Les dames de Kimoto. Cyril Bonin
Cette bande dessinée est une adaptation du roman éponyme de Sawako Ariyoshi (Folio, rééd. 2018), un classique de la littérature nippone. Le récit débute en 1899, sous l’ère Meiji (1868-1912), et s’achève en 1958, sous l'ère Shōwa (1926-1989). C’est une période charnière pour le Japon qui se traduit, avant la seconde guerre mondiale, par à la modernisation du pays et son ouverture à la culture occidentale. Le conflit russo-japonais est également évoqué brièvement au début du roman graphique. L’histoire nous est présentée du point de vue d’Hana, la doyenne, mais s’étend sur 3 générations. A travers les destins de ces femmes, l’œuvre s’attache à montrer l’emprise durable de la société patriarcale et l’évolution de la condition féminine au Japon.
Hana est issue de la longue lignée des Kimoto, une riche famille originaire de la péninsule de Kii, sur l'île de Honshū, dans l’actuelle préfecture de Wakayama. C’est sa grand-mère chérie, Toyono, qui l’a élevée et préparée à tenir son rôle de maîtresse de maison au sein de son futur foyer. En plus d’être belle, Hana maîtrise parfaitement tout ce qu’une jeune femme de son rang doit savoir, c’est-à-dire la calligraphie, la pratique du Koto et l’art de la cérémonie du thé. Après maintes tergiversations, Toyono se résout (avec l’accord de son fils aîné) à marier sa protégée. L’heureux élu est Keisaku Matani, le fils du maire du village de Musota. Hana accepte son destin sans broncher et descend le fleuve Kii pour retrouver son époux, lors d’une somptueuse parade nuptiale. Si Keisaku est promis à un bel avenir dans la politique, sa parentèle n’est pas tout à fait l’égale de la famille d’Hana mais la superstition et la tradition locale veulent qu’une femme ne choisit jamais son mari en amont du fleuve Kii. La jeune femme s’adapte à son nouvel environnement, prodigue à son époux quelques conseils avisés dans l’intimité de la chambre matrimoniale et lui donne deux enfants. Seiichirô, le garçon, est intelligent mais ne semble pas, au grand désespoir de son père, taillé pour la politique. Sa sœur Fumio, une âme exaltée et rebelle, semble plus prometteuse… mais c’est une fille. La seconde partie de l’histoire lui est dédiée, tandis que la troisième sera consacrée à sa fille Hanako, plus posée et disciplinée. Le récit s’arrête en 1958, à la mort de sa grand-mère Hana dont elle était très proche.
Cyril Bonin n’en est pas à son coup d’essai en matière d’adaptation romanesque. Il est également l’auteur d’un roman graphique inspiré de l’œuvre de Marcel Aymé (La belle image, Futuropolis, 2011) et d’une BD adaptée d’un livre de David Foenkinos (La délicatesse, Futuropolis, 2016). Il a aussi publié la série Fog avec Roger Seiter chez Casterman et plusieurs albums chez Dupuis, Futuropolis, Bambou et Vent d’Ouest. On reconnaît bien son coup de crayon dans Les dames de Kimoto, notamment dans les faciès qui sont très caractéristiques. Pour ce One-shot, il a choisi d’accentuer la touche de féminité avec des nuances de rose très présentes. Les rares représentations paysagères ou architecturales sont très réussies. Je lui tire en tout cas mon chapeau car il n’a pas dû être facile d’adapter l’œuvre originale en BD. Le roman de Sawako Ariyoshi est d’abord paru sous la forme d’un roman feuilleton dans le mensuel féminin Fujin Gahō, entre janvier et mai 1959. En juin de la même année, il est finalement publié par la maison d'édition japonaise Chūōkōronsha. C’est le premier volet de la Trilogie fluviale qui comprend aussi les romans Aridagawal (La Rivière Arida, 1963) et Hidakagawal (La Rivière Hidaka, 1965). A ma connaissance, ces deux derniers tomes n’ont pas été traduits en français.
📚Un autre avis que le mien chez Sacha
📌Les dames de Kimoto. Cyril Bonin. Sarbacane, 112 pages (2022)
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