Tokyo revisitée. David Peace

Tokyo revisitée. David Peace


Je suis ressortie déçue et frustrée de cette lecture que je n’ai d’ailleurs pas pu terminer malgré mes nombreuses tentatives. Cela faisait pourtant longtemps que je voulais lire David Pearce et je suivais de loin ses parutions depuis la sortie de son fameux "Quatuor du Yorkshire" (1974, 1977, 1980 et 1983) chez Rivages. Le temps a passé (trop) vite et l’écrivain britannique a publié de  nombreux ouvrages depuis ce premier succès. Sa trilogie consacrée à Tokyo (Tokyo année zéro, Tokyo, ville occupée et Tokyo revisitée) avait tout pour me séduire : le cadre géographique de la capitale nippone, le contexte historique de l’occupation américaine après la seconde guerre mondiale et le genre policier. La proposition de lecture partagée d’Ingannmic, dans le cadre du challenge Sous les pavés, les pages était donc idéale pour me lancer enfin. Le fait de commencer par le troisième volet de la série n’était pas non plus un obstacle sachant que chaque tome du cycle s’inspire d’un fait divers réel différent (1). En réalité, j’ai surtout été gênée par le style très particulier de David Peace : les répétitions incessantes, les phrases sèches (sujet, verbe… éventuellement complément) et les nombreuses ellipses.

« Ils sont venus, vêtus de noir et de blanc, par centaines, par milliers, formant une longue file, une queue immense qui s’étire tout le long de la rue jusqu’à l’orée du parc. Vêtus de noir et de blanc, par centaines, par milliers, une longue file, une queue immense qui avance, lentement, lentement, pas à pas, des heures durant, sous le soleil, le soleil de l’après-midi, vers la porte, vers le temple. Vêtus de noir et de blanc, par centaines, par milliers, une longue file, une queue immense qui avance, lentement, lentement, pas à pas, pendant des heures, sous le soleil, le soleil de l’après-midi, pour aller s’incliner devant le défunt en signe de deuil, pour honorer Sadanori Shimoyama… » (2)

Le roman est très intelligemment construit puisque qu’il est découpé en trois partie abordant chacune une époque charnière de l’histoire nippone d’après-guerre jusqu’à la mort de l’empereur Hiro-Hito en 1989. Trois protagonistes principaux se succèdent pour nous rapporter les faits : un flic américain, un écrivain et un agent de la CIA. Pour ma part, je n’ai pas dépassé le premier tiers de l’intrigue (la page 117) et n’ai donc pas fait la connaissance de tous les personnages.   

L’histoire débute le 5 juillet 1949 avec la mort de Sanadori Shimoyama, président des chemins de fer japonais. Le retentissement de cet évènement dramatique sur la société japonaise est paraît-il équivalent au meurtre de John Kennedy sur l’histoire américaine. Le corps démembré du malheureux est retrouvé le lendemain, sur une voie de chemin de fer, au lieu-dit du Carrefour Maudit. Harry Sweeney, qui représente les forces de police américaines en place au Japon doit collaborer avec la police métropolitaine japonaise. Dès le début, l’enquête semble compromise. La scène de crime n’a pas été sécurisée, les journalistes (profitant de la récente liberté de la presse mise en place par les occupants étasuniens) publient des témoignages douteux, les uns défendent la thèse du suicide ; les autres (selon leurs intérêts plus ou moins divergents), celle du complot fomenté par les syndicalistes. En effet, Sadanori Shimoyama avait été mandaté par le gouvernement américain pour renvoyer 100 000 hommes affiliés au Parti communiste, une mission qui lui pesait énormément selon ses proches.

Harry Sweeney se déplace tantôt à pied, tantôt en voiture ou ne transport en commun, et l’auteur cite de nombreux lieux de la capitale nippone, comme autant d’indices qui permettraient de géolocaliser les personnages. L’écrivain britannique connait très bien la ville puisqu’il y vit depuis 1994. 

Il parait que Tokyo revisitée est le plus accessible des 3 volets de la trilogie. J’avoue que j’ai hâte de connaître l’opinion d’Ingannmic, ma compagne de lecture, sur ce polar.  

(1) Pour écrire cette trilogie consacrée à Tokyo, David Peace se serait inspiré des affaires criminelles relatées dans trois brefs chapitres de Shocking crimes of Post-War Japan, un ouvrage consacré à l’histoire criminelle japonaise des 50 dernières années. 

(2) Coïncidence incroyable mais vraie, l’extrait que j’ai choisi (Page 96) est mot pour mot identique à celui sélectionné par l’auteur du blog La maison du polar. Il est tellement emblématique du style de l’auteur que je n’ai pas voulu en changer.

📌Tokyo revisitée. David Peace, traduit par Jean-Paul Gratias. Rivages, 300 pages (2022)

Challenge de lecture "Sous les pavés, les pages"



Commentaires

  1. On a le droit de caler sur une lecture!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je suis dans une mauvaise période. Je cumule les abandons

      Supprimer
  2. C'est exactement ce que craignais !! Habituée au style de Peace, et l'appréciant, j'ai eu du mal à me faire à cette première partie qui m'a donné l'impression qu'il voulait faire du Peace mais pas trop ... d'où, je pense, le fait qu'il soit jugé plus accessible que ses autres titres (que j'ai de loin préféré, stylistiquement parlant). J'ai cru m'engager dans une lecture laborieuse, très longue, mais ça s'est arrangé au fil des pages, notamment à partir de la 2e partie. Mais comme je l''écris dans mon billet, j'ai beaucoup pensé à toi... j'avais du mal à imaginer que tu puisses adhérer à cette écriture qui au départ m'a même paru maladroite. Je ne sais pas si tu retenteras de lire cet auteur (la tétralogie du Yorkshire, c'est quelque chose, quand même...) mais sache que son écriture est en effet très particulière, lancinante, répétitive, sauf qu'à mon avis, c'est bien mieux fait d'habitude, ça colle au propos, ça file la nausée au lecteur, ça l'entête, bref c'est très fort ! (Au moins tu es prévenue :).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tu as été fine mouche, en effet. J'ai beaucoup souris en lisant la fin de ton billet. Je n'ai pas été sensible à l'écriture de l'auteur et je suis passée complètement à côté de ce livre mais je ne regrette pas d'avoir tenté l'expérience.

      Supprimer
  3. Je pense avoir entendu parler des ces romans à leur sortie, mais sans passer à l'acte de lecture... Tu ne m'y incites pas aujourd'hui (tant mieux !)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'était une expérience difficile pour moi d'autant que je ne suis pas dans une bonne période de lecture ... je retenterai l'expérience avec un autre roman de Peace plus tard

      Supprimer
  4. je vais laisser passer ce titre et je cours chez Ingannmic oiur lire son avis.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Apparemment, elle s'attendait à ma réaction par rapport au style particulier de Peace.

      Supprimer
  5. La citation est très parlante en effet, et plutôt dissuasive me concernant. Dommage parce que le fait divers et l'époque choisis avaient du potentiel !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je n'ai pas adhéré au style mais l'intrigue est intéressante

      Supprimer
  6. Je n'ai pas lu cet auteur, mais j'avoue que là, tu ne me donnes pas très envie^^, malgré mon attrait pour tout ce qui touche le Japon de près ou de loin. J'espère que tu traverses juste une mauvaise passe lecture qui ne va pas durer trop longtemps.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'étais attirée pour la même raison que toi mais l'écriture est vraiment venue à bout de mon enthousiasme.

      Supprimer
  7. Le billet d'Inganmmic n'était déjà pas très tentant, le tien achève de me convaincre de passer mon chemin.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Il faut peut-être commencer par un autre roman de la trilogie mais je n'insiste pas

      Supprimer
  8. Et bien je n'ai jamais lu cet auteur et tu ne me donnes pas très envie de le découvrir pour l'instant...mais j'ai aimé lire tes arguments. Je vais donc aller lire l'avis d'Inganmmic tout de suite

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'espère qu'Ingannmic tr donnera davantage envie de lire ce roman car il a des atouts

      Supprimer
  9. J'ai lu avec beaucoup d'enthousiasme 1974 mais c'était en 2012... J'ai acquis la suite, 1977, en me disant qu'il me fallait trouver le bon moment car le style évidemment est exigeant. Et puis voilà, toujours pas lu... Mais la trilogie sur Tokyo ne me tente pas du tout car je n'ai pas d'affinités avec ce pays, au contraire.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Si les autres romans de David Peace sont dans la même veine, je pense que je vais m'arrêter là.

      Supprimer
  10. Tokyo année zéro me tentait moyennement. Une trilogie qui n'est pas pour moi.

    RépondreSupprimer
  11. Je viens de dire chez Ingannmic que je ne savais trop qu'en penser, j'hésite beaucoup moins en lisant ton billet :) Ce n'est pas grave, il y a tant à lire...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le style est particulier et il vaut mieux être prévenu.

      Supprimer
  12. Ne me tente pas. L’extrait ne donne pas du tout envie et pourtant je commence à m’intéresser au Japon. Quant aux abandons de lecture, cela m’arrive souvent mais par période.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je crois que ce roman ne pouvait pas arriver plus mal pour moi

      Supprimer
  13. Lire l'extrait comme un poème avec la répétition voulue pour donner l'idée d'étirement, de longueur, je veux bien. Mais ce style dans un roman doit fatiguer à la longue.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. exactement. ça passe de temps en temps mais c'est fatiguant quand c'est trop souvent

      Supprimer
  14. j'ai lu le billet d'Inganmic et j'étais curieuse de lire le tien. Elle a un doute sur la traduction. Sinon, j'ai lu l'extrait et je déteste les répétitions (enfin sauf dans les romans de BAE Suah) mais j'aimerais bien le lire un jour mais en anglais (et sans doute les 4 romans des années 70) à voir donc là je lis à la vitesse d'un escargot (mais j'achète des livres)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Toutes ces répétitions sont venues à bout de ma patience. Ce n'était pas une lecture fluide et agréable pour moi. en plus, ça ne tombait vraiment pas au bon moment. Je ne lis pas beaucoup non plus en ce moment.

      Supprimer
  15. Pas très engageant tout ça... Vu que moi aussi j'ai pas mal de déceptions ou de lectures mitigées en ce moment, c'est donc le genre de titre que je vais oublier de suite !

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Les Doigts coupés. Hannelore Cayre

Neuf vies. Peter Swanson

Les Naufragés du Wager. David Grann

La maison allemande. Annette Hess

Une saison pour les ombres. R.J. Ellory