ce décors luxuriant et moite finit par égarer un peu le lecteur lambda que je suis. Néanmoins, ça vaut le coup de s’accrocher. 

Oui, il faut aller au bout de cette œuvre pour en apprécier la construction et ses détours. Oui, Zhang Guixing nous livre « un roman puissant, sauvage et magnifique (…) Dans une langue flamboyante » comme promis sur la quatrième de couverture. Oui, contre toute attente, j’ai apprécié le tour de force de l’écrivain. Et oui, je recommande de le lire même si je ne peux pas dire que j’ai aimé son livre. Il contient trop d’horreurs et sans doute trop de vérités sur la nature humaine, qu’on souhaiterait abandonner dans un bourbier au fin fond de la jungle à l’instar d’un des personnages de ce roman. Un autre s’est suicidé, quelques années après la guerre, et on finit par comprendre pourquoi. D’ailleurs, c’est tout le but de cette intrigue sans véritable héro : montrer que les « monstres » ne sont pas tous où on les attend.

Zhang Guixing est né en 1956 dans la province du Sarawak en Malaisie. Il y a passé son enfance et son adolescence. En 1976, comme bon nombre de Sino-Malais, il part étudier à Taïwan. Il y vit toujours et y enseigne l’Anglais. La traversée des sangliers, paru à Taïwan en 2019, a été récompensé par plusieurs prix littéraires, parmi lesquels le Taiwan Literature Award, le Golden Tripod Award ou le Taipei Book Fair Award. Depuis les années 1980, Zhang Guixing a publié plusieurs nouvelles et romans. Son premier roman, Le chant des sirènes, a été publié en 1992. Il s’agit du premier volet de la Trilogie de la forêt vierge. Les deux volumes suivants sont Népenthès et Ma belle endormie des mers du Sud (non publiés en Français à ce jour). Il est également l’auteur de La harde d’éléphants dont on peut lire des extraits en Français dans le numéro 7 de la revue Jentayu. 

📌La traversée des sangliers. Zhang Guixing. Picquier, 600 p. (2022)


Mystère Mishima. Thierry Hoquet

Mystère Mishima. Thierry Hoquet

Mystère Mishima n’est pas une lecture de détente mais un ouvrage d’universitaire. Thierry Hoquet est professeur et membre de l'Institut de Recherches Philosophiques de l’Université de Nanterre. Il est également titulaire d’une licence de japonais. Son essai se découpe en quatre parties : 

  • Partie I : Oublier Mishima, retrouver Mishima
  • Partie II : Mishima homoérotique
  • Partie III : Un panthéon viril
  • Partie IV : Narcisse, philosophe de l’histoire

Dans Mystère Mishima, le philosophe analyse l’œuvre de Yukio Mishima (1925-1970) par le prisme de son homosexualité et de son nationalisme exacerbé. Son point de départ et son fil rouge sont deux photos de l’écrivain japonais, emblématiques de son ambivalence. La première a été prise par André Bonin en 1956 ; la seconde, par Tamotsu Yato en 1967 (publiée dans Young Samurai: Bodybuilders of Japan, John Weatherhill editions)

« D’un côté, le romancier élégant, dans son costume impeccable, dans l’atmosphère feutrée de l’hôtel particulier des éditions Gallimard ; de l’autre le même homme, quasiment nu, un sabre à la main, exhibant son corps sculpté et bronzé, la sueur perlant sur sa peau. »

Thierry Hoquet étudie tour à tour les thématiques récurrentes dans les grandes œuvres de l’écrivain japonais. Confession d'un masque (1949), Les Amours interdites (1951), Le Pavillon d'or (1956), La Mer de la fertilité (1965-1970) … Yukio Mishima est un écrivain prolixe. Il a écrit plus de 40 romans, dix-huit pièces de théâtre kabuki pour la compagnie théâtrale le Bungaku-za, vingt recueils de nouvelles et autant d’essais littéraires, ainsi que des récits populaires pour s’assurer le confort matériel. Il a été pressenti plus d’une fois pour le Nobel mais c’est son mentor, Yasunari Kawabata (1899-1972), qui, en 1968, devient le premier récipiendaire japonais de ce prix littéraire.

L’auteur du Mystère Mishima cite le biographe officiel de l’écrivain japonais, John Nathan (Mishima, Gallimard, réédition 2020), et les travaux de Marguerite Yourcenar (Mishima ou la Vision du vide, Gallimard, 1981). Thierry Hoquet évoque l’esthétisme de Mishima, son amour pour la Grèce antique, sa fascination pour la statue d'Antinoüs de Delphes et le Saint-Sébastien de Reni Guido (1575-1642), ainsi que son goût pour le culturisme, son admiration pour la tradition japonaise et les vertus des Samouraïs. Mishima s’est nourri de lettres classiques et de littérature française. Parmi ses auteurs préférés Raymond Radiguet (1903-1923), l’auteur du Diable au corps, occupait une place de choix.

Les convictions de Yukio Mishima le pousseront jusqu’à l’acte ultime. Le 24 novembre 1970, il se suicide par seppuku à la Tour du ministère de la Défense (actuel Ichigaya Memorial Hall). Cet acte spectaculaire a été minutieusement préparé et obéit au rite ancestral de son pays : Mishima s'ouvre le ventre avant de se faire décapiter par la main d'un ami (son « kaishakunin »). C’est Masakatsu Morita qui devait endosser ce rôle mais, après plusieurs tentatives infructueuses, c'est Hiroyasu Koga qui termine le geste.

Extrait : 

« Trop souvent, un écran s’interpose entre Mishima et nous. Sur cet écran fantasmatique défilent des images qui ont plusieurs origines : images de notre désir de Japon, fantasmes de masculinité, spectres de ce que nous croyons savoir de Mishima, clichés produits par Mishima lui-même pour nous expliquer qui il était et ce qu’il faut savoir du Japon. Tout cela se mélange pour former une image-écran, une fausse connaissance dont nous avons trop vite fait de nous repaître. Il s’agit de repousser le fantasme habilement construit par Mishima lui-même d’un « samouraï » moderne en lutte contre l’effémination du monde. Ce Mishima qui s’est surmasculinisé, pour contrer une effémination toujours menaçante, prend la figure du « mâle hystérique ».

📌Mystère Mishima. Thierry Hoquet. Gallimard, 348p. (2021)


La cabane magique T.4. Mary Pope Osborne

Mary Pope Osborne. La cabane magique Tome 4


📝 Ce quatrième tome de La Cabane magique clôture la première saison de la série après La vallée des dinosaures, Le mystérieux chevalier et Le secret de la pyramide. Chaque saison (groupe de 3 à 4 livres) peut être lue indépendamment et dans le désordre, à l’exception de la première qui pose les premiers jalons des intrigues à venir. La collection compte à ce jour 14 saisons soit 54 titres en français. La version américaine distingue les épisodes de La cabane magique (soit 35 épisodes) et les « missions de Merlin » (27 titres à ce jour), avec les mêmes personnages. Les livres n’ont pas été traduits dans le même ordre. Par exemple, Narwhal on a Sunny Night, le numéro 35 en anglais est devenu « Narval en détresse », le 54ème volume de la version française.

Le trésor des pirates, voilà un titre qui met forcément l’eau à la bouche ! Cet épisode commence sous des trombes d’eau pour Tom et Léa. Fatigués de regarder tomber la pluie par la fenêtre, les deux enfants décident de ne pas rester coincés à la maison. Un ciré et des bottes, et hop, c’est parti ! Direction la cabane dans les arbres. Inspirés par la météo, nos deux héros décident de se rendre sur une plage des Caraïbes. Mais ils n’ont pas bien observé le livre qui les fait voyager dans le temps. Sur l’illustration, il y a un grand voilier avec, au premier plan, un perroquet perché sur une palme. Tom et Léa vont bientôt s’apercevoir que le fier navire est en fait un bateau pirate.  Adieu la baignade et les pâtés de sable au soleil ! Fait prisonniers par le capitaine Bones, les enfants vont devoir mettre la main sur un trésor disparu s’ils veulent recouvrer la liberté. 

Ce volume suit le même schéma que les précédents, à savoir une intrigue en 10 chapitres et sur 80 pages. Les héros sont confrontés à un problème qui risque de les coincer dans l’espace-temps. Heureusement, ils parviennent à s’échapper in-extremis et à rentrer sains et saufs à la maison. La mécanique fonctionne bien puisqu’il y a un peu d’aventure, de frissons et un happy end. La série est parfaitement adaptée aux enfants à partir de 7 ans : le texte respecte leur niveau de lecture et les différents épisodes abordent toujours des sujets qui les fascinent. Comme tout le monde le sait, la piraterie est l’un des thèmes favoris de l’imaginaire enfantin… et continue d’enchanter les grands enfants. 

Il existe de nombreux romans pour la jeunesse sur le thème des pirates. Sans établir une liste exhaustive, on peut citer :

  • Une valeur sûre : Le trésor de Barracuda de Llanos Campos à L’école des loisirs (à partir de 8 ans). Le livre a été récompensée par le prix El Barco de Vapor en 2014 et a été sélectionné dans la liste des White Ravens.
  • Une série pour les aficionados : les aventures écrites par Gilles Abier en 3 volumes chez Poulpe Fictions (à partir de 9 ans) : Le trésor de l’île sans nom, La bataille du Triple-buse et Embrouilles au comptoir de la fesse plate
  • Des titres que l’on peut dédicacer aux filles : Lilia, graine de pirate de Valérie Weishar-Giuliani et Charlotte Cottereau chez Alice éditions (à partir de 7 ans), ainsi que Les Aventures involontaires des sœurs Mouais, T.1 : Hissez haut ! de Kara Lareau chez Little Urban (à partir de 9 ans)
  • Des classiques de la littérature de piraterie : Les clients du Bon Chien Jaune et L'Ancre de Miséricorde de Pierre Mac Orlan en Folio Junior (à partir de 10 ans)
  • Une série pour les lecteurs plus âgés : La très honorable ligue des pirates (ou presque) de Caroline Carlson en deux tomes chez Bayard (à partir de 11 ans)

En ce qui nous concerne, nous avons poursuivi l’aventure en famille grâce au jeu de cartes Piratatak, un jeu d’ambiance pour les « enfants » de 5 à 99 ans chez Djeco. 

📌La cabane magique T.4, Le trésor des pirates. Mary Pope Osborne. Bayard, 80 p. (2020)


Manga, le phénomène (enfin) décrypté. Lire Magazine Littéraire

Manga, le phénomène (enfin) décrypté. Lire Magazine Littéraire


 Le magazine Lire publie un numéro bimensuel hors-série dédié au manga. Cette publication part d’un constat : les ventes de mangas ont explosé entre janvier en août 2021 avec 6 millions d’exemplaires vendus (soit 124% d’augmentation par rapport à l’année précédente). Dès lors, les mangas détrônent la BD franco-Belge sur son propre terrain.  Ainsi la saga de L’attaque des Titans d’Hajime Isayama a grillé la première place des ventes annuelles (en format numérique) à Astérix et le Griffon. Le Pass Culture serait en partie responsable de cet évènement puisque le dispositif aurait permis de vendre 1.5 millions d’exemplaires depuis sa mise en place. Parmi les titres phares, on peut citer le premier tome de Kaiju n°8 de Naoya Matsumoto dont 22 041 exemplaires se sont arrachés dès la première semaine de mise en vente. La série L’attaque des Titans, quant à elle, s’est écoulée à 6 millions d’exemplaires depuis sa parution en France en 2013. Ses ventes ont été multipliées par 12, entre 2020 et 2021, avec son adaptation à l’écran et la diffusion des premières saisons sur Netflix.

Au sommaire de ce numéro, il y a une partie dédiée aux origines de la bande-dessinée japonaise, dont l’histoire remonte au Xème siècle. Le manga est le fruit d’un système productif bien spécifique qui lui a permis d’aller au-delà du format papier pour investir l’ensemble des médias (cinéma, télé, jeux vidéo, etc).  C’est également un genre très codifié qui distingue ses publics cibles à travers les seinen, shonen et autres shojo. Il y a un lexique à la fin du magazine pour s’y retrouver. On y trouve également une bibliothèque idéale de la BD made in Japan. Parmi les séries et titres incontournables, on peut mentionner Monster de Naoki Urasawa, Akira de Katsuhiro Ôtomo, Dragon Ball Z d’Akira Toriyama, Astro Boy d’Otsamu Tezuka, Les chevaliers du zodiaque de Masami Kurumada, ou encore Quartier lointain de Jirô Taniguchi. Du même auteur, il y a évidement Le sommet des dieux, adapté récemment au cinéma par Patrick Imbert. Le film sort en DVD et Blu-ray le 2 février 2022. Une autre adaptation célèbre est le fameux Ghost in the Shell de Masamune Shirow par Mamoru Oshii puis par Rupert Sanders. Enfin, une bibliothèque spécialisée en manga serait bien incomplète sans la monumentale série des One Piece d’Eiichirô Oda. La série compte 100 tomes à ce jour ! Lors de sa parution, le 100ème  volume s’est vendu à 130 000 exemplaires en 3 jours ! 


Manga, le phénomène (enfin) décrypté. Lire Magazine Littéraire. P90-91


Si l’art du manga a longtemps été réservé aux hommes, ces dernières années ont vu s’imposer de remarquables autrices. L’impulsion vient de Riyoko Ikeda (La rose de Versailles), la fondatrice du Groupe de l’an 24 à l’origine du shōjo manga (littéralement « bande dessinée pour fille »). La dessinatrice est rejointe par Naoki Takeuchi (Sailor Moon), Natsuki Tayaka (Fruits Basket) ou Yoshiki Nakamura (Skip Beat !). Certaines, comme Miyako Maki (Femmes du zodiaque) vont contribuer à la naissance d’un nouveau genre : le Josei ou ladies comics. Les histoires « porno-chic » sont destinées à un public féminin adulte. Néanmoins, le manga féminin doit beaucoup à Rumiko Takahashi (Ranma ½). Elle a reçu plusieurs prix dont le prestigieux prix Shôgakukan (en 1980 et en 2001) et Grand prix de la ville d'Angoulême (en 2019).

La France est l’un des pays les plus réceptifs aux mangas, au point que le genre suscite des vocations. Une école spécialisée est née à Angoulême, la Human Academy. Un établissement unique en Europe qui a déjà formé plusieurs centaines de mangakas. Le phénomène est tel que le manga à la française est désormais considéré comme un genre à part entière désigné sous les termes de « manfra » ou « franga». Parmi les pionniers, on peut citer Bastien Vivès, Michaël Sanlaville et Balak, les auteurs de la série Lastman. Pas moins de 12 tomes sont parus entre mars 2013 et novembre 2019, en dépit d’un succès qui s’est fait attendre. 


Manga, le phénomène (enfin) décrypté. Lire Magazine Littéraire. P48-49


En plus de ce panorama très complet de l’univers du manga, le magazine publie des extraits de plusieurs bandes dessinées, des portraits de Yoshihiro Tatsumi et Jirô Tanigushi, ainsi que des entretiens, des points de vue, une « story » de la fameuse série Akira et un article consacré au grand retour (papier) de Goldorak, le personnage culte de l’Anime dans les années 1970. Gō Nagai, le père du robot de l’espace, a en effet donné son autorisation pour la publication d’un 75ème et dernier épisode de la série. L’album a été réalisé par 5 auteurs français : Xavier Dorison (scénario), Denis Bajram (Illustrations), Brice Cossu (Illustrations), Alexis Sentenac (Illustrations) et Yoann Guillo (couleurs). On peut dire que la boucle est bouclée entre le Japon et la France.

📌Manga, le phénomène (enfin) décrypté. Lire Magazine Littéraire. Hors-série février/ Mars 2022


Le Détective du Bizarre, T01. Guillaume Bianco

Le Détective du Bizarre, T01. Guillaume Bianco


Connaissez-vous Billy Brouillard, le personnage récurrent de Guillaume Bianco ? Ce petit garçon, peu ordinaire, porte très bien son nom. En effet, il pense être doté du don de trouble vue. Lorsqu’il retire ses lunettes, notre jeune héros accède à un univers onirique, déformé et peuplé de sombres créatures. Ce monde est inaccessible aux autres mortels que nous sommes. Mais loin d’être traumatisé, Billy adore partir à l’aventure, après l’heure du coucher, dans la solitude de la nuit. Il devient dès lors, le détective du bizarre et, armé de sa loupe de trouble-vue, notre rêveur suit les traces laissées par les êtres maléfiques. Guillaume Bianco, son créateur, a su imaginer tout un univers autour de son personnage, un peu à la manière de J. R. R. Tolkien ou de J. K. Rowling. C’est un monde horrifique qui nous est proposé, certes, mais aussi plein de fantaisie et d’humour. L’album est destiné aux enfants à partir de 8 ans.

La série du Détective du bizarre (2 tomes à ce jour) est en quelque sorte la seconde saison des aventures de Billy Brouillard (3 tomes, auxquelles s’ajoutent des spin-off :  L'Encyclopédie curieuse et bizarre par Billy Brouillard (2 volumes) et Les Comptines malfaisantes (3 volumes). Néanmoins, il n’est pas nécessaire d’avoir lu la trilogie précédente pour s’y retrouver. Guillaume Bianco a imaginé un stratagème qui permet au lecteur de suivre le fil, sans jamais se perdre. En effet, en guise de résumé, l’album s’ouvre sur une page de journal imaginaire, Le journal de la nuit. On y apprend, entre autres choses, que c’est Halloween. De plus, des encarts publicitaires présentent les différentes armes surnaturelles (le chapeau-fantôme ou le lasso-vermicolle) qui apparaitrons plus tard dans l’histoire. Surtout, les petits lecteurs sont conviés à interagir avec leur héros, grâce à une loupe en carton à lentille rouge, fournie avec l’album. Grâce à son filtre magique, les aventuriers en herbe peuvent déceler les créatures invisibles qui se cachent dans les illustrations.   


Le Détective du Bizarre, T01. Guillaume Bianco. P2-3


Ce premier tome des nouvelles aventures de B.B. est intitulé Billy Brouillard et la chasse aux fantômes. On y retrouve notre jeune et valeureux héros, toujours prompte à se réfugier dans le monde magique lorsque le quotidien ne lui plait pas. Selon lui, sa sœur Jeanne est trop nunuche et ses parents se disputent tout le temps, sauf quand ils ne s’ingénient pas à le punir pour des broutilles. Bref, Billy préfère retrouver ses amis de la nuit :  Samoth (petit démon fiable et dévoué), Jack (timide feu follet), Ayram, (vampire pacifiste et affectueuse) et Léa (fantôme coquette et jalouse). Or, ce soir, c’est la récolte des bonbons. Billy ne tient pas à s’embarrasser des filles. Il tente de semer sa petite sœur et, dans la précipitation, se heurte à une drôle de petite sorcière appelée Célène. Cette rencontre inopinée (et un peu violente) marque le début d’une longue et périlleuse enquête qui va conduire notre nouveau duo sur la piste de trois démons. Pour récupérer les ectoplasmes en fuite, Billy et Célène vont devoir affronter mille dangers comme escalader le toit des suicidés, enfourcher un balai magique, inspecter la Maison-qui-n’existait-plus, se faufiler dans un passage secret, affronter plein de créatures dégoutantes, déjouer les pièges du seigneur rouge et renoncer à leurs vœux les plus chers (pour l’instant). Célène et Billy vont-ils se retrouver dans le prochain album ? Il faudra lire Billy Brouillard au pays des monstres pour le savoir. 

Le Détective du Bizarre est assez emblématique de la collection Métamorphose. Cette collection, dirigée par Barbara Canepa et Clotilde, prête un soin particulier à la qualité des albums. Si les aventures de Billy Brouillard sont clairement dédiées à un jeune public, elles empruntent néanmoins largement aux codes du gothique. Le graphisme est plutôt enfantin, avec un trait tout en rondeur, mais la palette des couleurs est assez sombre. Les planches d’illustrations alternent avec des fragments de vieux journaux. Cette technique n’est pas sans rappeler une autre série, dans la même collection. Je pense aux Carnets de Cerise, une bande dessinée que nous avons beaucoup aimé également.


Le Détective du Bizarre, T01. Guillaume Bianco. P22-23


📌Le Détective du Bizarre, T01. Billy Brouillard et la chasse aux fantômes. Guillaume Bianco. Soleil, 56p. (2018)


Horror games T.2. N.M. Zimmermann

Horror games - attention, collège zombie - Tome 2

 Zoé et Sébastien sont jumeaux. Quelques jours après Halloween, ils emménagent dans une nouvelle ville et doivent changer de collège. Cette situation est plutôt stressante pour Zoé qui est plus introvertie que son frère. Lorsqu’elle apprend qu’elle ne sera pas dans la même classe que son lui cette année, l’adolescente commence à déchanter sérieusement. En plus, les autres élèves sont étrangement apathiques. Tous semblent accaparés par un projet du chef d’établissement en relation avec un jeu vidéo soi-disant éducatif. Les parents des jumeaux, quant à eux, sont enchantés des perspectives offertes par ce collège hyper connecté et Seb ignore les mises en garde de sa sœur. Or, les appréhensions de Zoé vont bientôt s’avérer tout à fait justifiées…

Attention, collège zombie ! est l’un des trois titres de la série Horror Games parus chez Playbac cette année. Le premier volet est intitulé Ne te retournes pas ! et le troisième tome Mort de rire ! Ces livres peuvent être lus indépendamment puisqu’il s’agit d’intrigues distinctes avec des personnages différents. Il existe néanmoins un fil rouge entre toutes les histoires, un jeu vidéo appelé Mythomonsters, d’où le titre de la collection (Horror Games). L’anglicisme est accrocheur et les thématiques aussi…. Mais quoi de mieux que des histoires jeux vidéo horrifiques pour ravir les jeunes lecteurs amateurs de frissons ? 

Il faut reconnaître que N.M. Zimmermann tape juste. Doudou a tout de suite accroché à l’intrigue dont les ressorts ont une résonnance certaine chez mon petit geek.  Ici, on est plongé très rapidement dans le cœur du sujet et les deux personnages, dont les caractères sont aux antipodes, permettent à chacun de s’identifier facilement. Attention, collège zombie ! est un roman efficace et dans l’air du temps. Le livre s’adresse aux enfants à partir de 9 ans. Il n’y a donc rien de traumatisant juste quelques ingrédients pour faire frissonner les jeunes lecteurs.

N.M. Zimmermann a écrit de nombreux ouvrages. Chez Playbac, par exemple, elle a publié la série Le galop des étoiles (7 tomes à ce jour). Fascinée depuis ces plus jeunes années par les aventures de Dracula, la romancière a signé livres ouvrages d’horreur pour la jeunesse dont la série Le Grand Livre de l'horreur en 5 tomes chez Albin Michel ou Les Fantômes d'Ebenezer Hicks en 2 tomes chez Mijade. Elle est aussi la scénariste de la bande dessinée Les détectives du surnaturel (2 volumes) parue aux éditions Jungle.

📌Horror games : Attention, collège zombie ! N.M. Zimmermann. Ed. Play Bac, 120 p. (2021)