Chaleur humaine. Serge Joncour
Alors que les animaux retournent
aux pâturages après la période d’hivernage, les Français s’apprêtent à vivre confinés
pour endiguer l’épidémie de covid-19. Dans le lot, Alexandre, 57 ans, doit
gérer la ferme familiale à la place de ses parents octogénaires. Ses trois sœurs,
qui ont aussi reçu leurs parts, vivent en ville depuis longtemps. Les relations
au sein de la fratrie sont loin d’être idylliques. Alexandre leur reproche d’avoir
accepté l’implantation d’éoliennes sur leurs terrains. Tout ce petit monde va
néanmoins se retrouver aux Bertranges à la faveur du confinement imposé en mars
2020 : Caroline, la professeur divorcée; Vanessa, l’auto entrepreneuse
parisienne et Agathe avec son mari et ses deux adolescents. Dès le départ, l’ambiance
au sein du huis clos est explosive.
En commençant ce livre, j’ignorais
qu’il faisait suite au précédent roman de Serge Joncour, Nature humaine, pour
lequel il a reçu le Prix Femina 2020. Cela n’est pas très important puisqu’il n’est
pas nécessaire d’avoir lu l’un pour comprendre l’autre.
Chaleur humaine débute le 25
janvier 2020 et s’achève le 29 mars de la même année. Alors que la vie des
protagonistes est suspendue à l’évolution de la pandémie et aux informations du
JT, le fil narratif se présente un peu sous la forme d’un journal intime
collectif avec des entrées par dates. Dans cette ambiance de fin du monde, la
nature et les animaux (que l’on traite pourtant si mal) sont de véritables baumes
pour l’âme humaine.
A travers ce roman, Serge Joncour
montre comment la vie peut être remodelée par le contexte (sanitaire,
climatique ou économique). La crise a incité, pour un temps au moins, à une réflexion
sur notre mode de vie, l’organisation du travail, les relations sociales, l’écologie,
la condition animale, etc. Ce sont ces questionnements qui intéressent l’auteur. Chaleur humaine est un roman sur les maux de notre temps.
Extrait:
« Le vrai premier jour de l’année aux Bertranges, c’était ce matin de la mise à l’herbe, le jour qui disait que la vie recommençait. Alexandre dut presser le pas pour ne pas se faire doubler par les bêtes. Dans le regard des chiens aussi on sentait une gaieté, celle de manier de nouveau ce troupeau. En longeant le dévers, Alexandre jeta un regard à ses trois sœurs qui culminaient de l’autre côté du vallon. Sur la colline d’en face, Caroline, Agathe et Vanessa tournaient lentement. Leurs pales brassaient un air neuf, une bise mollassonne leur soutirait deux ou trois mégawatts tout au plus, alors que la tempête Gloria, deux jours auparavant, avait soufflé tellement fort que leurs longs bras s’étaient figés, cloués par les rafales comme par la peur. Cela faisait dix ans qu’Alexandre avait donné à ces éoliennes les prénoms de ses sœurs. Trois frangines de plus de cent tonnes chacune, qu’il saluait parfois avec moins d’ironie que d’amertume, mais que celles-là au moins il continuait à voir. »
📌Chaleur humaine. Serge Joncour. Albin Michel, 352 pages
(2023)
Commentaires
Et quand la maladie a été maîtrisée, tout est redevenu comme avant, sinon pire encore.
Au fait toujours ok pour la LC Rescapé du camp 14 demain ?
NB: Oui, c'est ok pour la LC.