Body Snatchers : L'Invasion des profanateurs. Jack Finney

Body Snatchers : L'Invasion des profanateurs. Jack Finney

En octobre 1976, la paisible ville de Mill Valley en Californie voit son destin basculer dans la paranoïa. Tout commence lorsque Becky Driscoll, amie du jeune docteur Miles Boise Bennell, lui confie une étrange affaire. Sa cousine Wilma Lentz prétend que l’oncle Ira n'est pas vraiment l’oncle Ira. Il ressemble au bonhomme, agit exactement comme lui mais son regard trahit une absence totale d’émotions. Miles, qui n’a rien remarqué de suspect chez l’oncle Ira, suggère à Wilma de consulter le docteur "Mannie" Kaufman, psychiatre au Marin General Hospital. Au fil des jours, d’autres patients viennent se plaindre des mêmes symptômes avant de faire marche arrière et de se récuser. S’agit-il d’une hallucination collective doublée d’un syndrome de Capgras (un délire d'illusion des sosies) ? En tant que scientifique rationnel, Miles penchent pour cette option… jusqu’au jour où Jack et Théodora Belicec lui demandent de se rendre d’urgence à leur domicile. Une découverte glaçante dans leur garage pourrait bien imposer la thèse d’une invasion extra-terrestre…

Body Snatchers est un classique la littérature de science-fiction horrifique, souvent comparé aux Marionnettes humaines de Robert A. Heinlein. Publié pour la première fois en 1955, il a été traduit à plusieurs reprises, expurgé et révisé à la fin des années 70 par l’auteur lui-même. Il a procédé, par exemple, à un glissement de l’action de l’été 1953 à l’automne 1976. Par ailleurs, une partie des remarques sexistes et les références au tabagisme ont été supprimés.  En France, le livre est paru pour la première fois 1977 sous le titre de Graines d'épouvante dans la collection Azimut des éditions Guénaud. Il a été réédité plus tard chez Denoël sous le titre de L'Invasion des profanateurs. Cette traduction, qui n’est pas sans évoquer les résurrectionnistes de l’ère victorienne, a été largement critiquée. Il semblerait que le titre original s’inspire en fait d’un roman de Robert Louis Stevenson The Body Snatcher (Le Voleur de cadavres), paru en 1884. 


L'Invasion des profanateurs de sépultures. Don Siegel


Le roman de Jack Finney a fait l’objet de plusieurs adaptations cinématographiques (parfois très libres et plus ou moins réussies). Pour les cinéphiles, on peut mentionner les films de Don Siegel (L'Invasion des profanateurs de sépultures, 1956), Philip Kaufman (L'Invasion des profanateurs, 1978), Abel Ferrara (Body Snatchers, l'invasion continue, 1993), Oliver Hirschbiegel (Invasion, 2007) et Justin Jones (Invasion of the Pod People, 2007). Il faut reconnaître que l’intrigue se prête assez bien aux exigences du 7ème art.

Body Snatchers a les qualités de ses défauts et vice versa. D’aucuns lui ont reproché ses stéréotypes, notamment féminins. C’est vrai ! Mais l’auteur se joue aussi de ce type de caricatures. Les femmes ne sont pas si fragiles et passives qu’on veut bien le croire dans les années 50 (ainsi que le prouve Becky dans une scène de violence) et les extra-terrestres ne sont pas forcément anthropomorphes (ainsi que le signale l’un des personnages du roman). Body Snatchers est certes bien ancré dans son époque (l’usage des opératrices téléphoniques, par exemple, y est récurrent) mais cette caractéristique lui insuffle un charme suranné que de nombreux lecteurs apprécient. Les thématiques abordées (la déshumanisation, la normalisation, etc) restent des sujets d’actualité. Pour le reste, Jack Finney use des nombreux ressorts de l’inconscient collectif, ces peurs irraisonnées que nous aimons tant mettre à l’épreuve. De fait, la mayonnaise prend très bien.  

L’ouvrage est agrémenté d’une postface érudite de Sam Azulys, philosophe et professeur de cinéma à New York University à Paris. C’est une explication de texte très utile et passionnante pour les néophytes comme moi. Pour ma part, j’utilise une liseuse et j’apprécie particulièrement la démarche des éditions du Belial’ qui proposent des fichiers dépourvus de dispositifs de gestion des droits numériques (DRM) visant la limitation de l’utilisation et de la copie des fichiers. En clair, il est possible de prêter cet ebook à ses proches, à l’instar d’un livre papier. 

Body Snatchers : L'Invasion des profanateurs. Jack Finney. Le Belial’, 272 p. (2022)



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