Articles

Affichage des articles du juin, 2025

Les morsures du silence. Johana Gustawsson

Image
La romancière française, Johana Gustawsson, doit son patronyme scandinave a son époux suédois. Elle vit depuis quelques années sur l’île de Lidingö, face à Stockholm. C’est ce lieu qu’elle a choisi pour son intrigue. Par ailleurs, l’enquête est menée par un duo de policiers franco-suédois, formé par les commissaires Maïa Rehn et Aleksander Storm.  Un crime découvert le lendemain d’Halloween va exhumer une affaire de meurtre remontant à plus de deux décennies. Ce crime avait rapidement conduit à l’inculpation d’un certain Gustav Hellström, l’ex-petit ami de Jenny Delenius, la victime. Il a été condamné à 25 ans de prison et s’est suicidé quelques semaines avant sa libération. Plusieurs éléments relient les deux assassinats. La nouvelle victime s’appelle Daniel Brink. Le jeune homme a été retrouvé au même endroit que Jenny, près de l’école maternelle d’Abboren. Il portait, comme elle, une aube blanche et une couronne de LED, les attributs de Sainte-Lucie. Or Jenny avait été choisi po...

Là où je me terre. Caroline Dawson

Image
💪Pour clôturer le challenge de lecture dédié au Chili , j’ai choisi ce "roman d’autofiction", récit d’une autrice d’origine chilienne qui a émigré au Canada avec sa famille pour échapper à la dictature militaire de Pinochet. L’essentiel de l’intrigue se déroule donc sur cette terre d’accueil.  La narratrice avait 7 ans lorsqu’elle a pris l’avion avec ses parents et ses deux frères, le jour de Noël 1986. Le livre raconte les derniers souvenirs de la fillette à Valparaiso, l’annonce de l’exil, l’arrivée de la famille en plein hiver, le séjour en hôtel de transit pour les réfugiés politiques, l’hébergement temporaire chez des amis, la découverte des quartiers pauvres de Montréal, la classe d’accueil pour les élèves étrangers, l’apprentissage de la langue française, les petits boulots pour ses parents, la question de l’identité culturelle, l’oubli progressif de la langue maternelle, la lutte des classes, la progressive ascension sociale, etc. Le ton et la langue évoluent au fil ...

1984. George Orwell

Image
Paru en 1949, le roman de George Orwell s’inspire des deux grandes expériences dictatoriales du 20ème siècle, à savoir les régimes hitlérien et stalinien personnifiés par Big Brother, icône du parti politique de l’ ANGSOC . L’univers orwellien est divisé en trois super états (Océania, l’Eurasia et l’Estasia), dont les alliances politiques évoluent au gré de nécessités plus idéologiques que guerrières. A travers l’histoire de Winston Smith, membre du "Parti extérieur" et personnage principal du roman, l’auteur décrit un monde complètement déshumanisé, dans lequel les plaisirs les plus simples (amours, fraternité, impulsion créatrice…) sont considérés comme des crimes de haute trahison. A l’exception de la classe des "Prolétaires" (jugée trop ignorante pour être dangereuse), chaque être humain est surveillé en permanence par l’intermédiaire de télécrans, tandis qu’on encourage fortement l’espionnage et la délation. Grâce à ses quatre grands ministères (les ministères ...

Langue paternelle. Alejandro Zambra

Image
💪Alors que je pensais avoir clôturé ma liste de lecture pour le Printemps latino , j’ai découvert que le dernier ouvrage d’ Alejandro Zambra venait de paraître en France. Je ne me voyais pas passer à côté sachant que j’organisais un challenge de lecture autour du Chili. C’est ainsi que je me suis retrouvée avec un recueil mélangeant des textes autobiographiques et fictifs sur le thème de la paternité.  « Dans la tradition littéraire abondent les Lettres au père , mais les Lettres au fils sont plutôt rares. Les raisons en sont plutôt prévisibles – machisme, égoïsme, pudeur, adultocentrisme, négligence, autocensure – mais il me semble qu’il existe aussi des raisons purement littéraires. Pour le moment, il est plus facile d’ignorer ou de reléguer les enfants, ou les comprendre comme des obstacles à l’écriture, de s’en servir comme prétexte : et voici maintenant qu’à cause d’eaux on a pas pu se concentrer sur son laborieux et imposant roman ! »   La Langue paternelle est u...

Je tremble, ô matador. Pedro Lemebel

Image
La dictature militaire d’Augusto Pinochet n’a de cesse de nourrir la littérature chilienne. Le roman de Pedro Lemebel, adapté au cinéma par Rodrigo Sepúlveda en 2022, est un exemple qui sort du lot. L’intrigue de cet opus raconte deux attentats ratés. L’un est politique ; l’autre, amoureux.  Nous sommes en septembre 1986. Le climat est électrique à Santiago. Les guérilleros du Front patriotique Manuel Rodríguez préparent une embuscade contre le dictateur. Les femmes, habillées de noir, défilent devant la Moneda en brandissant des photos de leurs disparus. Le couvre-feu est la pire des menaces pour les chômeurs et les sans -abris. Les homosexuels et les travestis sont personæ non gratæ pratiquement partout. Parmi eux, la Folle du Front, un travesti vieillissant et baroque, vient de tomber amoureux. Carlos, l’objet de son désir, a quelques 20 ans de moins. Il se dit étudiant mais son amie transgenre sait bien qu’il y a autre chose que des livres dans les caisses qu’il stocke dans sa...

Ceux qu'on sauve. Peter Swanson

Image
J’aime beaucoup Peter Swanson . C’est un écrivain facétieux qui explore les différentes facettes du polar et joue avec les codes du genre. Ceux qu'on sauve est bien plus sombre que Huit crimes parfaits ou Neuf Vies . Il tient moins du "Whodunit" (Qui l'a fait ?) que du "Howcatchem" (Comment ?). Il utilise surtout les ressorts du thriller psychologique.   Pendant les deux premiers tiers du roman, l’enquête est menée par un détective professionnel, ex-flic de Boston et ancien professeur de littérature. C’est un poète raté, un personnage un peu "borderline", qui lutte contre ses démons. Henry Kimball, notre héros, voit justement son passé lui revenir en boomerang lorsque Joan Grieve, désormais épouse Whalen, passe la porte de son bureau. C’est une ancienne élève de Dartford-Middleham, le lycée où Kimball a brièvement enseigné. Il a abandonné son poste après une fusillade qui a coûté la vie à  deux adolescents. Joan, bien sûr, n’a pas oublié le drame...

Genre queer. Maia Kobabe

Image
💪Je pense que le sous-titre de cet album, Une autobiographie non-binaire, est relativement explicite. Je suis tombée sur cette BD par hasard à la bibli alors qu’Anne-yes venait d’annoncer l’organisation d’un mois des fiertés sur son blog de lecture. Cela ne pouvait pas mieux tomber ! Pour écrire ce billet, je me suis demandée s’il fallait utiliser tour à tour des pronoms féminins, masculins ou neutres selon l’évolution du personnage principal :   elle, il/lui, iel/lea,… A la fin de l’album, Maia Kobabe a choisi ille/lo et le terme d’auteurice. J’ai décidé de respecter ce choix… Maia Kobabe a décroché un master de bande dessinée à San Francisco. Dans le cadre d’un projet universitaire, ille a commencé un projet d’album autobiographique. La tâche n’a pas été simple ! Comment parler de soi quand on hésite encore sur son identité ? Comment évoquer les sujets intimes qui nous rebutent ? Maia a néanmoins la chance d’être bien entouré(e) par sa famille et ses amis. I...

Tombes de cow-boys. Roberto Bolano

Image
Je découvre Roberto Bolaño à travers ce cours recueil publié à titre posthume.  L’écrivain chilien à la réputation d’être un auteur difficile d’accès et j’avoue que j’appréhendais cette lecture. L’opus compte trois nouvelles assez elliptiques. Les personnages principaux sont toujours de jeunes poètes chiliens. Dans les deux premières textes, Patrie et Tombes de cow-boys , ils sont confrontés à la violence sociale et/ou à la répression politique. La troisième histoire, intitulée Comédie de l’horreur en France ,  est pour le moins surréaliste. Je pense que j’aurais pu l’apprécier si la lecture des deux autres nouvelles ne m’avait découragée.  J’ai eu la sensation de lire une juxtaposition de fragments plus ou moins reliés entre eux par des références qui m’échappaient totalement, soit parce que je ne maitrise pas les codes culturels chiliens, soit parce ces textes empruntent beaucoup aux précédents ouvrages du romancier (personnages, lieux, scènes alternatives, etc). Par e...