Par une nuit claire. Kim Yi-sak
Ce polar historique coréen nous conduit à Hanseong (Séoul) sous le règne de Sejong (1418-1450), 4ème roi de la dynastie Joseon. Par une nuit claire de couvre-feu, A-ran, la fille naturelle du Préfet, déjoue la surveillance des gardes en faction pour s’échapper de la ville-forteresse. Notre héroïne est sage-femme et légiste en dépit son statut privilégié. Elle a entendu parler d’une veuve qui aurait été enterrée sans qu’on ait procéder à l’autopsie de rigueur en cas de mort violente. Elle soupçonne qu’il s’agit d’un meurtre déguisé en suicide et décide d’examiner le corps en catimini. Au cours de cette escapade nocturne, A-ran rencontre Kim Yoon-o, jeune lettré de classe moyenne, qui vient d’être nommé inspecteur du Conseil des Censeurs, un poste normalement attribué à un membre de la caste supérieure des Yangban. Les jeunes gens se croiseront de nouveau lors d’une autre enquête impliquant six morts découverts dans une grotte après un incendie. L’examen des cadavres, leur apprend que l’un des défunts est le fils unique du ministre de la justice. Entre-temps, un troisième personnage vient assister notre duo après avoir été nommé secrétaire général de la Préfecture. Il s’agit de Han Seok, fils d’une famille très influente liée à la dynastie chinoise des Ming. Il a été rétrogradé pour avoir trafiqué des chiffres sur des documents officiels. Il passe d’ailleurs son temps à déshonorer sa famille en fréquentant des quartiers louches et s’acoquinant avec des voyous de l’Ecole militaire.
Kim Yi-sak entraîne son lecteur dans une intrigue palpitante et foisonnante sur fond de corruption et de lutte de pouvoir. Presque tous les protagonistes ont quelque chose à cacher. Kim Yoon-o, par exemple, est en réalité le prince Seong-nyeong Yi-jong, frère caché du roi Sejong. A-ran n’est pas vraiment la fille illégitime du préfet Jeong Soo-heon. Elle accepté sa protection dans le but de venger la mort brutale de ses vrais parents quelques années plus tôt. Une multitude de personnages secondaires gravitent autour de ce noyau principal dont Gong, une Madang noire (femme chamane) amie d’enfance de A-ran. Il n’est pas toujours facile de se retrouver parmi tout ce petit monde mais il y a une liste salvatrice des personnages à la fin du livre. Pour information, les noms coréens sont composés d’un nom de famille (une syllabe) et d’un post-nom ou nom personnel (deux syllabes).
Personnellement, j’ai beaucoup apprécié cette immersion dans le 15ème siècle coréen. Dans une note sur le contexte historique, la romancière nous rappelle que la dynastie Joseon a supplanté les Wang qui gouvernaient le royaume de Goryeo (918-1392). L’époque Joseon est marquée par le confucianisme, et le renforcement de la centralisation administrative et de l’armée. Cet aspect est très bien décrit dans le roman, de même que les différentes classes sociales : Yangban Chungin ou "gens du milieu", les Sangmin ou "gens du commun" et les Nobi, dont le statut est proche des esclaves. Kim Yi-sak a également effectué de minutieuses recherches sur le travail de légiste et la manière de pratiquer la médecine au 15ème siècle. Elle mentionne les ouvrages de référence de l’époque et décrit en détail les techniques utilisées pour parler les morts et apparaître des indices sur une scène de crime.
📝Kim Yi-sak signe un polar historique d’excellente facture qui devrait satisfaire les amateurs du genre. Selon ma courte expérience (cf Été, quelque part, des cadavres de Park Yeon-seon), les éditions du Matin Calme tiennent toujours leur pari, à savoir « offrir les joyaux du Polar Coréen ». Il est dommage que leur site Internet ne soit plus actualisé (pour l’instant ?) mais on peut suivre l’éditeur sur Facebook et Twitter (en attendant mieux ?).
💪Lecture dans le cadre des Challenge Littérature coréenne et Petit bac 2023
📌Par une nuit claire. Kim Yi-sak. Matin Calme, 370 pages sur ebook (2022)
Merci beaucoup pour cette belle chronique. Un polar que j'avais repéré et que j'ai très envie de lire😊
RépondreSupprimerC'est une lecture distrayante mais ce n'est pas facile de s'y retrouver parmi les personnages
SupprimerRepéré chez Maggie déjà. J'espère pouvoir le trouver en bibli rapidement. Polar historique + Corée, il a tout pour me plaire.
RépondreSupprimerIl y a beaucoup de détails concernant la société, la hiérarchie militaire et celle des fonctionnaires. J'ai bien aimé aussi l'aspect concernant la façon de pratiquer les autopsies médicales au 15ème siècle.
SupprimerJe ne suis pas trop fan de polars historiques, c'est un genre avec lequel ça passe ou... ça casse !
RépondreSupprimerJe suis plutôt d'accord avec toi. Très souvent, la toile historique n'est qu'un décor sans consistance ou, à l'inverse, l'intrigue policière, est juste un prétexte. Parmi les très bons romans historiques, selon moi, il y a "La religion" de Tim Willocks (rien à voir avec la Corée, par contre).
SupprimerOui, Matin calme est une maison d'édition qui propose plein de bons polars ( comme l'île des chamanes ou seoul copy cat...)
RépondreSupprimerexcuse-moi, j'apparais en anonyme... je viens de rajouter nom. Pour ce polar historique, je l'avais vraiment trouvé bien même si l'intrigue prime sur l''historique...
RépondreSupprimerJ'ai l'impression, en effet, qu'il y a pas mal de pépites au catalogue des éditions Matin Calme. Je pense que je ne vais pas en rester là ! J'ai déjà repéré plusieurs titres...
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