Les nuits de Topkapi. Jean-Paul Brighelli

Les nuits de Topkapi. Jean-Paul Brighelli


Cela faisait longtemps que je n’avais pas mis le nez dans un bon roman d’aventures. Celui-ci nous conduit au cœur de l’empire Ottoman à la fin du 17ème siècle. 

Balthazar Herrero, espion et médecin de Sa Majesté, est missionné par le marquis de Louvois pour négocier avec la Sublime Porte. Sous couvert de rapatrier la dépouille du défunt ambassadeur de France, il doit convaincre le Sultan, par l’intermédiaire de son grand vizir, de s’allier à Louis XIV contre la Ligue d'Augsbourg. Il s’agirait de prendre les troupes des Autrichiens en tenaille. Mais, si le Roi-soleil est à l’apogée de sa puissance, les Ottomans subissent quelques revers politiques et militaires. 

Notre héros est invité à accompagner le vizir Sari Süleyman Pacha sur le champ de bataille de Mohács en Hongrie. C’est ainsi qu’ il assiste à la défaite de l’armée Ottomane contre les forces de l'armée impériale du Saint Empire romain germanique. Cette lourde défaite va porter un coup d’arrêt à l’expansion turque en Europe. Sari Süleyman Pacha prend la fuite avant d’être rattrapé à Belgrade puis condamné à mort. Le sultan Mehmed IV est déposé peu de temps après et remplacé par son frère, le faible Soliman II. A peine installé sur le trône, celui-ci doit faire face à une grave révolte des janissaires. 

Tous ces évènements ne facilitent pas la mission de Balthazar Herrero mais notre espion n’est pas homme à se décourager. Aidé de son fidèle Gaspard, un huguenot qu’il a arraché aux galères de Sa Majesté, le rusé médecin français, va devoir utiliser de nombreux détours pour parvenir à ses fins. C’est ainsi qu’il se trouve impliqué dans les complots internes de la Sublime Porte, le rachat d’une jeune esclave grecque et l’élimination du chef de la secte des Hashichins. 

Ces péripéties le conduisent du palais de Topkapi à Constantinople jusqu’à Alexandrie, en passant par Smyrne (au moment du séisme) et la forteresse de Baghras. Parmi ses compagnons de route, dont Gaspard et la belle Haydée, il y a le bibliothécaire de l’ambassade de France, un certain Antoine Galland. Cet orientaliste érudit se pique de traduire un vieux manuscrit intitulé Les Mille et une nuits dont il régale ses acolytes. C’est sans doute cette anecdote qui donne son titre au roman de Jean-Paul Brighelli.

Quel plaisir de lecture ! Le rythme est effréné, comme il se doit dans un roman d’aventures,  et j’ai tout suite été happée par les moultes péripéties auxquelles est confronté notre sympathique groupe de compagnons. Balthazar Herrero n’est pas sans rappeler un peu Jean-Baptiste Poncet, jeune médecin des pachas du Caire, dans L'Abyssin de Jean-Christophe Rufin. Le roman m’a également fait penser aux aventures d’Antoine Petitbois, espion de Richelieu, dans l’œuvre de Jean-Michel Riou (1630, la Vengeance de Richelieu et 1658, l'Éclipse du Roi-Soleil). 

Les personnages et les ressorts de l’intrigue ne sont peut-être pas originaux mais la plume enlevée de Jean-Paul Brighelli est un régal pour le lecteur. Une partie du roman se présente sous la forme épistolaire et la narration est truffée d’anecdotes historiques qui en sont le sel. D’après ce que j’ai compris, il s’agit en réalité de la seconde aventure de Balthazar Herrero. Avant Les nuits de Topkapi, le médecin du roi s’est déjà illustré dans Soleil noir pour défendre les villages martyrs huguenots. 

📚Un autre avis que le mien chez Patsy Monsoon

📌Les nuits de Topkapi. Jean-Paul Brighelli. L'Archipel, 360 pages(2025)


Préparez-vous à un hiver polar

Challenge Un hiver polar

Nous arrivons mi-novembre et la rentrée littéraire semble déjà loin. L’euphorie est retombée, la météo incite plutôt à l’hibernation, la nuit tombe tôt… bref, l’ambiance générale n’invite-t-elle pas à se réfugier dans la littérature de mauvais genres ? Je plaide coupable mais  je suspecte que je ne suis pas la seule à enchainer les polars en série et à martyriser ma PAL. Avec votre complicité, je propose donc d’organiser un challenge dédié à la littérature policière et à ses nombreux sous-genres

  • Roman noir, 
  • Whodunit,
  • Roman d’espionnage, 
  • Thriller, 
  • Ethno polar,
  • Country noir
  • Roman policier historique,
  • Polar d’anticipation 
  • Cosy mystery, 
  • Roman policier humoristique,
  • True crime, 
  • (…) 

Le challenge débutera le 21 décembre 2025, jour du solstice d’hiver, et sera clôturée le 20 mars 2026 avec l’arrivée de jours meilleurs. Cela vous laisse un peu de sursis pour vous mettre en quête de lectures appropriées. L’intrigue peut bien-sûr se dérouler en toutes saisons et dans n’importe quels lieux qui vous inspirent.  

💡Un billet de lancement expliquera en détail tout le déroulement de l’activité mais je vous donne déjà quelques indices : 

Des propositions de lectures communes: 

  • Destination Québec, le 10 janvier avec un titre au choix d’Andrée A. Michaud 
  • Destination Groenland, le 10 février avec La fille sans peau de Mads Peder Nordbo
  • Destination Islande, le 10 mars avec Kalmann de Joachim B. Schmidt

Et un bingo meurtrier: 

Le jeu (facultatif) consiste à valider un maximum de mots-clés grâce à vos lectures et d’obtenir ainsi des points bonus au classement final.

Un hiver Polar, le bingo meurtrier

Toutes les idées et suggestions concernant le challenge de lecture sont les bienvenues. N’hésitez pas à me les transmettre. 


A bientôt !


Anatomie d'un drame. Gert Loschutz

Anatomie d'un drame. Gert Loschütz


💪Ce livre était dans ma Pile à lire depuis un moment car je le gardais soigneusement pour le challenge des Feuilles allemandes, organisé par Eva et Patrice du blog Et si on bouquinait un peu.  Son éditeur indique en 4ème de couverture que Gert Loschütz est un auteur prolifique bien qu’Anatomie d'un drame soit son premier roman traduit dans notre langue. 

Le roman se présente sous la forme d’une enquête historique consacrée à la plus grande catastrophe ferroviaire allemande du 20ème siècle, qui n’est malheureusement pas fictive. La partie investigation alterne avec des passages plus personnels dédiés à l’histoire intime et familiale du narrateur. La ressemblance entre Gert Loschütz et son personnage, Thomas Vandersee, est tellement frappante que je ne doute pas qu’il s’agisse de son alter ego de papier. Comme son héros, il est né à Genthin dans le Land de Saxe-Anhalt, et sa famille est passée à l’Ouest dans les années 50. 

Dans la nuit du 21 au 22 décembre 1939, deux trains express entrent en collision dans la gare de Genthin. La bourgade est située à l’est de l’Allemagne, entre Berlin et Magdebourg. Les trains impliqués sont le D10, un express allant de la gare de Potsdam à Berlin jusqu’à Cologne, et le D180 en direction de Neunkirchen dans la Sarre. Le bilan est de 278 morts, sans parler des blessés. Le sauvetage des survivants et le déblaiements des voies sont beaucoup retardés à cause des conditions climatiques et du contexte de la seconde guerre mondiale. les températures sont tombées à -15 °C, les lois sur le black-out retardent la mise en place de projecteurs et la mobilisation militaire a pour conséquence une pénurie de main d’œuvre de secours.  

On sent bien que l’auteur a fait des recherches minutieuses et procède effectivement à une véritable autopsie de l’accident. Il s’est plongé dans les archives de la Reichbahn, a décortiqué les rapports de police et cherché des témoins (la plupart indirects étant donné la date de la catastrophe). Tout cela est passionnant mais nuit beaucoup à la narration dans la première partie du roman. Je me suis perdue dans les détails, les noms des protagonistes et les informations techniques. 

L’instinct du narrateur l’incite à chercher un lien entre la tragédie et sa propre histoire familiale, au travers de la vie de sa mère. En 1939, Lisa Vandersee était une jeune fille, apprentie dans un grand magasin de vêtements à Genthin. Son fils pense qu’elle a peut-être croisé une jeune survivante de son âge. Cette voyageuse, originaire de Dusseldorf, s’appelait Carla. Elle s’apprêtait à rejoindre son fiancé, Richard. Celui-ci était bloqué dans sa ville natale à cause des Lois de Nuremberg, qui imposaient de nombreuses restrictions aux Juifs, dont le droit de voyager. Thomas Vandersee / Gert Loschütz mène une véritable enquête sur Carla, remonte sa piste jusqu’à Berlin où elle séjourné avant la tragédie. Il comble les trous par le biais de la fiction, imaginant des dialogues plausibles et des évènements probables.

Au final, en dépit d’un démarrage difficile, j’ai beaucoup apprécié cette lecture dont les fils narratifs vont bien au-delà de la catastrophe du 22 décembre 1939. 

📌Anatomie d'un drame. Gert Loschütz. Actes Sud, 304 pages (2024)

Challenge Feuilles allemandes 2025


Les Piliers de la Terre, T.01 et T.02. Alcante & Dupré

Les Piliers de la Terre, T.01 et T.02. Alcante & Dupré


Je n’ai pas pu résister à une adaptation en BD des Piliers de la Terre, la fameuse saga historique de Ken Follett. C’était déjà hardi de la part de l’écrivain britannique d’imaginer une intrigue de plus de 1000 pages autour de la construction d’une cathédrale. Il s’en était sorti grâce à des personnages forts et un rythme de narration effréné. Moultes complots jalonnent l’histoire de ce chantier médiéval. J’étais vraiment curieuse de découvrir comment Didier Alcante (le scénariste) et Steven Dupré (le dessinateur) s’y étaient pris pour transposer un texte comme celui-ci dans un format si contraignant. Selon les informations que j’ai pu glaner, le roman graphique devrait compter 6 tomes. Le troisième sortira ce mois-ci. Il va donc falloir être patient avant de voir le résultat final mais les deux premiers volets sont déjà très prometteurs et donnent envie de poursuivre l’aventure. 


Les Piliers de la Terre, T.01. Alcante & Dupré P26-27


Le premier tome commence par un naufrage. Dans la nuit du 25 novembre 1120, un navire appelé La Blanche-Nef est emporté dans une tempête au large des côtes normandes. L’unique héritier du roi Henri 1er d’Angleterre disparait dans La Manche, augurant une période de troubles. Elle se traduira par une guerre de succession à la mort du souverain 15 ans plus tard. Deux camps s’affrontent. D’un côté, Stephen (Etienne de Blois) s’empare du pouvoir avec l’aide de son cadet, l’évêque de Winchester. De l’autre, Robert de Gloucester, fils illégitime du défunt roi Henri, soutient le parti de sa demi-sœur Maud (Mathilde l'Emperesse) et de son neveu, le futur Henri II Plantagenêt. Comme si cela ne suffisait pas, cette période dite d’Anarchie, se double d’un hiver très rude et de mauvaises récoltes. 


Les Piliers de la Terre, T.01. Alcante & Dupré . P76-77


Tom le bâtisseur et sa famille doivent battre la campagne pour trouver du travail. Notre héros, qui rêvait de construire une cathédrale, doit se résoudre à louer ses bras pour subvenir aux besoins de son clan. Agnès, son épouse, meurt au milieu d’une forêt gelée en donnant naissance à un fils.  Tom doit déjà nourrir deux enfants, Alfred et Martha. Il n’a donc pas d’autre choix que d’abandonner le nourrisson sur-place, près de la sépulture hâtive d’Agnès. Il est finalement pris de remords et rebrousse chemin. Trop tard ! Le bébé a disparu. Une jeune femme appelée Ellen lui apprend que des moines l’ont recueilli au sein de leur communauté religieuse de Saint-John-de-la-Forêt.


Les Piliers de la Terre, T.02. Alcante & Dupré. P30-31


🚩Passez votre chemin sans lire les deux paragraphes suivants si vous ne voulez pas en savoir trop sur la suite de l’intrigue.

Nous retrouvons dans le second tome les personnages déjà croisés précédemment dont certains que je n’ai pas encore évoqués pour ne pas divulgâcher toute l’intrigue. Le père Philip Gwynedd, par exemple, prieur de Saint-John-de-la-Forêt est entrainé dans un complot politique qui le dépasse. Waleran Bigod, l’archidiacre de Kingsbridge, le manipule pour obtenir l’évêché et les terres du comté de Shiring. L’ancien comte Bartholomew a été accusé de comploter avec Robert de Gloucester contre le roi Stephen. Sa fille Aliena et son fils Richard, devenus orphelins, sont jetés en pâture au jeune William Hamleigh. Ce cruel lord souhaite se venger de la jouvencelle qui l’avait éconduit au temps de la puissance de Bartholomew. 


Les Piliers de la Terre, T.02. Alcante & Dupré P64-65


Tom, Ellen et leurs enfants, qui avaient trouvés refuge à Earlcastle, le château du comte déchu, doivent reprendre la route. Le hasard les pousse jusqu’à l’abbaye de Kingsbridge dont le bon père Philip est devenu le prieur. Or, la bâtisse mériterait d’être rénovée et les fonds risquent de manquer cruellement sans les revenus du comté de Shiring. Il faudrait un évènement extraordinaire pour débloquer la situation. Jack, le fils d’Ellen, a sa petite idée sur la question… 🚩

Ouf ! Comme vous pouvez le constater, le lecteur est loin de s’ennuyer ! Les dessins de Steven Dupré servent très bien le scénario haletant de Didier Alcante. Les planches, loin d’être encombrées de textes et de détails inutiles, sont claires et les fonds épurés. Pour mettre en valeur les bâtiments et certains évènements, l’illustrateur alterne les découpages de tailles différentes. Par exemple, lorsque les personnages arrivent dans la cité royale de Winchester, une vue quasi pleine page de son plan et de son architecture apparait au lecteur. J’ai aimé aussi les paysages enneigés du premier volume contrastant avec les intérieurs plus sombres (et un peu plus douillet) des bâtisses. J’ai vraiment hâte de découvrir la suite. 

📌Les Piliers de la Terre. Tome 01 : Le Rêveur de cathédrales, Glénat, 104 pages (2023)

Les Piliers de la Terre. Tome 02 : Le Feu de Dieu, Glénat, 88 pages (2024)

Didier Alcante (Scénariste) et Steven Dupré (Dessinateur), d'après l'oeuvre de Ken Follett.


Les Alexandrines. Marjan Tomsic

Les Alexandrines. Marjan Tomsic


C’est la nationalité de l’auteur, Marjan Tomšič (1939-2023) qui m’a incitée à jeter mon dévolu sur ce livre. Je ne connaissais rien de la littérature slovène avant de le lire. Il s’agit d’un roman historique traitant de l’exil des femmes. Les Slovènes qui quittaient leur pays pour aller travailler en Egypte étaient surnommées les Alexandrines. Elles étaient nombreuses à débarquer à Alexandrie ou au Caire pour rembourser les dettes de leurs familles, l’hypothèque d’une ferme ou le rachat d’un champs. Tout a commencé avec la construction du canal de Suez, entre 1859 et 1869,  qui attirait de nombreux étrangers fortunés en Egypte. Au fil du temps, les jeunes slovènes ont acquis une excellente réputation. Elles se faisaient embaucher le plus souvent comme nourrices ou dames de compagnies et représentaient une sorte de classe supérieure dans la hiérarchie des domestiques. Au bout de quelques années de bons et loyaux services, elles rentraient dans leur pays natal. Le retour était souvent difficile et nécessitait une période de « ré- acclimatation ». Certaines femmes ne parvenaient pas à se réinsérer dans leur communauté d’origine et faisaient des allers-retours incessants entre la Slovénie et l’Egypte.

Le roman se situent dans les années 1930. L’auteur évoque en effet la montée du fascisme en Italie et l’accession de Pierre II au trône de Yougoslavie en 1934 (sous la régence de son oncle, le prince Paul). Pour rappel, l’ancien Royaume des Serbes, Croates et Slovènes a été rebaptisé Royaume de Yougoslavie en octobre 1929 sous l’égide d’Alexandre Ier Karađorđević. Il sera assassiné à Marseille en France, le 9 octobre 1934. La Yougoslavie comprend alors les États actuels de Bosnie-Herzégovine, de Serbie, de Macédoine du Nord, du Monténégro ainsi qu’une bonne partie des actuelles républiques de Slovénie et de Croatie. En revanche, le duché de Carinthie a choisi de rester en Autriche (ex Empire Austro-Hongrois) tandis que la Dalmatie, le port de Zadar et quelques îles sont cédés à l'Italie. Ce contexte explique pourquoi les personnages font souvent référence à l’oppression italienne et ses taxes élevées.

Le lecteur est invité à suivre les destins de trois jeunes femmes : Ana, Merica et Vanda. Elles quittent ensemble la bourgade de Gorica (peut-être actuel Nova Gorica à l’ouest de la Slovénie) voyagent d’abord sur une charrette. Nos Goriciennes embarquent à Trieste où elles occupent le pont inférieur du Paquebot avec les passagers les plus pauvres. Elles sont finalement accueillies à Alexandrie par les sœurs de l’Asile Saint-François. Les religieuses servent d’intermédiaire entre les employeurs et les migrantes. Vanda est la plus jeune de nos héroïnes. Elle est âgée de 16 ans à peine. Son futur employeur, un commerçant égyptien, l’a jugée trop jeune pour devenir bonne d’enfant. Elle trouve finalement une place de dame de compagnie chez le docteur Maloum Saba Bacosse. Son épouse, Hanuma, s’est en effet entichée de la belle adolescente slovène. Merica, notre deuxième Alexandrine, est une jeune maman qui a dû laisser son mari et nourrisson au pays pour leur assurer un meilleur avenir. Elle entre au service de la famille de Sir Henry Cherington. Elle devra allaiter Thomas car "Madame Therese", la mère du bébé, n’a plus de lait. Merica devra aussi veiller sur le sommeil de l’enfant et s’assurer de sa bonne santé. Ana enfin, qui en est à son second séjour en Egypte, a trouvé un emploi à l’Hôtel Cecil où elle va rapidement gravir les échelons. 

J’ai tout de suite été emportée par la plume de l’auteur et littéralement happée par l’intrigue. Le lecteur est convié dans l’intimité des trois héroïnes au point d’avoir parfois la sensation d’entrer dans leurs têtes et de partager leurs peines (le plus souvent) comme leurs joies (rares). Les migrantes souffrent du mal du pays et de la séparation avec leurs proches. Les histoires qui circulent au sein de leur communauté ne sont pas toujours rassurantes. Le téléphone arabe fonctionne à plein régime chez les Alexandrines et elles ont ouï-dire des destins souvent tragiques de leurs homologues. Il y a celles qui ont été violentées par leurs patrons, celles qui sont tombées malades ou encore celles qui ont été enlevées et ont terminé dans un harem ou un lupanar. Il arrive aussi que les anciennes Alexandrines soient rejetées par leur famille d’origine dès qu’elles cessent de leur envoyer de l’argent. La question du retour ou non en Slovénie se pose alors. 

Bien qu’assez dense, le roman de Marjan Tomšič se lit avec une étonnante facilité. Les héroïnes inspirent l’empathie et le lecteur s’attache facilement à elles. Le roman m’a rappelé deux ouvrages traitant plus ou moins le même thème. Il s’agit de Nourrices de Severine Cressan, une autre belle surprise de cette rentrée littéraire, et Quand je reviendrai de Marco Balzano dont l’intrigue est plus contemporaine.

📚D’autres avis que le mien via les blogs de Bruno, Alex mot à mots, Ju Lit les mots, Surbooké

📌Les Alexandrines. Marjan Tomšič, traduit par Andrée Lück Gaye. Agullo, 416 pages (2025)