Bangkok Déluge. Pitchaya Sudbanthad

Bangkok Déluge. Pitchaya Sudbanthad


 Les éditeurs de Pitchaya Sudbanthad ne sont pas très diserts sur sa biographie. L’Américain Penguin, étant plus bavard que le Français Rivages, j’ai finalement obtenu quelques informations via Internet. Pitchaya Sudbanthad a grandi entre la Thaïlande et l’Arabie Saoudite, il vit actuellement entre son pays natal et les Etats-Unis et a collaboré à plusieurs médias américains dont The Morning News. Il est également l’auteur de plusieurs essais et nouvelles mais Bangkok Déluge (Bangkok Wakes to Rain en version originale) est son premier roman. Pour moi, Bangkok Déluge est out aussi énigmatique que son auteur mais bien plus foisonnant que sa biographie officielle. 

Si j’osais une métaphore, je dirais que le roman m’a paru aussi insaisissable que de l’eau vive, riche de méandres et de ramifications se croisant ou se séparant pour finalement se rejoindre et ne former qu’un unique élément. Evidemment c’est une bonne excuse pour expliquer ma difficulté à résumer ce livre. Un livre ovni donc qui tend vers l’anticipation, voire la science-fiction. En dépit des nombreux personnages qui s’y croisent, le personnage principal reste la ville elle-même. Bangkok, ou Krungthep en Thaï (la ville des Anges), capitale de la Thaïlande (et du Siam avant elle) n’est donc pas qu’une toile de fond historique ou un décor surréaliste, c’est une cité grouillante de vie, parfois inquiétante mais que ses habitants, pour diverses raisons, ont du mal à quitter ou à abandonner. 

Parmi les protagonistes, il y a un médecin-missionnaire protestant, un musicien de jazz afro-américain, un photographe free-lance expatrié, une restauratrice installée au Japon, une ancienne étudiante-infirmière devenue gérante d’immeuble, un adolescent auto-confiné, une vieille femme issue de l’aristocratie ayant décidé de revendre la demeure ancestrale de son ex-mari, etc. Au fil des chapitres, nous partageons des tranches de vie qui se recoupent parfois pour mieux s’éloigner ensuite. A travers ces fragments de destins, nous traversons plusieurs décennies de l’histoire de la cité : une épidémie de choléra au 19ème siècle, la présence des troupes américaines pendant la guerre du Vietnam, la révolte estudiantine de 1973, les crises politiques, l’inondation record de 2011… jusqu’à la submersion totale de la ville dans un avenir imaginaire et sa reconstruction sur le site de « New-Krungthep ».

Un roman déroutant, presque un livre puzzle dont a parfois l’impression qu’il s’agit d’un recueil de nouvelles. La dernière partie arrive sans prévenir et nécessite d’ajuster sa lecture à un univers d’anticipation. Il faut relever aussi le style d’écriture. J’ignore si nous le devons entièrement à Pitchaya Sudbanthad, aussi je tire mon chapeau à son traducteur Bernard Turle qui nous transmet un texte dans une langue claire mais sublimée.

Bangkok Déluge. Pitchaya Sudbanthad. Rivages, 420 p. (2021)


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