Brno, ville natale de Milan Kundera et de Bohumil Hrabal

Musée de Moravie, Zelný trh 6, 659 37 Brno-střed, Tchéquie @jelisjeblogue

Parmi les cités étrangères que j’ai eu l’occasion de visiter, Brno, deuxième plus grande ville de République tchèque, est l’une de mes préférées. C’est le berceau de nombreux artistes et gens de lettres dont Bohumil Hrabal et Milan Kundera qui y sont nés respectivement en 1914 et 1929. Conformément aux souhaits de l’écrivain franco-tchèque, l’éditeur Antoine Gallimard y a rapatrié ses cendres en janvier 2025. Le poète Jan Skácel (1922-1989), l’écrivain Klement Bochořák (1910-1981), le dramaturge Lev Blatný (1894–1930 et le romancier Jiří Mahen (1882-1939) reposent aussi au cimetière central de Brno. Ce dernier a occupé le poste de directeur de la bibliothèque municipale dans les années 20. Dans le fameux parc Lužánky, on peut voir un buste de Josef Merhaut (1863-1907) et une rue du quartier Černá Pole porte son nom. Le journaliste a joué un grand rôle dans la vie culturelle de Brno et dans le développement de son théâtre.

On peut se rendre à Brno (en avion, train ou bus) en passant par Prague, Vienne ou Bratislava, toutes ces villes étant situées à moins de 200 km de là. Cité universitaire, mais fleuron des sciences et de la haute technologie, la capitale de la Moravie-du-Sud peut s’enorgueillir d’un riche patrimoine architectural et culturel. L’ambiance y est plus douce qu’à Prague et ses habitants prétendent (à tort selon moi) que le mode de vie y est moins trépidant. On s’y déplace très facilement en tramway dont la première ligne date du début du 20ème siècle.

En été, la municipalité sponsorise des concerts en plein air et la vie nocturne est animée. La grande place de la Liberté, le Parc Lužánky et le jardin Denisovy sady (du nom de l’historien français Ernst Denis) sont équipés de chaises longues. On y trouve des bars éphémères et des cafés ambulants. Le 1er juillet débute à Brno l’un des plus grands festivals littéraires d’Europe centrale. Le MAČ (Mois de la lecture des auteurs) se déplace ensuite d’une ville hôte à l’autre pendant trente et un jours. En 2024, l’invité d’honneur était Taïwan. Cette année, les organisateurs ont préféré une thématique autour de L’exil. Le festival nomade s’est rendu à Ostrava, Trenčín/Prešov, Lviv et Bratislava. La période des fêtes de fin d’année est aussi agréable. La ville accueille plusieurs marchés de Noël dont celui de la place náměstí Svobody. On y trouve des spécialités culinaires typiques de la région et des produits folkloriques. La municipalité organise aussi de nombreuses activités et spectacles pour la Saint-Nicolas.

Panneau d'accueil de la Forteresse du Spielberg

La forteresse du Spielberk et la cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul dominent la cité mais l’un des plus beaux joyaux de Brno est peut-être son quartet de villas (Tugendhat, Jurkovič, Stiassni et Löw-Beer), emblématiques du fonctionnalisme et du style Art Nouveau. La villa Tugendhat est inscrite sur la liste du patrimoine mondiale de l’Unesco. Le célèbre café Era, conçu par l’architecte Josef Kranz, mérite également qu’on s’y arrête le temps d’une collation, avant de se rendre dans l’un des théâtres de la ville ou à un concert de l’Orchestre philharmonique de Brno.

Façade d'un restaurant près de Svobody namesti (place de la liberté)

Si vous avez la possibilité de séjourner dans la capitale morave, je vous recommande d’aller voir le Stará radnice (l’hôtel de ville historique) et son portail gothique. Un étonnant crocodile surplombe l’entrée faisant référence l’un des symboles légendaires de la ville. A quelques pas de ce bâtiment, ne ratez pas le fameux marché aux légumes de Zelný trh. Il existe depuis le 13ème siècle.

Plus loin, du côté de l’Église Saint-Thomas, sur la Moravské náměstí, il y a l’impressionnante statue équestre de Jobst de Moravie. Cette œuvre en bronze de Jaroslav Róna est une allégorie du courage. Elle mesure quand même 8 mètres de haut. Enfin, les anciens réservoirs d’eau souterrains de Žlutý kopec (littéralement Colline jaune), en périphérie de l’hypercentre, mérite aussi un petit détour. J’y ai assisté à un concert acoustique très surprenant. Je pourrais aussi mentionner la crypte du couvent des Capucins mais les momies sont un peu glauques.

Pour ma part, j’ai visité la superbe Galerie Morave de Brno, un musée dédié aux arts décoratifs, au design et à la mode. Le bâtiment lui-même est magnifique et abrite, entre autres, une somptueuse collection d’objets en cristal de bohême. Dans un genre bien différent, le Moravské zemské muzeum (Musée de Moravie) mérite une escale. Il est divisé en 4 grands espaces permanents consacrés à la minéralogie, à la préhistoire, au Moyen-âge, et à l’histoire contemporaine tchèque dont les deux guerres mondiales et le Printemps de Prague. Deux expositions temporaires étaient proposées lors de ma visite. L’une était dédiée au compositeur italien Antonio Salieri (1750-1825) ; l’autre commémorait le centenaire de la découverte de la Vénus de Dolní Věstonice. Cette minuscule et gracieuse statuette a été trouvée par l’équipe du professeur Karel Absolon en Moravie du Sud en juillet 1925.

A 20 minutes en voiture de Brno se trouve le site de la bataille Austerlitz, dans la plaine de Slavkov. Les visites de la chapelle et du musée se font malheureusement exclusivement en Tchèque. Il y a également des reconstitutions historiques mais je crois qu’elles ont lieu au moment des commémorations en période hivernale. Non loin du champs de bataille, il y a le château de Slavkov et ses jardins. Mes interlocuteurs tchèques m’ont également recommandé la visite du centre historique d’Olomouc, à 65 km au nord-est de Brno. On s’y rend très facilement en bus à partir de la gare routière. En ce qui me concerne, j’ai découvert le château et la charmante cité de Mikulov au sud, près de la frontière autrichienne. C’est un important centre de culture juive. On peut déambuler dans le cimetière ainsi que dans l’ancienne synagogue qui date du 16ème siècle. La nécropole juive de Třebíč est peut-être plus connue puisqu’elle est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco mais je n’ai pas eu l’occasion de m’y rendre.

A Brno, il y a plusieurs librairies où l’on peut se procurer des ouvrages en Anglais. Je fréquente surtout Martinus ou Barvic & Novotny en centre-ville mais il y en a d’autres. J’aime la première pour la modernité cosy de son sous-sol et son espace café lumineux à l’étage. L’atmosphère de la seconde est plus traditionnelle. Elle fleure bon le bois et le papier. Le mur de l’escalier, qui conduit aux étages supérieurs, est orné de tranches de livres. J’y ai déniché un opus intitulé The Book of Prague. Il s’agit de recueil de nouvelles assez court contenant notamment un texte de Bohumil Hrabal.

La librairie Martinus dans le centre ville de Brno @jelisjeblogue

Parmi les auteurs contemporains attachés à Brno, on peut mentionner Kateřina Tučková. Elle est l’autrice d’un roman intitulé Les exilées de Moravie (Charleston, 2024) qui raconte l’histoire d’une jeune Allemande expulsée de chez elle en mai 1945 lors de la "Marche de la mort de Brno".

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