Trust. Hernan Diaz

Trust. Hernan Diaz


Le titre de ce roman évoque immédiatement l’univers de la finance. Et c’est bien à Wall Street qu’Hernán Diaz nous conduit, pendant la période d’effervescence des années 20, puis pendant la Grande Dépression, après le Krach de 1929. En Anglais, le mot "Trust" ne désigne pas qu’un arrangement économique, il signifie aussi confiance. Ce n’est pas un hasard. 

La première partie déploie une intrigue qui, de prime abord, peut sembler un peu ronronnante mais il s’agit d’un subterfuge de l’auteur. L’intérêt de cet ouvrage tient en effet à sa structure kaléidoscopique. Dans un premier temps, le lecteur découvre la biographie d’un magnat de la finance, un certain Benjamin Rask dont les aïeux ont fait fortune dans l’exploitation du tabac au 19ème siècle. L’homme n’est guère sociable mais semble doué d’un flair incroyable en matière d’investissements et de placements. Il fait fructifier son héritage au point de devenir une figure incontournable de Wall Street. Afin d’assoir sa position au sein de l’élite new-yorkaise, il épouse Helen Brevoort, une jeune femme issue de la haute société d’Albany. Ses parents sont des aristocrates désargentés et un peu excentriques. Ils ont vécu de nombreuses années en Europe où ils se sont fait entretenir par les membres expatriés de la bonne société américaine. La nouvelle Madame Rask semble d’abord apprécier de vivre quasiment recluse dans sa propriété de l’Upper East Side. Puis Helen commence à s’intéresser aux arts et notamment à la musique. Au fil du temps, son activité philanthropique se développe au point de nécessiter l’intervention "compétente" et "bienveillante" de son époux.  Tout serait parfait dans ce monde de privilégiés si l’épouse de Benjamin Rask ne présentait les symptômes d’une maladie mentale. C’est à contre cœur que son mari la fait finalement interner dans un sanatorium suisse dont elle ne reviendra jamais. Fin du premier acte. Il est intitulé Obligations.


Trust. Hernan Diaz


La suite de ce roman est une suite de mises en abîme. Le lecteur découvre un autre couple, Andrew et Milred Bevel, dont le parcours apparait étrangement similaire à celui des Rask mais sans correspondre exactement. Cette seconde partie, intitulée Ma vie, est présentée comme un récit autobiographique. A ce stade, il est difficile d’en dire davantage sans divulgâcher une partie de l’intrigue. Sachez que Trust est un roman puzzle dont les pièces s’imbriquent, à l’instar des différentes parties de ce livre, pour dévoiler une réalité distordue qui sied mieux au microcosme de la finance. On y croise également une journaliste dont le père, d’origine italienne, est un militant anarchiste. C’est l’affrontement de deux mondes mais dans la sphère privée. D’autres sujet plus inattendus sont abordés dont certains avec une touche de féminisme réparateur.  Plusieurs grands noms de la littérature s’imposent au fil des pages dont ceux de Ayn Rand, Edith Wharton, Francis Scott Fitzgerald, Jorge Luis Borges…

Hernán Diaz a reçu le prix Pulitzer pour ce roman (ex aequo avec  Demon Copperhead de Barbara Kingsolver) en 2023 et a été en lice pour le Booker Prize en 2022. 

D'autres avis que le mien : AthalieSunalee, Keisha, Fanja

Trust. Hernán Diaz. Editions de l’Olivier, 400 pages (2023)



Commentaires

  1. Pour l'instant, je ne sais pas trop, l roman va arriver en bibli, je verrai.
    Mais mon oeil a été déjà attiré par le Kingsolver et le pulitzer.

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    1. J'aime beaucoup Barbara Kingsolver. J'ai lu plusieurs de ses livres. Je ne crois pas que celui-ci soit déjà traduit en Français

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  2. Je n'ai pas encore publié mon billet, j'en ai encore deux autres dans la file d'attente avant celui-ci. J'imagine que ce sera pour la semaine prochaine.
    En lisant ton billet, je n'arrive pas à savoir si tu as aimé ou pas ?

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    1. Effectivement, maintenant que tu en fais la remarque (et tu n'es pas la seule), je me rends compte que je ne dis pas vraiment ce que je pense de ce roman. La construction de l'intrigue est vraiment bluffante. L'intérêt monte crescendo jusqu'à la dernière partie qui, en dépit de quelques indices, n'est pas sans surprise. Par contre, je me suis perdue dans les mécanismes financiers. Mais, oui, j'ai beaucoup aimé ce roman. Je sais que toi, tu es plus mitigée.
      NB: Je corrigerai le lien quand ta chronique sera parue (c'est une assurance pour ne pas oublier de le faire).

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    2. ah je me posais la même question ! j'avais adoré son premier roman et mon beau-père aussi du coup je pense lui offrir celui-ci à Noël (et moi le lire anglais)

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    3. Je ne savais pas trop comment présenter ce roman sans divulgâcher l'intrigue. Du coup, il est assez impersonnelle en effet. Bref, c'est un excellent roman. Tu peux foncer, et l'offrir à ton beau-père. Je crois savoir que tu as un excellent niveau d'Anglais donc tu ne devrais pas trop de perdre dans les jeux de l'intrigue.

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  3. Je préfère ne pas lire ton billet parce que je vais lire Trust sous peu et je ne veux pas être influencée, mais je reviendrai te lire dès que je l'aurai terminé :-)

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    1. Ah très bien, j'ai hâte de lire ton avis. J'ajouterai un lien quand ton billet sera paru

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    2. Idem avec plaisir, mais avec mes billets déjà en attente de publication, faut patienter un peu ;-)

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  4. Bonjour Doudoumatous, j'ai bien noté ce roman mais ton billet ne me dit pas si tu as aimé ou pas ce roman. Bonne journée.

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    1. Sunalee m'a dis la même chose et je vois bien maintenant que je n'ai pas exprimé beaucoup d'enthousiasme ! Pourtant, j'ai vraiment apprécié ce roman (à part peut-être les passages sur la bourse auxquels je n'ai pas compris grand chose). La construction est originale et surprenante. On apprend aussi beaucoup sur le milieu de la finance et en particuliers ses acteurs.

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  5. J'ai lu ton billet en diagonale, car hors de question de faire l'impasse sur celui-là... j'ai tellement aimé Au loin, de cet auteur (dont le sujet était en revanche très différent..).

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    1. Je n'ai pas lu le premier roman d'Hernan Diaz mais j'ai cru comprendre qu'il est assez différent de celui-ci en effet. Il me semble avoir lu quelque part qu'il aurait aussi frôlé le Pulitzer.

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  6. Je l'ai réservé à ma BM. Le livre est en traitement pour le moment, j'ai hâte de le découvrir.

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    1. J'ai eu de la chance car ma bibli propose les nouveautés en numérique et j'ai une liseuse. Je serais curieuse de savoir ce que tu penses du roman. Préviens moi quand tu posteras ton billet que je l'ajoute en lien.

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  7. Je ne suis pas très tentée ni par le sujet, ni par la construction. On va voir si je change d'avis au fil des billets ..

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    1. Sunalee, La petite liste et Alex Mot à mots vont le lire. Leurs billets seront peut-être te convaincre. J'ai eu un peu de mal à rédiger le mien car j'avais peur de trop en dire

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  8. Je sais que je serai perdue aussi dans les mécanismes de la finance . J'ai trop de lectures prioritaires , je passe mon tour

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    1. Il ne s'agit que de quelques passages mais je comprends que cela te rebute.

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  9. J'avoue que le titre, cecqu'il annonce comme univers, a été repoussoir pour moi, qui ne lit déjà pas beaucoup de littérature américaine. Mais ce que je lis sur la construction me tente sérieusement !

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    1. Comme le dit Athalie dans sa chronique, ce roman est intelligemment construit. D'autres blogueurs ont prévu de le lire bientôt. Cela te donnera une idée plus précise.

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  10. Quand tu as annoncé que ce livre se passait dans le milieu de la finance, je me suis dit ouh la la ce n’est pas pour moi, mais finalement tu as suscité mon intérêt, en plus je n ai encore rien lu de cet auteur donc je me le note, sans doute pour Noël parce que j’ai encore beaucoup à lire d’ici là.
    Merci pour cette découverte !

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    1. Il est surtout question de la haute société new-yorkaise et de l'image qu'elle veut donner d'elle-même. On peut aussi qualifier "Trust" de roman féministe... je n'en dirai pas plus.

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  11. Et oui, pas facile de faire une chronique sur ce roman, tant tout tient dans la construction et la succession des mises en abime .... Alors que l'histoire du couple et de la finance se dissout petit à petit dans une quasi démonstration du pouvoir qui peut mettre la main sur la réalité. Pour moi, c'est un roman sur la manipulation, plus que sur les mécanismes de la bourse.

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    1. Absolument, il y a une réflexion captivante sur la manière dont les hommes de pouvoir se mettent en scène.

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  12. Il me tente, mais comme toujours avec les livres primés et la rentrée littéraire en général, je vais attendre que l'attention ne soit plus focalisée sur ce roman pour mieux le savourer plus tard.

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    1. Je ne me souviens pas avoir été déçue par un prix Pulitzer ce qui n'est pas forcément le cas d'autres récompenses littéraires. Sinon, comme tu me dis, il n'y a pas d'urgence et, avec un peu de chance, le livre sera rapidement disponible en format poche.

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